La question de la division de la loi de Moïse est un sujet controversé depuis quelques années. Cet extrait de Clément d’Alexandrie peut contribuer au débat historique puisque Clément y distingue les lois cérémonielles de la « partie légale proprement dite » :
La philosophie de Moïse se divise en quatre parties : la partie historique; la partie légale proprement dite, toutes les deux du ressort de la morale; la troisième, relative aux cérémonies religieuses et appartenant à la contemplation de la nature; et enfin la quatrième, la partie théologique, celle qui concerne l’explication des saints mystères.
On peut constater, dans cet extrait, que Clément d’Alexandrie considérait les lois civiles (« légales proprement dites ») comme une composante de la loi morale. En outre, cet auteur ne considère vraisemblablement pas la « partie historique » et la « partie théologique » comme des composantes de la législation mosaïque. Il reste donc deux ensembles législatifs : la loi morale et la loi cérémonielle = division *bipartite* de la loi.
Jonathan Bayes, Philip Ross et Guillaume Bourin prétendent que Justin de Naplouse, Irénée de Lyon, Origène d’Alexandrie et Tertullien de Carthage adhéraient à la division *tripartite* de la loi, mais je viens d’aller vérifier les sources primaires correspondantes à chacun de ces personnages, et pas un seul d’entre eux n’y prône ni même n’y postule ce tripartisme ; bien au contraire : ils sont tous bipartistes !
Le seul acteur tripartiste de l’Antiquité que j’ai identifié dans mes recherches est… [battements de tambours] …Ptolémée le Gnostique (†c.165), un des trois hérésiarques dualistes combattus par Irénée dans son chef-d’œuvre d’apologétique patristique, « Contre les hérésies » (les deux autres étant Valentin le Gnostique (†c.161) et Marcus le Gnostique (†?)). Pour dire les choses sobrement, il s’agit d’une paternité en peu embarrassante pour les tenants du tripartisme.
Que la loi civile soit de nature morale ne sera contesté par pas grand monde. Les lois civiles sont une application à l’État d’une loi morale éternelle. Jusqu’alors, je n’ai rencontré personne niant ce point. Certainement pas ceux qui adoptent la division traditionnelle de la loi en trois partie. Il ne s’agit pas, en effet, en appelant une partie « loi morale » de dire que la loi civile n’est pas de type moral, mais que là où l’une est intemporelle dans son expression de la loi morale (et mérite donc ce titre de manière plus particulière), l’autre est une expression temporelle de la loi morale. Ainsi, on aura bien de la peine à utiliser ce texte (comme les autres) pour soutenir le bipartisme.