Article d’un auteur invité, Calvinyps.
Partie 11 : Ce à quoi ne sert pas le don des langues – 1 Corinthiens 14.20-25
Dans les articles précédents, nous avons vu que le but de l’Apôtre Paul en 1 Corinthiens 14 était de corriger les chrétiens charnels de Corinthe en ce qui concerne la mauvaise utilisation et le détournement du don des langues qu’on pouvait observer dans cette église. Le véritable don des langues qui existait à l’époque du Nouveau Testament était la capacité surnaturelle donnée à quelqu’un de parler dans une langue étrangère qu’il ne connaissait pas mais que quelqu’un de présent pouvait comprendre. Dieu avait assigné une finalité très précise à ce don comme nous le verrons dans les deux prochains articles. Malheureusement, les corinthiens avaient perverti le véritable don des langues en l’utilisant d’une façon absurde. De plus, certains d’entre eux usaient même d’une contrefaçon du véritable don des langues.
Il était en effet courant à l’époque, dans les religions païennes du mystère, de croire qu’en entrant dans un état de frénésie ou d’extase on pouvait sortir de son corps et s’élever ainsi dans la communion avec une divinité. Et lorsqu’ils croyaient y parvenir, ils se mettaient à parler dans un langage inconnu : le langage de ce dieu. Ils pensaient que ce phénomène extatique surnaturel était un grand acte de dévotion envers ce dieu. Cette pratique était donc considérée comme permettant de s’édifier soi-même. Et comme d’autres pratiques mondaines, cette pratique païenne du parler en langage extatique avait fait son chemin au milieu de l’assemblée corinthienne.
Les chrétiens de Corinthe confondaient donc le don des langues avec le parler en babillement, en charabia extatique et, ce faisant, croyaient être en communion avec Dieu en utilisant un langage personnel de prière. Face à cette situation, l’Apôtre Paul se devait de réagir, et c’est pourquoi il a écrit ce chapitre, pour dissiper la fausse idée que le véritable don des langues était ce charabia extatique. Il écrivit également ce chapitre pour s’assurer que lorsque le vrai don des langues était exercé, il fut exercé correctement, c’est-à-dire dans le contexte approprié pour qu’il accomplisse la finalité assignée par Dieu à ce don.
1 Corinthiens 14 est un chapitre très important dans notre contexte contemporain parce que les charismatiques sont en permanence en train de nous dire que le parler en langues est nécessaire pour manifester pleinement le Saint-Esprit, pour “libérer sa puissance” dans notre vie. Ils nous pressent d’avoir cette expérience, et c’est pourquoi nous attachons à bien comprendre ce que Paul dit réellement dans ce passage.
Ce chapitre peut être divisé en trois grandes parties. La première partie, que nous avons étudié dans les cinq derniers articles, parle de l’importance du don des langues et nous avons vu qu’elle était secondaire (v.1-19). La seconde partie, que nous étudierons dans cet article et dans les deux articles suivants, traite de la finalité du don des langues (v.20-25). La dernière partie, que nous examinerons dans les trois derniers articles de cette série, enseigne les règles qui encadrent le don des langues (v.26-40).
I. L’importance secondaire du parler en langue (v.1-19).
II. La finalité du don des langues : être un signe (v.20-25).
Il s’agit là d’un des sujets les plus importants de notre étude de ce texte, car si nous pouvons définir la finalité du don des langues alors nous serons capables d’examiner les cas de parler en langues qu’on nous montre aujourd’hui, ou dans l’histoire. Car de deux choses l’une : soit les cas de parler en langues vont dans le sens de la finalité que la Bible donne ou parler en langues, soit ils ne correspondent pas à ce que nous voyons dans la Bible. Par conséquent, nous pourrons déterminer après cet examen de la finalité de ce don si son exercice aujourd’hui est légitime ou non.
1. Les finalités proposées.
a. Un usage dévotionnel pour sa propre édification personnelle.
Voici comment nous pouvons décrire cette théorie que l’on retrouve souvent parmi ceux qui cherchent à donner une finalité aux langues, en particulier parmi nos frères et soeurs qui évoluent dans des milieux charismatiques ou pentecôtistes : ils avancent que la finalité du don des langues est avant tout l’édification personnelle et la dévotion. Autrement dit, ils prétendent qu’il faut utiliser ce don comme un langage personnel de prière afin de s’édifier soi-même et d’avoir une communion manifestement surnaturelle avec Dieu.
