Commentaires sur : L’Église chez Calvin : remède à nos faiblesses et mère des croyants, hors de laquelle il n’y a pas de salut ! https://parlafoi.fr/2020/06/18/hors-de-leglise-point-de-salut-lanalyse-de-jean-calvin/ Blog de théologie réformée Fri, 26 Jun 2020 16:18:10 +0000 hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.5.2 Par : Jean-Mikhaël Bargy https://parlafoi.fr/2020/06/18/hors-de-leglise-point-de-salut-lanalyse-de-jean-calvin/#comment-8804 Tue, 23 Jun 2020 21:17:08 +0000 http://parlafoi.fr/?p=17134#comment-8804 En réponse à Matt Moury.

Turretin dans IEC, XVIII.1.iii (p. 1 du vol. 3) :

“Second, since there is no salvation out of the church (no more than out of the ark; nor does anyone have God as his Father in heaven whose church is not his mother on earth), nothing ought to be dearer to our hearts than that this mother may be known (in whose bosom God has willed us to be educated and to be nourished). It behooves us to be directed by her care until we grow up and arrive at the goal of faith. Also it behooves us to know what assembly is that true church with which (according to the command of God) we are bound to connect ourselves that we may obtain salvation (Acts 2:47).”

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Par : Matt Moury https://parlafoi.fr/2020/06/18/hors-de-leglise-point-de-salut-lanalyse-de-jean-calvin/#comment-8801 Tue, 23 Jun 2020 12:01:29 +0000 http://parlafoi.fr/?p=17134#comment-8801 Merci d’avoir pris le temps d’écrire cette réponse aussi détaillée et argumentée.

1. Très intéressant ! J’ai l’impression que la gêne envers l’ “allégorie” que constitue le passage nous empêche parfois de creuser l’idée derrière le passage et de filer la métaphore. Je sais que Jacques Buchhold a donné un cours à la FLTE sur ce passage controversé mais malheureusement je n’y ai pas assisté. Merci ça donne envie de creuser ! 

2. Excellente proposition. Je souscris totalement et j’applaudis des deux mains ! J’aimerais vraiment lire plus sur ce sujet pour aller plus loin. Effectivement pas simple de maintenir un équilibre face aux excès des Catholiques romains d’un côté et des évangéliques de l’autre. D’un point de vue général, je suis surpris du manque de mention et de réflexions sur la conception virginale dans les milieux évangéliques. En 10 ans de vie chrétienne, le seul sermon que j’ai entendu sur la question était … le mien, il y a trois ans pour un dimanche de l’Avent. A l’époque, je m’étais servi de cet ouvrage de grande qualité : https://www.amazon.com/Virgin-Birth-Christ-Richard-Shenk/dp/1842279084  Mis à part cela, je n’ai jamais fait d’étude biblique sur la question et le sujet a été survolé très vite dans mes cours de fac. Je pense que cet état de fait est dû au fait que a) cela “fait Catholique” (pourtant c’est aussi biblique et un aspect important du Crédo) b) beaucoup d’assemblées ne font pas l’année liturgique et négligent donc les récits de la Nativité c) l’aspect surnaturel et incongru peut gêner certains notamment dans la perspective de l’évangélisation d)  on ne sait pas trop quoi faire cet événement, on ne comprend pas le sens profond que tu analyses très bien … J’en conclus qu’il faut analyser plus à ce thème notamment en lien avec notre Ecclésiologie comme tu le soulignes bien. 

3. Spot on! Effectivement, tu pointes parfaitement le danger du spiritualisme anti-ecclésial, ce “péché évangélique”. Tu as raison, les Réformateurs avaient une toute autre conception, ils seraient horrifiés par de telles attitudes. Pour lutter contre ce phénomène (très postmoderne pour le coup) de relation directe avec le Seigneur de l’alliance et d’une conception de l’Église comme un supermarché spirituel, j’espère qu’il y aura un renouveau des travaux ecclésiologiques qui débouchera sur un enseignement valorisant sur la question au sein même des Églises. Pour ma part, à mon faible niveau et dans un contexte baptiste, outre un enseignement qui valorise la nécessité de l’Église, j’insiste avec mes collègues sur la notion de membriété avec l’idée d’alliance, de redevabilité et de discipline mutuelle. C’est un travail exigeant mais porteur et fécond, Dieu merci … Ah, tiens le vilain Schleiermacher. En parlant du père du libéralisme, il y a quelques semaines, j’ai justement participé à une session du European Leadership Forum en ligne consacrée à Schleiermacher. En une heure, le théologien Michael Reeves a brossé un portrait théologique du bonhomme, j’ai été frappé par les parallèles entre les enseignements de Schleiermacher et certaines tendances de fond du mouvement évangélique. Disons que le romantisme est souvent le premier pas vers le libéralisme … 

