Bonnes notes, école à la maison et révolution de l'éducation.
2 juillet 2018

J’ai pour objectif d’apprendre l’arabe depuis 2-3 ans. J’ai pris une première année de cours d’arabe dans la mosquée de ma ville puis cette année j’ai pris six mois de cours d’arabe dans mon université. 

2 attitudes opposées

Comme vous le savez peut-être, j’étudie la médecine. Les cours d’arabe ne font donc pas partie de mon cursus. Cela signifie que ces cours n’avaient aucun lien avec ma potentielle validation de cette deuxième année de médecine. J’étais en cours purement pour apprendre.

Mais j’étais le seul dans ce cas dans ma classe. Nous étions une vingtaine en cours d’arabe et tous les autres étaient là car leurs études incluent une langue étrangère. Cette situation particulière m’a permis d’apprendre des choses sur l’éducation que je n’avais jamais réalisé.

J’avais déjà entendu parlé de l’idée de ne plus donner de notes aux élèves, afin de leur apprendre à se préparer pour leur vie future et non pour un test standardisé. Mais c’est durant ce semestre d’arabe que j’ai compris l’effet pervers des notes.

J’étais donc en cours pour apprendre l’arabe. Cela signifie que si la professeur voulait nous en apprendre plus, rajouter du contenu, etc. j’étais content, je voulais en savoir plus : j’étais là pour ça ! Par contre, puisque les autres étaient là par obligation et qu’ils cherchaient simplement à avoir une bonne note, cela les arrangeaient si la prof en disait moins : cela signifiait qu’il y en aurait moins à apprendre. C’est à ce moment que j’ai réalisé que ce que l’on pensait être une carotte pour motiver les élèves à apprendre fonctionne en fait comme une barrière à l’apprentissage. Paradoxalement, ces personnes ont eu une moins bonne note. Cela n’est qu’un détail qui révèle l’attitude radicalement différente que l’on a si on est en cours pour apprendre ou si l’on a la note en tête.

Cette attitude est classique et je l’ai moi-même eu plus d’une fois. Même cette année : quel soulagement quand on nous apprend qu’un cours de médecine est annulé ! Non pas que nous n’ayons pas soif d’apprendre ou que la médecine nous ennuie, mais que cela diminue la liste déjà longue des cours qui tomberont à l’examen final. 

Avoir une bonne note : être intelligent ?

Plus d’une fois au cours de la scolarité, les élèves se retrouvent à jouer leur avenir en quelques heures d’examen. Cette pression et cet objectif de la bonne note poussent à travailler d’une façon totalement différente de celui qui a pour but uniquement d’apprendre. On peut devenir très doué, comme je l’ai été, pour avoir des bonnes notes. On peut développer des stratégies d’étude qui nous permettent vraiment de réussir aux examens. Mais cela ne veut pas dire que l’on est doué pour apprendre. Une bonne note, c’est gratifiant et souvent les gens pensent que cela fait de nous quelqu’un d’intelligent, sans comprendre que l’intelligence prend des formes bien diverses et que le type particulier d’intelligence qui permet de réussir aux examens n’en est qu’un parmi tant d’autres. Et, je suggère d’ailleurs que c’est un type d’intelligence très peu utile dans la vie quotidienne ou professionnelle.

Un sytème dépassé

Notre méthode d’éducation est complètement en décalage avec notre société et ce que nous savons maintenant sur les processus d’apprentissage. Ce sytème a été créé à l’époque de la révolution industrielle où il fallait préparer des hommes à effectuer des taches standardisées et répétées, sans erreur, dans les usines. C’est ce à quoi nous préparent encore les examens. Mais le monde professionnel d’aujourd’hui n’est plus basé sur cette vision « mécanistique » du travail. Toutes les autres formes d’intelligence et la créativité sont étouffées dans ce système, tout en étant valorisées et indispensables dans le monde du travail.