Donald Gee, un charismatique bien connu a fait l’affirmation suivante : “… Les finalités révélées du don des langues sont avant tout dévotionnelles, et nous faisons bien de mettre en avant cette caractéristique” [Concerning Spiritual Gifts, ed. Gospel Publishing House, 1937, p. 59]. Un autre charismatique, Larry Christenson, écrit : “On ne parle en langues la plupart du temps que dans ses dévotions personnelles. Il s’agit de loin de son utilisation la plus importante et de son but premier” [Speaking in Tongues and Its Significance for the Church, ed. Bethany Fellowship, 1968, p. 28].
Ils disent que le parler en langues est une façon particulière de rendre un culte personnel à Dieu, une façon particulière de s’édifier soi-même, une façon particulière d’être en communion avec Dieu et de faire l’expérience de quelque chose de plus profond et de plus riche que tout autre chose dont on peut faire l’expérience.
Voici comment nous pouvons réfuter cette conception. Dans les 19 premiers versets de 1 Corinthiens 14, Paul réprimande en fait les Corinthiens pour leur usage des langues. Lorsque nous avons examiné le v.2, nous avons vu que Paul disait en fait aux Corinthiens que lorsqu’ils parlaient dans un charabia extatique, ils ne faisaient en fait que reproduire les sons que les païens disaient à leurs dieux dans les religions du mystère et que ce n’était pas là la finalité de quelque don spirituel que ce soit puisque tous les dons spirituels servent à parler aux hommes ou à servir les autres. En 1 Corinthiens 12.7, Paul avait d’ailleurs déjà précisé que les dons doivent servir au bénéfice de toute l’assemblée. Il est donc clair que les Corinthiens détournaient les dons spirituels de leur objectif.
Tous les dons doivent être utilisés pour s’édifier les uns les autres. L’idée d’une édification personnelle est un travestissement de la véritable édification. Au v.4, lorsque Paul dit : “Celui qui parle en langue [i.e. charabia] s’édifie lui-même…”, il n’est pas en train de leur dire qu’ils doivent parler en langue afin d’être édifiés eux-mêmes : il est simplement en train de prendre acte de la façon dont ils pervertissent le don des langues. Quel est le problème à s’édifier soi-même ? C’est que c’est égocentrique, et qu’aucun don ne doit être utilisé de façon égocentrique. Paul est donc en train de leur dire qu’ils parlent en charabia dans le but de s’édifier eux-mêmes mais qu’en vérité leur intelligence est stérile (v.14), que personne ne peut dire “amen” à ce qu’ils racontent (v.16) et que par conséquent ils sont en train d’ignorer totalement les personnes qui sont autour d’eux par pur égoïsme. Il vaut donc mieux dire cinq mots dans un langage que les autres comprennent que dix mille mots dans une langue étrangère à l’assemblée (v.19). Les Corinthiens parlaient en langue pour s’édifier eux-mêmes ; le problème, c’est que ce n’était pas la finalité de ce don.
Ce don n’a jamais eu pour finalité l’édification. En fait, les langues ne peuvent édifier l’Eglise pour la raison que ses membres ne peuvent pas comprendre ce qui est dit en langues. Même lorsque les langues sont interprétées, c’est, à proprement parler, le don d’interprétation qui édifie, et non le don des langues. Les langues ne peuvent en fait même pas édifier l’individu qui prononce les sons en question car son intelligence est alors stérile.
On ne peut donc pas définir les langues comme un langage de prière à Dieu qui permet de s’édifier soi-même. Dans tous les textes de la Bible qui parlent de la prière, on ne trouve nulle part l’idée que l’on devrait prier à Dieu dans une langue qu’on ne comprend pas soi-même. Et dans le modèle de prière que Jésus nous a laissé en Matthieu 6.9-13, il ne nous est pas demandé de parler en charabia ou en langage extatique… Je ne pense pas qu’on puisse proposer un modèle de prière meilleur que celui proposé par le Seigneur lui-même. Certains diront que le parler en langue est une manière de louer Dieu d’une manière merveilleusement libre. Si c’est le cas, si c’est une manière tellement fantastique de louer Dieu, et si la louange est l’essence de tout ce que nous ferons dans la nouvelle création, pourquoi 1 Corinthiens 13.8 dit-il que les langues cesseront ?
Nous pouvons donc en déduire que le don des langues ne sert pas à s’édifier soi-même ou à rendre un culte personnel à Dieu. Une seconde finalité que certains donnent au don des langues est :
b. L’évangélisation.
