Prières réformées (10) : La miséricorde triomphe du jugement (Pierre Du Moulin)
20 septembre 2020

Pour encourager nos lecteurs dans leur dévotion et culte privé et leur faire découvrir la piété réformée, nous publierons régulièrement des prières d’auteurs réformés. Nous poursuivons avec une prière de Pierre Du Moulin fils (1568-1658), inspirée de Jacques 2:13 et tirée de son livre Semaine de méditations et de prières. Nous remercions Philippe Lacombe de Pensées 365 pour la mise en forme des textes.


Dieu tout-puissant et Père miséricordieux, qui m’apprends par ton apôtre que la miséricorde se glorifie contre la condamnation (Jac 2.13), je te loue et te glorifie de tout mon coeur, de ce que tu me fais trouver dans ma conscience l’explication de cette sainte parole. Car quand je considère la condamnation générale du monde pervers qui vit en inimitié contre toi, et que moi-même suis né dans cette condamnation, et que néanmoins il te plaît de parler de paix à mon âme, et de sceller dans mon coeur la rémission de mes péchés par une vive foi, je suis ravi dans une sainte admiration et touché au vif d’humilité, de joie et de reconnaissance, contemplant la tête baissée, comme les anges, les profondeurs de ta miséricorde, et tâchant d’y regarder jusqu’au fond.

Hé, quelle profondeur de bonté, d’avoir donné ton propre Fils pour racheter tes ennemis ! Que ce Fils éternel ait pris ma chair pour me donner son Esprit ! Qu’il ait souffert la mort pour me donner la vie ! Qu’il ait porté le poids de la colère de Dieu pour me donner sa paix ! Que d’ennemi que j’étais il m’ait adopté pour être des enfants de Dieu ! Ô mon Dieu, que ne puis-je assez connaître ta miséricorde, afin que je puisse assez t’aimer ! Ô Dieu de notre Seigneur Jésus-Christ, Père de gloire, donne-moi l’esprit de sagesse et de révélation par sa connaissance (Eph 1.17) A savoir les yeux de mon entendement illuminés, afin que je sache quelle est l’espérance de ta vocation, et quelles sont les richesses de la gloire de ton héritage des saints. Et quelle est l’excellente grandeur de ta puissance envers nous qui croyons selon l’efficace de la puissance de ta force, laquelle tu as déployée avec efficace en Christ. Ô Christ, grand et unique Médiateur de ma paix avec Dieu, pourrai-je jamais suffisamment comprendre l’excellence de ton amour et la grandeur de tes bienfaits !

Je suis naturellement souillé d’iniquité, mais tu m’en as lavé dans ton sang. Mes péchés sont un pesant fardeau, mais tu les as chargés sur toi. Je suis coupable devant le trône judicial de ton Père, mais je suis acquitté par ton intercession. Je suis injuste, mais tu m’as couvert de ton mérite. Mais non je ne suis plus injuste, je suis désormais juste par ta justice. Ô Père de notre Seigneur Jésus-Christ, maintenant que je suis tout enveloppé de l’obéissance de ton Fils par la foi, tu ne vois plus d’iniquité en moi. Je parais devant toi, tout juste, tout saint et tout irrépréhensible, puisque tu me regardes à travers du mérite de ton Fils. Qui intentera accusation contre moi, vu que Christ me justifie ? Bien loin donc d’attendre la condamnation, j’attends la récompense, et je n’attends pas la moindre récompense que le royaume des cieux, car nulle récompense n’est trop grande pour le mérite de ton Fils qui est devenu mon mérite.

Cette moisson m’est assurée, mais elle est encore en herbe. Toutefois je la sens dans mon coeur pousser et se former vivement. Car les conseils intérieurs de ton amour et de ta crainte, et ta paix que par ta grâce tu me donnes en quelque mesure laquelle surmonte tout entendement et qui garde mon corps et mes sens en Jésus-Christ n’est autre chose que le royaume des cieux qui s’avance, et qui s’établit au dedans de moi. C’est cette bonne paix qui m’assure là dedans que tu es réconcilié avec moi, que tu es mon Père, que Jésus Christ est mon Sauveur, que ton royaume est mon héritage.

Mais parce que le péché vit encore en moi, que la chair est revêche, le monde séducteur, et Satan incessamment au guet pour troubler la paix de tes enfants en les poussant dans les tentations, je te supplie, ô grand Prince de paix, de venir toi-même prendre en main les rênes de mes pensées, et de les tenir en obéissance sous l’empire de ton Esprit, afin que je ne rompe jamais la paix avec toi par aucune rébellion. Qu’étant justifié par la foi, je suis sanctifié par elle-même. Que ma paix étant faite avec toi par le mérite de ton Fils, je haïsse le péché qui est la discorde et l’inimitié contre toi, qui émeut le trouble dans la conscience, et qui met l’âme en dissension avec elle-même. Que dans mon âme la justice et la paix se tiennent embrassées (Ps 85.11). Que ta paix dans mon coeur y produise le vrai usage déclaré par ta parole, à savoir que tu parles de paix à ton peuple, et à tes bien-aimés, afin que jamais ils ne retournent à leur folie.

Fais-le, ô Dieu de paix, pour l’amour de ton Fils qui a fait notre paix. Et à lui comme à toi et au Saint-Esprit qui scelle en nos coeurs ta paix et notre réconciliation, soit gloire dans les siècles des siècles.

Amen.

Illustration en couverture : Eastman Johnson (1824-1906), Child at prayer, 1873.

Maxime Georgel

Maxime est interne en médecine générale à Lille. Fondateur du site Parlafoi.fr, il se passionne pour la théologie systématique, l'histoire du dogme et la philosophie réaliste. Il affirme être marié à la meilleure épouse du monde. Ils vivent ensemble sur Lille avec leurs trois enfants, sont membres de l'Église de la Trinité (trinitelille.fr) et sont moniteurs de la méthode Billings.

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