QUESTION 7
D’où vient donc cette corruption de la nature humaine ?
Elle vient de la chute et de la désobéissance
de nos premiers parents,
Adam et Ève, dans le Paradis ;
par la chute, notre nature a été si corrompue
que nous sommes tous conçus et nés dans le péché.
DU PÉCHÉ EN GÉNÉRAL
Ces questions qui traitent du péché en général sont principalement les suivantes :
- Est-ce qu’il y a, ou d’où savons-nous qu’il y a du péché dans le monde et en nous ?
- Qu’est-ce que le péché ?
- Combien y-a-t-il de sortes de péchés ?
- D’où vient-il, ou quelles sont ses causes ?
- Quels sont ses effets ?
Il y a cinq divisions principales de péché. La première d’entre elles est celle entre péché originel et actuel. Cette distinction est enseignée dans Romains 5.14 ; 7.20 ; 9.11.
DU PÉCHÉ ACTUEL ET LES DISTINCTIONS RESTANTES, LEURS CAUSES ET LEURS EFFETS
Le péché actuel est toutes les actions internes et externes qui s’opposent à la loi de Dieu, aussi bien dans l’esprit, la volonté et le cœur que dans les désirs extérieurs. Ainsi que les omissions de ce que la loi prescrit, que ce soit dans la pensée, la volonté. Ou poursuivre le mal, en ignorant, ne voulant pas, fuyant ou manquant de faire le bien. C’est la distinction entre le péché de fait et celui d’omission.
Deuxième distinction : Le péché est soit régnant soit non régnant. Le péché est régnant quand celui qui pèche n’en est pas dégoûté par la grâce du Saint Esprit, et pour cette raison est exposé à la mort éternelle, à moins qu’il ne fasse pénitence, et qu’elle lui soit accordée à cause de Christ. Ou bien il s’agit de tout péché qui n’est pas déploré et qui donc n’est pas remis par le Saint Esprit et à cause duquel il est condamné au châtiment éternel, non à cause de l’ordre de la justice de Dieu, mais à cause de la chose même. Au sujet de ce péché régnant il est écrit : « Que le péché ne règne donc pas dans votre corps mortel » Romains 6.12 et de même : « Celui qui fait le péché » c’est-à-dire, qui fait avec plaisir les œuvres du péché « est du diable » 1 Jean 3.8. Il est appelé régnant :
- Parce qu’il est choyé par les hommes et qu’il les asservit.
- Parce qu’il commande à l’homme et le condamne à la mort éternelle. Tels sont tous les péchés dans les non-régénérés, et même d’une partie des régénérés : les erreurs dans le fondement de la foi, la chute de la conscience. La foi qui pardonne les péchés et la vraie consolation leurs sont retirés jusqu’à ce qu’ils se repentent. Le fait qu’en effet des régénérés peuvent tomber dans le péché régnant est suffisamment prouvés par la très triste chute des plus saints des hommes : Aaron, David. Ce qui est objecté souvent est traité dans Ursinus, volume 1, page 207.
Le péché non régnant est celui auquel les pécheurs s’opposent par la grâce du Saint Esprit. Pour cette raison, il n’expose pas à la mort éternelle, parce qu’il y a une repentance qui mène à Christ. Tels sont les défauts, penchants, convoitises dépravées, et multiples péchés d’ignorance, omissions et faiblesses qui restent dans les saints, tant qu’ils sont dans cette vie. Cependant, ils le reconnaissent, le déplorent et le détestent et le combattent demandant avec persévérance qu’il soit racheté par la médiation du Christ, en disant : « Pardonnes nous nos offenses » et pour cette raison, ils gardent leur foi et leur réconfort en Christ. « Si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous égarons nous–mêmes, et la vérité n’est pas en nous. » « Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus–Christ. » « Qui peut connaître ses erreurs involontaires ? Tiens–moi pour innocent de ce qui m’est caché. » 1 Jean 1.8 ; Romains 8.1 ; Psaumes 19.13.
Nous pouvons aussi parler de la distinction commune entre péché véniel et péché mortel. En effet tous les péchés sont par nature mortels, c’est-à-dire qu’ils méritent la mort éternelle. Pourtant il est juste de pouvoir appeler mortel le péché dans lequel si nous persévérons nous mourrons. Il est de même juste d’appeler véniel, c’est-à-dire, qui n’amène pas à la mort éternelle, puisqu’ils ne sont pas régnants dans les régénérés, qui leur est pardonné par la grâce de Christ. Il ne mérite pas de faveur (veniam) en lui-même, mais l’indignité du châtiment. Car la satisfaction du péché de celui qui croît est donnée par grâce à cause de Christ, et non imputé pour la condamnation. Ainsi il est dit : « Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus–Christ. » Romains 8.1. C’est selon ce sens que nous prenons la distinction entre péchés mortels et péchés véniels. Nullement selon le sens usurpé par les papes, selon lequel le péché mortel est ce qui mérite la mort éternelle et le péché véniel celui dont la légèreté ne vaut pas la mort éternelle mais une quelconque peine temporelle digne devant Dieu. Je préfèrerais dire péché régnant et non régnant plutôt que péché mortel et véniel :
- Parce que les mots péchés mortels et véniels sont obscurs et ambigus. Car tous les péchés sont mortels par nature, et ce que Jean appelle le péché qui mène à la mort est le péché contre l’Esprit Saint.
- Parce que l’Écriture n’utilise pas ce vocabulaire, surtout pour les péchés véniels.