Dieu, source de toute vérité

Supprimer les test standardisés et révolutionner le sytème éducatif, ça ne se fera pas du jour au lendemain ni sans se heurter à de puissants lobbys. Mais c’est un sujet auquel les chrétiens devraient être sensibles. Comme le dit Saint Augustin, toute vérité vient de Dieu. Toute vérité est vérité de Dieu. C’est lui le Créateur et la source de toute vérité. Réaliser cela est ce qui a poussé dans l’histoire des millions de chrétiens à chercher à en apprendre plus sur notre monde, à développer les sciences mais aussi les arts puisque toute beauté vient de Dieu et que la beauté n’est que la vérité perçue par les sens. Je crois que c’est par l’Eglise qu’il y aura, s’il y en a une, une révolution de l’éducation comme cela a été le cas plus d’une fois dans l’Histoire.

En attendant, et mes proches savent que j’en suis fan, le seul système qui me paraît pouvoir appliquer dès aujourd’hui cette révolution, c’est l’école à la maison.

Une alternative dès aujourd’hui : l’école à la maison

Et ici, il ne faut pas se tromper. Comme me le disait récemment une amie, il y a une différence entre école à la maison et école dans la maison. Il est courant de faire l’école dans la maison en se contentant de mimer l’école et de la faire rentrer dans la maison. Il s’agit en fait d’une école classique avec moins d’élèves et des parents comme profs. Mais la véritable école à la maison est une philosophie de vie qui considère que tout est occasion d’apprendre. Il s’agit de ne pas segmenter sa vie avec d’un côté la vie à la maison, de l’autre le moment d’apprentissage et encore ailleurs le moment avec Dieu. Il s’agit de faire de chaque occasion un lieu d’apprentissage en face de Dieu et avec lui. Il s’agit aussi de profiter des meilleures ressources et des dernières découvertes en matière d’éducation ainsi que des méthodes les plus performantes d’apprentissage. J’ai pu tester quelques-unes de ces méthodes en première année de médecine et cela a plutôt bien marché.

En dehors de cette expérience personnelle, je suis bien-sûr inexpérimenté sur le sujet. J’ai suivi une scolarité classique, en connaissant le privé et le public. Je n’ai que 20 ans et suis sans enfants. Je cherche simplement à réfléchir dès maintenant à ce qu’est l’apprentissage car j’apprends moi-même au quotidien soit en médecine, soit en théologie, soit en arabe et je cherche à être le plus efficace.

Il est possible que j’aborde encore à l’avenir ce sujet en « cassant » certains mythes sur l’école à la maison ou en apportant des éléments positifs sur les méthodes d’apprentissage, puisque cela peut-être très utile à la fois à celui qui étudie la théologie et au parent qui veut proposer la meilleure éducation à son (ses) enfant(s).

Maxime Georgel

Maxime est interne en médecine générale à Lille. Fondateur du site Parlafoi.fr, il se passionne pour la théologie systématique, l'histoire du dogme et la philosophie réaliste. Il affirme être marié à la meilleure épouse du monde. Ils vivent ensemble sur Lille avec leurs trois enfants, sont membres de l'Église de la Trinité (trinitelille.fr) et sont moniteurs de la méthode Billings.