4. 100% d’accord avec toi sur la dimension sacramentelle de la louange et de la louange comme LE moyen de grâce évangélique contemporain.  A nouveau, je crois qu’il faut lutter contre cette tendance de fond en remettant la prédication de la Parole au centre du culte et en débusquant les faux raisonnements. Il y a du boulot, la vague de fond est forte mais l’enjeu est important.

Encore merci Pierre-Sovann pour tes articles et tes réponses, c’est génial pour de pouvoir échanger avec un théologien comme toi !

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Par : Pierre-Sovann Chauny https://parlafoi.fr/2020/06/18/hors-de-leglise-point-de-salut-lanalyse-de-jean-calvin/#comment-8794 Mon, 22 Jun 2020 14:45:16 +0000 http://parlafoi.fr/?p=17134#comment-8794 Bonsoir Matt,
1. Le texte le plus important est Galates 4.26 qui dit que la Jérusalem céleste est notre mère. C’est là que vient se greffer au niveau de l’intertextualité Esaïe 54, car l’allégorie des deux femmes est sans doute construite en partie à travers la lentille interprétative de ce passage du prophète.
2. Dans le dialogue avec l’Église romaine, il s’agit de montrer que l’Église, loin d’être co-rédemptrice (comme ne l’est pas non plus la Vierge), est dans un rôle passif de matrice qui reçoit miraculeusement en elle une vie qui est donnée d’en haut. Le thème de la conception virginale revient à l’exclusion de l’homme, du mari (cf. Jn 1.13 “non de la volonté de l’homme (ἀνδρὸς)”), donc de Joseph dans la création de l’humanité de Jésus. Ce thème de la conception virginale devient alors le symbole même de la grâce, parce qu’elle permet de montrer que tout vient de Dieu et que ce n’est pas l’homme qui agit dans cette histoire. Marie symbolise la réceptivité, i.e. la foi. Tandis que l’exclusion de Joseph symbolise l’exclusion des œuvres. Le sens fondamental du signe de la conception virginale est l’exclusion de l’homme dans le salut. C’est un débat intéressant à avoir avec les catholiques romains, qui ont tendance à voir dans Marie le symbole de la coopération de l’être humain avec Dieu. Mais c’est exactement l’inverse : il faut voir au contraire que l’homme est exclu, puisque Jésus n’est pas le fruit de l’’œuvre de Joseph, et que Marie ne symbolise pas la contribution de l’homme mais symbolise au contraire la réceptivité, la foi. Et c’est pareil pour le thème de l’Église comme mère : l’Église est une vierge qui est fécondée d’en-haut, miraculeusement – elle n’est pour rien dans le miracle qu’elle constate et qu’elle expérimente que des enfants lui sont données.
En même temps qu’on dit cela face aux catholiques romains, il faut aussi souligner face aux évangéliques, que l’Église comme mère subvient à des besoins réels, et que pour cette raison elle est indispensable au salut – en tant qu’instrument choisi par Dieu, parce que grâce lui a été faite d’être l’instrument de la grâce.
Il faut réussir à dire l’un et l’autre, et la chose n’est pas aisée : une réceptivité active de l’Église, qui agit pour faire prospérer la foi, mais dont l’action n’est pas une coopération méritoire…
3. Oui, il y a une aspiration qu’on pense protestante, mais qui est en réalité évangélique (i.e. issu de la spiritualité des Réveils), qui vise à une relation directe avec le Seigneur de l’alliance, et qui conçoit l’Église seulement comme le rassemblement de ceux qui sont déjà en relations avec le Seigneur. C’est la fameuse formule de Schleiermacher pour distinguer l’ecclésiologie protestante de l’ecclésiologie catholique. Mais en fait, Schleiermacher ne distingue que le protestantisme “volontariste” qui fait de l’Église une réalité principalement associative. L’ecclésiologie protestante classique, celle des Réformateurs, est beaucoup plus “haute”, et même si l’expression “mère des croyants” se trouve rarement chez les scolastiques protestants après Calvin, l’idée de l’indispensabilité de l’Église est elle prégnante. Ils n’auraient certainement pas aimé la chanson de Depeche Mode…
4. La louange est devenu dans nos Églises le moyen de grâce principal (avant même la prédication) : c’est le moment où Dieu se rend présent. La louange joue un rôle sacramentel ! D’ailleurs, on peut aujourd’hui faire un culte sans sainte-cène, et même sans prédication – mais y a-t-il des cultes sans louange ? Cela ne montre-t-il pas que cela est devenu, pour beaucoup, l’essence même du culte ?