- A cause des papes qui ont appelés véniels les péchés qui ne menaient pas à la mort éternelle. Car l’Écriture déclare : « Maudit soit celui qui ne réalise pas les paroles de cette loi en les mettant en pratique ! » « En effet, quiconque observe toute la loi mais trébuche sur un seul point devient entièrement coupable. » « le salaire du péché, c’est la mort » « Celui donc qui violera l’un de ces plus petits commandements et qui enseignera aux gens à faire de même sera appelé le plus petit dans le royaume des cieux » Deutéronome 27.26 ; Jacques 2.10 ; Romains 6.23 ; Matthieu 5.19.
En résumé : Tout péché est mortel par nature, c’est-à-dire : méritant la mort éternelle. Cependant, il peut être véniel, c’est-à-dire ne faisant pas venir la mort éternelle dans le régénéré par la grâce, à cause de Christ.
Troisième distinction : Le péché est aussi contre la conscience ou pas contre la conscience. Le péché contre la conscience est fait ouvertement contre la volonté de Dieu, en connaissant celle-ci. Ou bien : le péché qui est commis contre le savoir et la volonté : ainsi David a sciemment et volontairement commis l’adultère et le meurtre contre la loi. Un péché qui n’est pas contre la conscience est celui que nous commettons soit sans savoir, soit sans vouloir. Ou bien, ce qui est certes reconnu comme péché, et déploré comme tel, mais pourtant ne peut pas être évité parfaitement dans cette vie comme le péché originel, et beaucoup de péchés d’omissions d’ignorance, de faiblesse. Nous omettons en effet beaucoup de bonnes actions et faisons beaucoup de choses mauvaises, subitement vaincus par nos faiblesses, comme Pierre vaincu dans le danger à cause de sa faiblesse, et qui a nié sciemment Christ, mais pas de façon volontaire. Pour cette raison il a pleuré amèrement, et n’a pas perdu totalement la foi, selon la promesse : « Mais j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas, et toi, quand tu seras revenu (à moi) affermis tes frères. » Luc 22.32 Ce n’était pas un péché régnant, et encore moins un péché contre le Saint Esprit parce qu’il aimait Christ non moins lorsqu’il le renie que lorsqu’il pleure. C’est possible à cause de la peur du danger qui ne pouvait pas laisser son âme en repos. Un tel péché est aussi reconnu et déploré par Paul : « Je ne fais pas le bien que je veux, mais je pratique le mal que je ne veux pas. » Romains 7.19 En effet, son blasphème et la persécution de l’Église était aussi un péché d’ignorance. « Moi qui étais auparavant un blasphémateur, un persécuteur, un insolent. J’ai cependant été traité avec compassion, parce que j’agissais dans l’ignorance, par manque de foi. » 1 Timothée 1.13.
Quatrième distinction. Le péché peut être irrachetable, ou contre le Saint Esprit, ou qui mène à la mort. Ou alors il est rachetable, ou pas contre le Saint Esprit, ou qui ne mène pas à la mort. Ceci est résumé dans Matthieu 12.31, Marc 3.29, 1 Jean 5.16. Le péché irrachetable, ou contre le Saint Esprit, ou qui mène à la mort est le refus et l’opposition à la reconnaissance de la vérité de Dieu, et de sa volonté et de ses œuvres, au sujet desquelles leur esprit est convaincu et enseigné de façon certaine par le témoignage du Saint Esprit, non à cause de la peur ou de la faiblesse, mais par une résolution délibérée et la haine de la vérité, et leur âme se soulève contre elle avec hostilité. Ce péché qu’ils commettent est puni par Dieu par l’aveuglement jusqu’à la fin, à moins qu’ils ne se repentent dans cette vie, de laquelle viendra la rémission des péchés. On l’appelle donc irrachetable, non parce qu’il est plus grand que la dignité du mérite de Christ, mais parce qu’il est puni par de l’aveuglement jusqu’à la fin, qu’il accomplit à moins que la repentance ne lui soit donnée. En effet, parce qu’il est une catégorie de péché à part, il a une punition à part : l’aveuglement définitif et l’absence de repentance, repentance sans laquelle aucune rémission n’est donnée. « Quiconque parlera contre le Fils de l’homme, il lui sera pardonné, mais quiconque parlera contre l’Esprit saint, il ne lui sera pardonné ni dans ce monde–ci, ni dans le monde à venir. » « Quiconque blasphème contre l’Esprit saint n’obtiendra jamais de pardon : il est coupable d’un péché éternel. » Matthieu 12.32 ; Marc 3.29.
On dit contre le Saint Esprit non parce qu’il est possible de pécher contre le Saint Esprit sans pécher en même temps contre le Père et le Fils, mais parce que c’est une figure de style pour dire qu’il y a une façon de péché qui est spécifiquement contre le Saint Esprit. C’est-à-dire : immédiatement contre son office ou œuvre, qui est l’illumination de l’esprit humain.
Jean dit qu’il mène à la mort non parce qu’il est le seul qui est mortel ou qui mérite la mort : mais par figure de style, pour dire qu’il est celui qui mérite le plus la mort, et que tous ceux qui commettent ce péché sont certains de mourir parce qu’aucun ne se repentira. Pour cette raison Jean ne veut pas prier pour eux : parce que c’est assurément en vain que l’on demande la rémission de leur péché à Dieu. On parle de ce péché en ces lieux de l’Écriture : Hébreux 6.4-8 ; Hébreux 10.26-29 et Tite 3.10-11.
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