La Souffrance (2/3)
28 septembre 2020

Cette série est composée de trois parties :

1/3 Que sont les « afflictions » ?

2/3 La justification, la souffrance et l’espoir de la gloire

3/3 Nous nous glorifions même des afflictions


2/3 La justification, la souffrance et l’espoir de la gloire

Munis d’une compréhension de « la souffrance (θλίψις) » qui va au-delà de la persécution, dirigeons notre regard vers Romains 5:1-5 :

1Étant donc justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ, 2à qui nous devons d’avoir eu par la foi accès à cette grâce, dans laquelle nous demeurons fermes, et nous nous glorifions dans l’espérance de la gloire de Dieu. 3Bien plus, nous nous glorifions même des afflictions, sachant que l’affliction produit la persévérance, 4la persévérance la victoire dans l’épreuve, et cette victoire l’espérance. 5Or, l’espérance ne trompe point, parce que l’amour de Dieu est répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné.

Romains 5:1-5

Paul énonce en premier lieu que les chrétiens ont obtenu la justification par la foi en Christ (v. 1), et non par de bonnes œuvres ou de bonnes intentions, ni même à travers une obéissance de la Loi, ou quoi que ce soit d’autre. Il poursuit en soulignant trois conséquences de la justification :

A) Nous avons la paix avec Dieu (v. 1)

La première conséquence de la justification est que nous ne sommes plus en guerre avec Dieu. Nous ne sommes plus ses ennemis, et nous sommes devenus ses amis (Col 1:21-22). Nous ne sommes désormais plus des « enfants de la colère », soit l’état naturel dans lequel nous étions nés (Ép 2:3). Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ (Rm 8:1, 34).

Cette paix avec Dieu nous libère de son jugement final (Ap 20:12-15) ; de surcroît, cette paix change le but de nos tribulations : les chrétiens souffrent pour de nombreuses raisons, mais ce n’est jamais pour la condamnation ni le jugement . Bien plutôt, la souffrance peut être une discipline.

Quelle est la différence ? Le jugement est la colère de Dieu déversée sur ses ennemis ; cette colère détruit. La discipline est la grâce de Dieu déversée sur ses enfants ; elle construit.

Un endroit qui exprime cette notion avec clarté est Proverbes 3:11-12 :

Mon fils, ne méprise pas la correction de l’Éternel,

Et ne t’effraie point de ses châtiments ;

Car l’Éternel châtie celui qu’il aime,

Comme un père l’enfant qu’il chérit. (Cf. aussi Jb 5:17 ; Ps 94:12 ; Hé 12:5-6)

De ce fait, si nous avons la paix avec Dieu en étant justifiés par la foi en Jésus, alors la souffrance n’est pas un moyen de condamnation ou de jugement, mais bien plutôt un moyen d’édification et de sanctification. La souffrance n’a pas pour objet de nous briser, mais de nous construire, de nous édifier (du latin ædificare, bâtir [une maison]). Elle n’est pas voulue pour notre perte, mais pour notre gain. La souffrance n’existe pas pour nous appauvrir, mais pour nous enrichir.

Si cela est vrai, alors la souffrance ne peut jamais être sans raison. La souffrance est toujours éternellement pertinente (2 Co 4:17 ; Rm 8:18).

B) Nous demeurons dans la grâce (v. 2a)

Notre justification nous donne accès, par Christ, à la grâce dans laquelle nous demeurons (v. 2). À travers la foi en Jésus, nous sommes premièrement justifiés pour obtenir la paix avec Dieu (v. 1) ; puis, en conséquence, nous entrons dans un monde de Grâce – et non un monde de Loi (Rm 6 : 14), ni même un monde de tentatives pour mériter la faveur de Dieu.

Dieu a toujours été gracieux envers son peuple. Cependant, en Christ, la grâce est littéralement abondamment empilée sur nous (Jn 1:16-17). En raison des mérites de Christ, Dieu nous donne librement, amplement, avec amour et sans reproche (Jc 1:5) pour nous bénir, pour nous soutenir, pour pourvoir ce dont nous avons besoin, pour nous équiper pour le ministère (Ép 4:12 ; Hé 13:21), pour nous permettre d’accomplir sa volonté (Ph 2 : 12-13), pour nous préserver jusqu’à la fin (Ps 31:23 ; 97:10 ; Lc 22:31 ; Jn 5:24 ; 6:37-47 ; 10:27-30 ; Rm 8:28-39 ; Ép 1:13-14 ; Ph 1:6 ; Hé 7:25).

De ce fait, cette grâce dans laquelle nous demeurons (v. 2) est la base sur laquelle nous pouvons construire une nouvelle perspective concernant la souffrance. Si nous sommes plongés dans la grâce et la grâce seule, alors quelle que soit la souffrance qui nous afflige, nous savons qu’elle vient de la main aimante de Dieu et qu’elle met en lumière, amplifie et augmente cette même grâce envers nous.

En fait, nous pouvons dire que lorsque Paul écrit que nous demeurons dans la grâce, il fait référence à la sanctification1 :

La sanctification est cette œuvre de la libre grâce de Dieu par laquelle nous sommes renouvelés, dans tout notre être, à l’image de Dieu, et rendus de plus en plus capables de mourir au péché et de vivre à la justice.

