Nous n’avons pas besoin de prophétie — Saint Antoine
10 novembre 2022

La Vie de saint Antoine est une biographie écrite par saint Athanase au IVe siècle. Elle raconte la vie d’un moine égyptien qui devint une figure fondatrice du mouvement monastique chrétien, en lui donnant un rôle de modèle. Saint Antoine est un chrétien ayant décidé de se retirer dans le désert, et qui a subi d’intenses attaques démoniaques, auquel il répond par des prières et des psaumes. Au fil du temps, une communauté s’agrège autour de lui, et il en devient une sorte de chef et les enseigne. Athanase écrit alors un résumé des enseignements de saint Antoine. Je fus alors surpris de voir que l’ermite combattant avec les démons développe un argumentaire cessationniste !


Après avoir exhorté ses frères à la discipline, Antoine décrit à quel point il ne faut pas avoir peur des démons (une réalité qu’il a expérimentée jusque dans sa chair). Or, certains dans la communauté étaient tentés par des “paroles de connaissances” qui impressionnaient fort les frères. Il dit alors :

En effet, quelle est l’utilité pour les auditeurs de savoir d’eux ce qui va arriver avant le terme ? Ou bien quel intérêt avons-nous à connaître de telles choses, même si cette connaissance est vraie ? Car elle n’est pas productrice de vertu, et n’est pas un gage de bonté. Car nul d’entre nous n’est jugé pour ce qu’il ne sait pas, et nul n’est appelé bienheureux parce qu’il a du savoir et de la connaissance. Mais chacun sera jugé sur ces points, à savoir s’il a gardé la foi et observé fidèlement les commandements. C’est pourquoi il n’est pas nécessaire d’attacher beaucoup d’importance à ces choses, ni de mener pour elles une vie de discipline et de travail, mais de vivre bien pour plaire à Dieu. Et nous ne devons pas prier pour connaître l’avenir, ni le demander comme récompense de notre discipline ; mais notre prière doit être que le Seigneur soit notre allié dans la victoire sur le diable.

Saint Athanase, Vie de Saint Antoine, §§ 33-34.

Rappelons que ce sont les paroles d’un homme qui a combattu presque physiquement ces même démons, et qui a expérimenté le surnaturel continuellement. Mais l’accent et la conclusion qu’il en retire sont à l’opposé de ce que les charismatiques font. Loin de mettre l’accent sur le surnaturel, saint Antoine considère la discipline chrétienne comme plus fondamentale :

Ainsi donc, nous ne devons craindre que Dieu, mépriser les démons, et ne pas les craindre. Toutefois, plus ils font ces choses, plus nous devons intensifier notre discipline contre eux, car une bonne vie et la foi en Dieu sont une grande arme. En tout cas, ils craignent le jeûne, l’insomnie, les prières, la douceur, la tranquillité, le mépris de l’argent et de la vanité, l’humilité, l’amour des pauvres, les aumônes, l’absence de colère des ascètes, et surtout leur piété envers le Christ…

Ibid.

Si je réserve mon jugement quant à l’ascèse, la pratique de l’amour et la piété sont effectivement les dons qu’il faut développer avant tout don surnaturel. Comme le dit saint Antoine : nous serons jugés sur notre fidélité, et l’essentiel ici-bas est de bien vivre pour plaire à Dieu.


Illustration : Francisco de Zurbarán, Portrait d’Antoine le Grand.

Étienne Omnès

Mari, père, appartient à Christ. Les marques de mon salut sont ma confession de foi et les sacrements que je reçois.

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