9 Commentaires

  1. Olivier Rossi

    Je vous conseille de lire Illich, un anarchiste chrétien qui a remis en cause le système d’éducation, de santé et les transports.
    L’école de Ferry avait pour but de fabriquer des bons petits soldats pour récupérer l’Alsace-Lorraine et des bons petits ouvriers. C’est ce que ne comprends pas nos actuels républicains déplorant la disparition de la vieille école. Elle n’a plus son utilité. L’école est là que pour formater les esprits, surtout en France, où l’Etat a le monopole du programme. Charles Gave expliquait que les chefs d’entreprises aimaient embaucher des personnes qui ont fait des longues et très bonnes études, car elles ont passé leur temps à répéter ce qu’il fallait pour réussir, donc manipulables.
    Comme vous avez dit, sans l’envie d’apprendre, l’élève n’apprend pas, s’il n’aime pas, il ne sert à rien de le forcer, il faut changer la méthode pour faire aimer la matière. Personnellement, j’ai été un élève médiocre (et un des plus cultivé de ma classe), je pouvais être très bon ou très mauvais, selon le prof, la matière, le chapitre… J’ai surtout appris hors dehors de l’école, je n’ai pas du tout aimé l’école.
    Enfin Illich explique que la langue maternelle a été apprise non à l’école, mais naturellement. On peut apprendre 10 ans l’anglais sans faire une phrase. L’étude de langue en France est trop abstraite (on apprend des listes de mots qu’on utilisera jamais), on l’apprend comme une langue morte avec une grammaire à apprendre par coeur, or on a parlé sans connaître la grammaire française. On apprend pas une langue étrangère pour parler facilement, mais des grands textes littéraires…
    Nos mathématiques sont trop abstraites, on ne voit pas d’application dans la vie quotidienne, cela peut être un handicape pour ceux qui ont un esprit pratique. Il faut réserver les mathématiques abstraites aux bons élèves. Ma soeur voyait les maths comme un jeu, moi comme une contrainte inutile.
    Et puis on sanctionne la faute, alors que la faute sert à progresser. A la fac, une enseignante nous enlever des points en cas de fautes d’orthographes, mais nous remettait si on les corrigeait. C’est une méthode intelligente.
    Personnellement, je comprenais à peu près tout, mais je faisais pas mal de fautes d’étourderie, du coup, alors que j’avais compris, j’avais des mauvaises notes. Il aurait suffit de me redonner des points là où je pouvais corriger pour avoir un meilleur niveau. J’avais que des mauvaises notes en dictée, sauf si elles étaient dures et que la note ne comptait pas. Rien que l’idée d’avoir une dictée me faisait perdre tous mes moyens, alors quand je faisais des exercices de grammaire, j’étais très bon.
    J’ai été élevé chez les jésuites, où j’ai reçu une très bonne instruction, ce pendant si j’ai des enfants je pense les mettre dans une école montosri ou frainet.

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    • Maxime Georgel

      Oui beaucoup de bonnes remarques. Je suis loin d’être anarchiste mais ce bonhommme semble dire de bonnes choses.

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  2. Elodie KONING

    Merci pour cet article ! Elevée classiquement suivant la scolarité française puis devenue prof des écoles je fais pourtant l’école à la maison à nos 3 enfants depuis leur naissance, suivant cet état d’esprit : « tous les moments que nous vivons sont spirituels » et « tous les moments de vie sont des moments d’apprentissage ».
    Le mot « anarchiste » est à approfondir selon Ellul et en effet Illich a des idées pleines de bon sens et était prêtre.
    Holt a aussi une pratique de l’école à la maison qui vont dans ton sens.
    Bonne réflexions et bon apprentissage de l’arabe !!!

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  3. Garnier

    Les écoles chrétiennes s’ouvrent de plus en plus en France …. « L’Eglise n’a jamais fleuri sans écoles » J.Calvin

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    • Maxime Georgel

      Exactement, l’éducation est une des missions de l’Eglise ! En fait, c’était le premier sujet traité par la discipline ecclésiastique des églises réformées.

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  4. MishiMisha

    Et en plus il promeut l’école à la maison… mais ce blog est génial !
    Pour rester sérieux je te rejoins complètement dans ta critique sur la manière conventionnelle d’apprendre et je rajouterai pour ma part que l’IEF (Instruction En Famille) est autant pertinente pour la forme que pour le fond ! Quand on voit le parti pris du programme sur divers sujets qu’ils soient politiques ou religieux… Et un programme généralisé (tel qu’il est appliqué aujourd’hui) ne permet pas la liberté éssentielle sur la matière à apprendre alors qu’on a tous des sensibilités et goûts différents.

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    • Maxime N. Georgel

      Pensez à faire connaître le blog en partageant nos articles sur les réseaux, dans des discussions privées, en en parlant, etc. C’est la seule manière pour nous de grandir 🙂

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      • MishiMisha

        C’est fait régulièrement. 😉

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