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Par : L’Église chez Calvin : Église visible et Église invisible – Par la foi https://parlafoi.fr/2020/06/18/hors-de-leglise-point-de-salut-lanalyse-de-jean-calvin/#comment-8785 Mon, 22 Jun 2020 06:15:12 +0000 http://parlafoi.fr/?p=17134#comment-8785 […] nous sommes demandés à la fin de l’article précédent – dans lequel nous avions vu comment Calvin présentait l’Eglise comme remède à nos […]

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Par : Matt Moury https://parlafoi.fr/2020/06/18/hors-de-leglise-point-de-salut-lanalyse-de-jean-calvin/#comment-8782 Sat, 20 Jun 2020 12:54:49 +0000 http://parlafoi.fr/?p=17134#comment-8782 Cher Pierre-Sovann,
Merci d’avoir pris le temps de me répondre et pour tes recherches. Effectivement, j’avoue que cette gêne vient sans doute du rapport compliqué entretenu avec l’ECR … L’image mérite d’être creusée car elle a plus d’échos que je ne pensais dans l’Écriture. C’est vrai qu’à la réflexion, dans un sens typologique, on peut parler, sous un certain rapport d’une sorte d’ « enfantement » des croyants par l’Église, en tout cas le texte d’Apocalypse 12 cité dans l’article que tu mets en avant semble autoriser à percevoir l’Église comme celle par qui, à travers les membres qui portent la Parole au nom du Christ, met au monde les croyants par la puissance de l’Esprit. Pour ce qui est des autres textes, outre Eph 5 et Ap 12, on pourrait peut-être penser à la femme stérile d’Esaïe 54 et aux échos avec Anne, Sarah et Eve ? Le thème de la stérilité/fécondité dans le cadre rédempteur (et de la semence) est en tout cas attesté. Et effectivement tu me stimules en parlant du rôle de l’Église à rapprocher de la Vierge Marie. Peut-être est-ce une piste à explorer dans le dialogue avec l’ECR ? Et aussi dans notre redéfinition de l’Église d’un point de vue protestant ? Un champ à creuser visiblement puisque l’image a été peu reprise selon tes amis bien informés.
D’une manière générale, je me rends compte que ton article et ta réponse me font encore plus réaliser que la théologie protestante a du mal avec la notion de médiation (à cause des abus de l’ECR encore une fois). J’avais lu quelques trucs dessus de la plume de Colin Gunton, qui était assez critique en son temps sur cette allergie toute protestante. En gros, j’ai l’impression que les réactions anti-Église lors de la crise du Covid viennent de là, les croyants veulent un accès direct à Dieu sans devoir « passer par l’Église ». Pour être méchant, je dirais que cette attitude reprend les paroles de la fameuse chanson « My own personal Jesus » d’un groupe des années 80 … Pourtant, il semble bien exister une certaine forme de médiation de l’Église, nous ne sommes pas un amas d’individualités connectées individuellement à Christ, mais simultanément unis en Christ (le fameux « en Christ » de Paul) comme un peuple constitué.
Cela me rappelle qu’Alain Nisus disait que la « louange » était perçue comme ayant une vertu de médiation de la présence de Dieu dans les milieux charismatiques (et je dirais même non charismatiques de nos jours).
Merci encore pour la stimulation que m’apporte tes articles !

