Nous aimons mettre en lumière les trésors de l’histoire de l’Église. Quoi de plus lumineux que la période des fêtes pour vous faire découvrir le Festival des Neuf Leçons et Chants de Noël ? Cette célébration anglicane, conçue et organisée pour la première fois par Edward White Benson en 1880 réunit neuf leçons et chants de Noël qui retracent l’histoire du salut, de la chute de l’homme au mystère de l’Incarnation. Inauguré à la cathédrale de Truro en Angleterre, l’événement est reconduit tous les ans depuis lors.
L’histoire ne s’arrête pourtant pas là. À son retour de la grande guerre, l’aumônier du King’s College de Cambridge souhaita réchauffer les cœurs en calquant le culte de Noël traditionnel de l’école sur celui des fameuses leçons et chants de Benson. Dès la première année son succès fut immense, dix ans plus tard, il devenait un événement mondial lorsque la BBC commença à le diffuser sur ses programmes étrangers. Ce sont désormais des millions d’auditeurs qui écoutent ces leçons, composées de neuf lectures de la Bible entrecoupées de chants de Noël.
À travers une collaboration mêlant méditations des contributeurs et illustrations de Pauline Bargy, nous vous proposons de les découvrir, afin de méditer avec plus d’attention encore sur la naissance de notre sauveur, que ce soit pour votre édification personnelle (les raisons et les implications de la naissance du Messie font partie des sujets de méditation les plus glorieux pour le chrétien !), ou pour témoigner autour de vous de ce que nous devrions réellement célébrer à l’occasion de cette fête. Méditez, contemplez et surtout découvrez le vrai sens de Noël!
L’ange de l’Éternel appela une seconde fois Abraham des cieux, et dit : Je le jure par moi-même, parole de l’Éternel ! parce que tu as fais cela, et que tu n’as pas refusé ton fils, ton unique, je te bénirai et je multiplierai ta postérité, comme les étoiles du ciel et comme le sable qui est sur le bord de la mer ; et ta postérité possédera la porte de ses ennemis. Toutes les nations de la terre seront bénies en ta postérité, parce que tu as obéi à ma voix.
Genèse 22:15-18
Le couteau d’Abraham
Notre texte se trouve immanquablement à un moment clé du récit biblique. Dieu vient de demander à Abraham de sacrifier son fils, l’a délivré de la mort au dernier moment et confirme alors sa promesse. Mais ce n’est pas la première fois en Genèse qu’il est question d’un couteau.
Après l’appel initial d’Abraham (Genèse 12), Dieu confirme à trois occasions sa promesse (Genèse 15, 17 et 22). Dans ces trois épisodes, il est question d’un rite au couteau. En Genèse 17, Isaac est déjà confronté au couteau par la circoncision. Ces rites, appelés rites de mise à l’épreuve, sont à la fois le signe d’une consécration à Dieu et d’un jugement symbolique. Si Isaac ne respecte pas l’alliance, il sera retranché du peuple. Mais la tension que nous constations à la chute se retrouve ici aussi. Comment la descendance d’Abraham, souillée comme la descendance de la femme, pourrait-elle être consacrée à Dieu et garder son alliance ? Le jugement semble inévitable, le couteau de la consécration ne pourra que devenir celui du jugement. C’est ce qu’il semble sur le point de se produire en Genèse 22. La postérité d’Abraham ne peut échapper au jugement. Celui qui, parmi les fils d’Adam, voudra être consacré devra d’abord subir le jugement. Pourtant, mystérieusement, Dieu arrête la main du patriarche. Le jugement ne tombe pas et un substitut animal est apporté par l’Éternel.
Pour comprendre cela, nous devons nous souvenir de la nuit de terreur de Genèse 15, où un autre rite au couteau se produisit. Au cœur des ténèbres, Dieu passa au milieu des animaux coupés en deux. Dieu promettait ainsi que ce serait lui qui serait « coupé », qui subirait le jugement s’il ne tenait pas son alliance (Jér 34:18-20). En vivant cette nouvelle expérience au couteau en Genèse 22, Abraham a pu se souvenir du rite de Genèse 15 et comprendre ce que cela signifiait quand Dieu a retenu le couteau de sa main pour lui donner un bélier comme substitut. Quand l’heure des ténèbres viendrait, ces ténèbres de Genèse 15, alors le Seigneur lui-même serait maudit et connaîtrait le jugement de l’alliance. C’est le Seigneur qui connaîtra le « couteau » et qui sera le substitut pour les pécheurs. Oui, ce n’est pas sans raison que Jésus-Christ a dit « Abraham a vu mon jour et il s’est réjoui » (Jn 8:56). En contemplant le bouc de Morija et le rituel par lequel Dieu s’est maudit lui-même, les saints de l’Ancien Testament ont reconnu la grâce de Dieu et la façon dont Dieu lui-même passerait par les ténèbres et la malédiction afin qu’au travers du jugement puisse venir la bénédiction, afin qu’il y ait même une vie au-delà de la mort. C’est précisément ce que nous dit l’épître aux Hébreux (11:19) quand elle mentionne qu’il y a un symbole dans le sacrifice d’Isaac annonçant la résurrection. C’est dans ce contexte que Dieu renouvelle la promesse d’une descendance.
