James Schall est un des rares philosophes catholiques thomistes récents qui ont écrit abondamment sur la philosophie politique. Voici le résumé d’un chapitre The Old Testament and Political Theory de son livre The Politics of Heaven and Hell: Christian Themes from Classical, Medieval, and Modern Political Philosophy qui est une anthologie sur divers thèmes et questions sur la philosophie politique d’un point de vue classique. Il y résume l’importance et l’apport de l’Ancien Testament pour la philosophie politique.
Les programmes ou les listes de textes majeurs en philosophie politique ne préconisent pas l’étude de l’Ancien Testament(Au moins au XXème siècle, époque où Schall écrit.). En effet, pour beaucoup, c’est un livre qui ne parle strictement que de religion et dont l’Etat théocratique d’Israël n’a rien à nous apprendre car c’était un régime exceptionnel dans l’histoire qui ne peut donc nous fournir aucune norme applicable aujourd’hui. Ainsi les théologiens de l’Ancien Testament n’ont développé que des conclusions d’ordre purement religieux.
L’Ancien Testament est pourtant un texte fondateur de philosophie politique. En particulier les Anciens le reconnaissaient. Par exemple, Maïmonide insistait sur l’importance de la Loi pour la philosophie politique. Thomas d’Aquin ne s’est pas seulement limité à l’héritage rationnel des Grecs, notamment sur l’étude des meilleurs régimes politiques. Il s’est aussi attardé sur l’Ancien Testament et en particulier sur le peuple d’Israël en tant que peuple choisi par Dieu. Beaucoup de nations occidentales se sont basés sur ou inspirés de l’Ancien Testament pour se définir et se comprendre. Tout comme beaucoup d’idéologies politiques modernes comme le marxisme (n’oublions pas que Marx était Juif).
L’extrait le plus important est sûrement la Genèse et ses premiers chapitres où l’on apprend que Dieu est le Créateur de toutes choses, y compris aussi des nations. On apprend aussi d’où vient le mal : le péché originel. L’Ancien Testament permet alors de comprendre d’où viennent les guerres entre les nations, tous les problèmes que la philosophie politique cherche à résoudre. Il nous révèle ainsi une cause bien plus profonde que celles des Modernes comme Hobbes (la crainte des autres hommes) et Rousseau (les inégalités entre les hommes).
On découvre aussi dans l’Ancien Testament que Dieu est le maître au contrôle de l’histoire des nations. C’est lui qui a élu Israël et l’a défini à un temps (à partir d’Abraham et en particulier de la conquête du pays promis) et en un lieu précis (Canaan). On a donc avec Israël un exemple de définition d’une nation. C’est notamment de cela que se sont inspirés les Pères fondateurs des Etats-Unis. Mais Dieu n’a pas choisi Israël pour lui-même ou parce qu’il le méritait. Il l’a choisi par grâce et pour un but plus grand qu’un but purement politique : ouvrir la porte du salut et donc de la vision béatifique pour toutes les nations. L’Ancien Testament montre ainsi que la fin ultime de l’homme n’est pas d’ordre politique, mais d’ordre spirituel dans la communion avec Dieu. En cela, il pointe vers l’erreur de la philosophie politique moderne qui tente souvent de placer la fin ultime l’homme dans quelque chose qui est politique.
Dieu est aussi maître dans le sens où il est derrière tout ce qui passe dans l’histoire des nations qui succèdent. L’Ancien Testament nous apprend que chaque nation qui vainc une précédente est prévu par Dieu et souvent une forme de jugement. Chaque nation, en particulier Israël, est jugée pour son obéissance ou sa désobéissance à Dieu. Dans un sens plus général que l’élection d’Israël, chaque nation peut être choisie par Dieu dès lors qu’elle garde ses commandements. C’est là qu’on retrouve la notion importante qu’est l’alliance. Chaque nation peut choisir ou non de faire alliance avec Dieu, et de subir les conséquences de son choix.
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