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Par : Pierre-Sovann Chauny https://parlafoi.fr/2020/06/18/hors-de-leglise-point-de-salut-lanalyse-de-jean-calvin/#comment-8778 Thu, 18 Jun 2020 20:58:22 +0000 http://parlafoi.fr/?p=17134#comment-8778 Bonsoir Matt,
Merci pour ton commentaire bienveillant et tes remarques dans ce contexte pandémique exceptionnel qui révèle aussi certaines tendances de fond de nos assemblées évangéliques.
Pour l’expression “mère des croyants”, il faut comprendre qu’une “nourrice”, c’est un peu une mère de substitution au plan fonctionnel – donc remplacer “mère” par “nourrice” n’apporte pas grand-chose sur le fond, même si cela à l’avantage d’enlever quelque chose de la gêne que nous pouvons ressentir en trouvant l’expression chez Calvin. Cette gêne, justement, d’où vient-elle ? Probablement de ce que la métaphore a été usée, jusqu’à la corde, par la théologie catholique romaine. La conséquence en est, par un anti-catholicisme parfois un peu primaire, un rejet, ou du moins une mise sous le boisseau de l’image.
Concernant l’emploi après Calvin de cette image, tu me poses une colle ! J’ai cherché un peu ce soir, et je n’ai pas trouvé quoi que ce soit chez les grands auteurs protestants des siècles passés. J’ai demandé à des amis érudits ce qu’il en était, je te dirais s’ils ont connaissance d’un ré-emploi ultérieur de l’image. Il est possible que la métaphore ait été négligée notamment à cause de l’usage qu’en faisait les apologistes catholiques romains.
Je suis tombé sur cet article que j’ai trouvé stimulant, qui plaide pour un approfondissement des métaphores ecclésiales de la mère et de l’épouse. Il ne s’agit pas, selon son auteur, de métaphores “mineures” (même s’il ne note que trois textes bibliques qui peuvent lui servir de fondement) et elles doivent reprendre leur place dans le contexte ecclésiologique actuel :
https://www.sbts.edu/family/2012/10/01/the-church-as-bride-and-mother-two-neglected-theological-metaphors/
Concernant la métaphore elle-même, je trouve moi aussi que l’image vaut la peine d’être approfondie. Celui qui vient à la foi est au bénéfice d’un miracle qui, après tout, n’est pas sans analogie avec le miracle de la conception virginale : l’Église dans le rôle de la Vierge, celui qui va venir à la foi dans le rôle de l’enfant à naître, et le Saint-Esprit… dans son propre rôle ! De même qu’il est miraculeux que l’enfant Jésus ait été conçu par la Vierge Marie sous l’action du Saint-Esprit pour être porté par elle, de même il est miraculeux qu’une personne vienne à la foi dans l’Église à laquelle il a été confié d’annoncer l’Évangile jusqu’aux extrémités de la terre, avec la puissance du Saint-Esprit.

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Par : Matt Moury https://parlafoi.fr/2020/06/18/hors-de-leglise-point-de-salut-lanalyse-de-jean-calvin/#comment-8777 Thu, 18 Jun 2020 17:11:48 +0000 http://parlafoi.fr/?p=17134#comment-8777 Article très intéressant qui risque de faire grincer quelques dents dans le camp évangélique … Mais nous souffrons aujourd’hui d’un manque cruel de réflexion sur l’être de l’Eglise d’un côté et d’une relativisation de l’importance de l’Église de l’autre (à ce titre la crise du Covid-19 a mis à jour la tentation évangélique du tout virtuel, on a notamment vu fleurir sur les réseaux sociaux ou dans le « parler populaire » évangélique une sorte de discours de dévalorisation de l’Église). Du coup, si cet article nous choque, nous bouscule, il le fait pour notre bien, pour notre stimuler … En tout cas ce fut le cas sur moi ! Il est grand temps de balayer sous notre porte et de remettre l’Église au premier plan (je précise que je suis d’obédience baptiste) !

Pour ce qui est de la formule « l’Église, mère des croyants », j’avoue qu’elle me gêne aux entournures … Je préférerais dire que l’Église est la nourrice des croyants, ce qui met en avant le côté d’aide dans la faiblesse sans l’idée de génération. Je dirais avec joie que l’Église est la nourrice dont Dieu se sert pour nourrir ses enfants.

Ça me fait penser que si nos amis catholiques romains et les orthodoxes ont exploité le côté maternel avec la dévotion mariale (souvent qualifiée, abusivement pour le protestant que je suis, de mère des croyants), les protestants semblent avoir déserté ce terrain … Peut-être que ça serait moins le cas si Calvin avait été plus repris ? Est-ce que la tradition réformée a développé cette idée, ce vocable ? Il me semble que non, mais je m’interroge. Je serai preneur si des textes existent en ce sens, afin de parfaire ma connaissance du sujet et de poursuivre la réflexion.

Hâte de lire la suite en tout cas, bel art du teasing ! Merci Pierre-Sovann !

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