Certains pensent que le don des langues dans le Nouveau Testament avait pour finalité de rendre capables ceux qui le recevaient de prêcher l’Evangile dans une langue étrangère. Ca paraît être une très bonne suggestion, et je ne nie pas que Dieu a effectivement donné à certains, dans certaines situations extrêmes, la capacité de parler dans une langue étrangère qu’ils ne connaissaient pas pour annoncer l’Evangile. Néanmoins, on ne peut pas bibliquement soutenir que le don des langues du Nouveau Testament avait cette finalité. Pourquoi pas ? Parce qu’on ne trouve nulle part dans le Nouveau Testament une utilisation du don des langues qui irait dans ce sens.
Il est vrai qu’en Actes 2, au jour de la Pentecôte, les disciples parlèrent en langues et chacun dans la foule pu les entendre parler dans leur propre langue, mais ce qu’il faut noter, c’est que cette multitude les entendit parler des “merveilles de Dieu” (Ac 2.11). Autrement dit, les disciples proclamaient en différentes langues les grands événements que Dieu avait accompli au cours de la période de l’Ancien Testament. Dans quel but ? Afin d’attirer l’attention de la foule juive de sorte que Paul puisse se tenir face à eux et leur prêcher l’Evangile dans une langue qu’ils connaissaient tous (Ac 2.14-20). Ainsi, on ne peut pas dire que la finalité du don des langue est l’évangélisation, même si on peut dire que dans certains cas cela pouvait être utile pour la pré-évangélisation, puisque dans le cas d’Actes 2 on voit que son usage a permis de rassembler la foule afin que l’Evangile lui soit prêché.
Les charismatiques ont donc suggéré que la finalité du don des langues était l’édification personnelle alors que d’autres ont pensé que cela était utile pour l’évangélisation. Aucune de ces deux théories ne correspond cependant à ce que nous trouvons dans le Nouveau Testament. Une troisième finalité proposée pour le don des langues est d’être :
c. La preuve du baptême de l’Esprit.
Trois textes nous permettent de dire que cette conception est très fausse.
Tout d’abord, il y a 1 Corinthiens 12.13, 30 : “Nous avons tous, en effet, été baptisés dans un seul Esprit… Tous ont-ils le don des guérisons? Tous parlent-ils en langues? Tous interprètent-ils?” Combien sont baptisés dans l’Esprit ? Tous ! Et les questions réthoriques du v.30 impliquent une réponse négative. Autrement dit, tous sont baptisés dans l’Esprit, mais tous ne parlent pas en langues. Par conséquent, on ne peut pas dire que le parler en langues est la preuve du baptême de l’Esprit.
Ensuite, il y a Actes 2.38, où Pierre, après sa prédication, déclara : “Repentez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus Christ, pour le [i.e. à cause du] pardon de vos péchés ; et vous recevrez le don du Saint Esprit”. Trois mille personnes répondirent à l’appel de Pierre ce jour là (v.41). Combien de personnes parmi elles se mirent à parler en langues après avoir reçu le don de l’Esprit ? La Bible ne fait pas même mention d’une seule personne qui parla en langues à ce moment là…
Enfin, il y a Actes 4.31 où Luc, parlant de l’église apostolique, écrit : “Quand ils eurent prié, le lieu où ils étaient assemblés trembla ; ils furent tous remplis du Saint Esprit… “. Parlèrent-ils en langues lorsqu’ils furent remplis du Saint-Esprit ? Le texte rapporte simplement : “ils furent tous remplis du Saint Esprit et ils annonçaient la parole de Dieu avec assurance”.
En 1 Corinthiens 12, tous sont baptisés dans l’Esprit. En Actes 2, des personnes reçoivent le don de l’Esprit. Et en Actes 4, des gens sont remplis de l’Esprit. Pourtant, dans aucun de ces trois cas il n’est mentionné que le phénomène des langues accompagnait cette action de l’Esprit. Par conséquent, on ne peut dire ni que le baptême dans l’Esprit, ni que la réception du don de l’Esprit ni que la plénitude de l’Esprit ne sont nécessairement accompagnés du parler en langues.
Si le parler en langues n’a pour finalité ni de signifier le baptême de l’Esprit, ni d’annoncer l’Evangile dans des langues étrangères, ni de s’édifier soi-même, alors quelle est la finalité des langues ? C’est ce que nous verrons la prochaine fois.
Adapté de John MacArthur dans son guide d’étude The Truth about Tongues.
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