La postérité promise
Tout comme Dieu avait promis à nos premiers parents la venue d’une descendance dans le contexte d’une alliance brisée et d’un animal sacrifié pour couvrir leur nudité, Dieu renouvelle cette annonce en même temps qu’il manifeste le besoin pour les hommes, même les fils d’Abraham, d’un substitut qui connaitra le jugement de l’alliance. Cette promesse, toutefois, précise encore un peu plus l’attente du peuple de Dieu. La lumière brille déjà plus fort dans l’histoire des hommes.
Comme souvent dans les promesses faites aux patriarches, la promesse d’une descendance nombreuse est mêlée à celle d’un descendant spécifique. Le verset 17, en particulier, comporte un singulier lorsqu’il dit que cette descendance aura le contrôle de ses ennemis. Paul ne manque pas de relever ce jeu sur le nombre de la descendance en Genèse (Gal 3:16).
Dans ce même verset, tout en prolongeant la promesse d’une descendance victorieuse sur les ennemis du peuple de Dieu, que nous trouvions dès Genèse 3:15, le vocabulaire employé, littéralement « ta postérité possèdera la porte de ses ennemis » évoque la souveraineté d’un roi sur une ville. Cette dimension royale de la descendance, introduite ici, sera confirmée plus clairement avec David. Adam n’avait pas su repousser l’ennemi du jardin, lieu de la présence divine parmi les hommes. Il avait perdu sa position de régent sur la création. Le descendant promis sera un roi victorieux, protecteur du peuple de Dieu au milieu duquel il a fait sa demeure.
Les extrémités de la terre
Quel sera l’étendue de ce règne ? Les promesses faites à Abraham ne laissent planer aucun doute à ce sujet. Le roi qui doit venir n’est pas simplement le roi d’Israël. Toutes les familles de la terre seront bénies en lui. Lorsqu’avant son départ de cette terre, Jésus laissa pour mission à ses apôtres de faire des nations ses disciples, il n’agit pas comme un innovateur mais comme le fils promis d’Abraham.
Cette attente parcourt tout l’Ancien Testament (Ps 2:8, 9:12, 22:28, 57:10, 65:6, 67:3-8, 82:8, 96:7, 98:3, 117:1 ; És 11:10, 12:4-5, 42:1-6, 10-12, 49:6 ; Am 9:12 ; So 3:9 ; Za 2:15 ; Ml 1:11) qui nous livre un des titres glorieux du Messie : la Lumière des nations (És 49:6). Plus qu’une espérance, cette attente est pour nous une certitude, garantie par la promesse qu’un jour tous les peuples louerons l’Agneau sacrifié (Ap 5:9). Comment ne pas penser à ces mages, venus de nations lointaines pour apporter au Messie leur adoration ? De sa naissance à son ascension, le ministère du Christ est ainsi orienté vers cette espérance universelle.
Que l’on soit soumis ou non à ce Roi, on ne peut nier aujourd’hui qu’il existe bien un fils d’Abraham dont le nom est révéré par toute la terre et dans lequel se dit bénie une foule de familles de tous les peuples.
Qu’est-ce que Noël ?
En songeant à cet enfant emmailloté, nous avons peut-être à l’esprit la naissance d’un modèle de vertu, d’un grand prophète ou d’un rabbin influent. Mais dans la grande histoire, celle qui donne son sens à toute l’histoire des hommes, cet enfant est l’Agneau qui ôte le péché du monde, le Roi victorieux qui écrase le serpent, la Lumière des nations qui rayonne jusqu’aux îles lointaines. Oui, c’est bien l’Évangile qui a été annoncé à ces saints de l’Ancienne Alliance (Hé 4:2). Dans la promesse faite à Abraham, nous percevons notre Messie comme Prêtre qui ôte le péché de ceux qui ont brisé l’alliance, comme Prophète dont le message réjouit toutes les familles de la terre et comme Roi terrassant les ennemis de son peuple. Voilà pourquoi, face à un humble nourrisson et à la suite des mages, les chrétiens fléchissent le genou et reconnaissent que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père (Ph 2:10,11).
Il est né, le roi du monde,
Il est né, le Roi du Monde (Ruben Saillens, Sur les Ailes de la foi, n°88).
Le Christ, le libérateur !
Que la terre au ciel réponde
D’une voix, d’un même cœur :
Dans l’étable, misérable
Contemplez ce nouveau-né !
À la terre, ô mystère !
Dieu lui-même s’est donné !
À tes pieds, roi sans couronne,
Jésus, nous courbons nos fronts !
Ta crèche est pour nous un trône,
C’est là que nous t’adorons.
En notre âme viens renaître,
Ô Christ, elle a soif de toi !
Elle veut t’avoir pour maître
Humble enfant, glorieux roi !
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