Petit catéchisme de Westminster, q. 35

C) Nous nous glorifions dans l’espérance de la gloire de Dieu (v. 2b)

Demeurer dans la grâce est la base sur laquelle les chrétiens peuvent se réjouir « dans l’espérance de la gloire de Dieu ». Le verbe que la NEG1979 traduit par « glorifier » est καυχόμαι, ce qui veut dire « se vanter », « s’exalter », « se glorifier ». À mon humble avis, les deux dernières définitions semblent plus adéquates, car « se vanter » a une connotation négative, et « se réjouir » est quelque peu faible pour satisfaire au contexte.

Mais qu’a l’espérance à voir avec la gloire de Dieu ?

Quand nous rencontrons dans notre lecture la « gloire » de Dieu, nous devrions penser au terme vétérotestamentaire kabôd (כָּבֹד), la lourdeur et le poids de l’être et de la nature de Dieu. Cela comprend sa présence, son honneur et sa majesté (Dt 28:58 ; Ps 22:23 ; És 26:15 ; Éz 39:13). Mais vu que Paul parle de « l’espérance », il semble faire référence à la gloire future — la glorification — des croyants.

Nous mettons notre espérance dans des choses futures et promises. C’est ce que Paul a en tête ici ; souvenons-nous, il est encore en train de parler des effets de la justification sur ceux qui croient, et de la paix que nous avons avec Dieu, et de l’accès à la grâce dans laquelle nous demeurons en Christ.

Il saute alors dans le futur pour voir la gloire avec laquelle Dieu nous vêtira aux Cieux (Col 1:5 ; 1 Th 2:12). Cette gloire ne sera pas la nôtre, mais sera plutôt le reflet éternel de la gloire de Dieu (2 Co 3:18) en ceux qui sont son ouvrage (Ép 2:10 ; Ap 4:10).

Ce sera la gloire de Christ lui-même (Jn 17:22 ; Rm 8:17 ; 1 Jn 3:2), dévoilée lorsque notre vraie vie et nouvelle nature — qui sont pour lors cachées en Jésus — seront révélées dans une splendeur inimaginable au moment de son apparition (Col 3:4). Ce sera la gloire de Dieu, reflétée en l’Epouse du Fils, illuminée en la Nouvelle Jérusalem (Ap 21:9, 11, 23 ; És 60:1-2).

Avant de penser à la souffrance, nous devons donc être au clair quant à l’impact incommensurable que la justification a pour notre statut devant Dieu.

La justification ouvre la porte à notre sanctification, qui, elle, culminera en notre glorification, dans laquelle nous jouirons d’une communion éternelle, incassable, infiniment intime, bannissant toute larme, guérissant toute maladie, satisfaisant tout désir, avec le Père. Cette béatitude augmentera sans cesse ainsi que nous baignerons, mangerons, boirons, respirerons et reflèterons les dimensions infinies de sa gloire, résonant à travers l’éternité.

Permettez que j’appuie davantage sur ce point, car nous verrons plus tard que cette espérance est spécifiquement ce que la souffrance a pour but de produire en nous (Rm 5:4-5).

Le Psaume 16:11 dit que la présence de Dieu est la plénitude de joie : soit une joie qui satisfait entièrement, qui consume complètement et qui est inexprimable, tellement elle déborde de gloire (1 P 1:8) et ne manque d’absolument rien. Le Psaume 34:6 dit que ceux qui regardent à Dieu sont « rayonnant » — de l’hébreu nahar (נָהַר) qui veut dire « coulant », « ruisseau » —, ce qui fait écho au Psaume 36:9 et à Ésaïe 60:5 (et peut-être à 2 Co 3:18).

En somme, la gloire de Dieu est aussi la satisfaction de tous nos désirs et de tous nos besoins ; c’est ce que chaque humain cherche. C’est le sommet de notre bonheur et le but de notre existence. C’est pour cette raison que nous pouvons exalter en l’espérance de voir et de participer à la gloire de Dieu ; c’est la fin ultime de notre espérance et c’est l’unique chose que nous espérons.

C’est cette espérance-là qui nous attire, nous guide et nous conduit tout au long de notre vie chrétienne. La justification nous donne l’accès à la grâce ; cette grâce œuvre en nous une espérance que nous verrons, goûterons et participerons à la gloire de Dieu. C’est exactement ceci qui est tissé dans de petites phrases telles que « unis à [Christ] » (Rm 6 : 5) et « participants de la nature divine » (2 P 1 : 4).

C’est en raison de cette espérance que Paul peut écrire ainsi :

En effet, nos légères difficultés du moment présent produisent pour nous, au-delà de toute mesure, un poids éternel de gloire.

2 Co 4:17

J’estime que les souffrances du moment présent ne sont pas dignes d’être comparées à la gloire qui va être révélée pour nous.

Rm 8:18

Réjouissez-vous dans l’espérance et soyez patients dans la détresse. Persévérez dans la prière.

Rm 12 : 12

La souffrance est donc un moyen par lequel Dieu nous construit et nous guide vers l’espérance de la gloire future. Or, sans cette ferme espérance de la gloire future de Dieu, notre souffrance n’aura aucune valeur et nous serons sans moyen de la digérer à travers les promesses de l’Évangile.

Si nous ne désirons pas la gloire de Dieu, le fait que la souffrance ait pour but de nous y conduire n’a aucun sens.


  1. Éz 36:27 ; Ph 2:13 ; 2 Th 2:13[]

Josué Isaac

Sauvé, mari, père, historien et passionné de théologie.

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