Dans la tradition réformée, lorsque nous regardons à la Croix, nous tendons à y voir surtout l’expiation substitutive. La Croix, c’est là où Jésus prit sur lui la punition que méritait notre péché, c’est là où il a payé notre rançon avec son propre sang. Ce que l’on oublie souvent, c’est que la Croix est aussi un exemple.
En Matthieu 16:24, Jésus énonce le comportement requis du disciple : « Alors Jésus dit à ses disciples : Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive. » Au moment de ces paroles, la Croix n’avait pas encore la signification particulière chrétienne qu’elle prit lors de la Pâque ; ce n’était encore qu’une exécution horrible, dégradante et perverse.
Alors Jésus dit à ses disciples : Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive
C’est après la crucifixion que la Croix devient le symbole du sacrifice christique, ainsi que le modèle de la vie chrétienne : une vie d’abnégation, une vie de souffrance volontaire pour la gloire de Dieu et pour sa bonne nouvelle, l’Évangile. Le christianisme occidental a perdu de vue cette dimension, en particulier après les périodes difficiles de la Réforme et des guerres de religion. Les changements de paradigme que furent les Réveils, firent d’« être sauvé » la somme, ainsi que la finalité du Christianisme. L’autre aspect de la Croix, celui d’un exemple, fut mis à l’ombre de la propitiation du péché.
Pourtant, pendant la majeure partie de l’histoire, la Croix représentait le summum du service chrétien, de la vie et de la sanctification, appelant les fidèles à modeler leur vie à cette Croix, quelles que soient les circonstances (Mt 10:381 ; Lc 14:272 ; Ph 2:5-83 ; 1P 2:214 ; 1 Jn 2:65).
Et quiconque ne porte pas sa croix, et ne me suit pas, ne peut être mon disciple
Jésus mentionne l’abnégation de soi. Le déni de soi est un exercice qui s’étend la vie durant ; il étaye notre sanctification et se constitue de deux éléments qui concernent le « renouvellement de l’intelligence » (Rm 12:26).
Premièrement, il s’agit d’une compréhension profonde du plan rédempteur de Dieu. Cette compréhension doit mener à l’acceptation paisible de notre place dans ce plan. C’est une attitude qui se construit par l’étude et la méditation des Écritures.
Deuxièmement, il est question d’une ferme confiance en l’amour à la fois paternel et allianciel du Seigneur pour son peuple. Cette confiance est intimement vécue, dans le sens que Dieu imprime sa Parole dans nos âmes. La Croix du chrétien prend diverses formes, mais ce qui est sûr, c’est que cette confiance en l’amour de Dieu, ainsi qu’en son plan qui est bon (Rm 8:287), est de toutes choses la première à être assaillie.
C’est pour cela que Paul prie que « vous puissiez comprendre avec tous les saints quelle est la largeur, la longueur, la profondeur et la hauteur, et connaître l’amour de Christ, qui surpasse toute connaissance, en sorte que vous soyez remplis jusqu’à toute la plénitude de Dieu » (Ép 3:18-19). Assurément, nous ne pouvons prendre notre croix et nous oublier que lorsque nous sommes « remplis jusqu’à toute la plénitude de Dieu ».
- « celui qui ne prend pas sa croix, et ne me suit pas, n’est pas digne de moi. »[↩]
- « Et quiconque ne porte pas sa croix, et ne me suit pas, ne peut être mon disciple. »[↩]
- « Ayez en vous les sentiments qui étaient en Jésus-Christ, lequel, existant en forme de Dieu, n’a point regardé comme une proie à arracher d’être égal avec Dieu, mais s’est dépouillé lui-même, en prenant une forme de serviteur, en devenant semblable aux hommes; et ayant paru comme un simple homme, il s’est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu’à la mort, même jusqu’à la mort de la croix. »[↩]
- « Et c’est à cela que vous avez été appelés, parce que Christ aussi a souffert pour vous, vous laissant un exemple, afin que vous suiviez ses traces. »[↩]
- « Celui qui dit qu’il demeure en lui doit marcher aussi comme il a marché lui-même. »[↩]
- « Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. »[↩]
- « Nous savons, du reste, que toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son dessein. »[↩]
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