« Croissez et multipliez-vous » — Martin Luther
16 septembre 2020

Dans le cadre de la préparation d’une série sur l’éthique chrétienne de la sexualité, je me suis penché sur les écrits des réformateurs sur ce sujet. Je vous partage une réflexion de Martin Luther sur le commandement, ou plutôt l’œuvre divine, de multiplication du genre humain.

En effet, cette parole que Dieu prononce : « Croissez et multipliez-vous », n’est pas un commandement ; elle est plus qu’un commandement, elle est une œuvre divine qu’il ne nous appartient pas d’empêcher ou de négliger, mais qui est tout aussi nécessaire que le fait que je sois un homme ; elle est plus nécessaire que de manger et de boire, de balayer et de jeter les ordures, de dormir et de veiller. C’est une complexion et une manière d’être implantée à l’homme, aussi bien que les organes qui s’y rapportent. C’est pourquoi, de même que Dieu n’ordonne à personne d’être homme ou femme, mais agit en sorte que l’on est nécessairement l’un ou l’autre, de même il n’ordonne pas aux hommes de se multiplier, mais il agit de telle manière qu’ils se multiplient nécessairement. Et si l’on empêche cette fonction de s’exercer, celle-ci ne se laisse pourtant pas brider et s’exerce néanmoins en fornication, adultère et péché secret, car c’est là une affaire de nature et non de libre choix […]. La parole de Dieu qui t’a créé et qui a dit : « Crois et multiplie-toi », cette parole vit et règne en toi ; tu ne peux d’aucune façon te soustraire à elle, sous peine de devoir commettre sans fin des péchés horribles.

LUTHER Martin, De la vie conjugale, MLO III, p. 226.

Maxime Georgel

Maxime est interne en médecine générale à Lille. Fondateur du site Parlafoi.fr, il se passionne pour la théologie systématique, l'histoire du dogme et la philosophie réaliste. Il affirme être marié à la meilleure épouse du monde. Ils vivent ensemble sur Lille avec leurs trois enfants, sont membres de l'Église de la Trinité (trinitelille.fr) et sont moniteurs de la méthode Billings.

2 Commentaires

  1. oliv

    Bonjour.
    Pas de contextualisation dans ce cas ? Cette parole n’intervient-elle pas au début de l’humanité alors qu’il fallait remplir la Terre ? Est-ce toujours valable aujourd’hui alors qu’on a visiblement des problèmes pour nourrir la planète ? Doit-on prendre cette parole comme un appel universel et intemporel ? Et qu’en est-il de ceux qui ont déjà profité et abusé de leur sexualité ?
    D’autre part quid du souhait de Paul quant au célibat pour ceux qui le peuvent (don de continence) ? Le St-Esprit ne permettrait-il pas de résister aux tentations sexuelles ? Jésus lui-même aurait-il désobéi à cette parole (qui vient de Lui, qu’Il est lui-même) ? Ne sommes-nous pas appelés à être transformés à l’image de Christ ?
    Pour ma part je n’oublie pas de qui vient cet enseignement légaliste, c’est-à-dire d’un moine ayant fait vœu de chasteté et n’arrivant visiblement pas à mortifier son corps par les mauvais traitements (pauvre temple du St-Esprit). C’est bien connu, on a tendance à condamner de manière virulente le péché qui nous domine…

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  2. Maxime Georgel

    Bonjour,

    L’argument de Luther est en fait bien plus fort et sérieux que « ce n’est pas contextuel ». Il est d’ordre naturel et indéniable : la sexualité existe et est toujours liée de manière intime, par disposition naturelle et créatrice, à la procréation. Et ainsi, qu’on le veuille ou non, soit nous permettons à l’acte sexuel d’atteindre la finalité pour laquelle il est conçu, soit nous l’en détournons. Mais nous ne pouvons pas dissocier l’un de l’autre. C’est aussi intrinsèque que le fait d’être homme ou femme.

    Je développerai bientôt dans une série en détail cet argument. En attendant, je vous réfère à Humanae Vitae et Donum Vitae. Pour la question de « nourrir » la planète, il est tout-à-fait raisonnable de penser que la répartition et la surconsommation par individu est le vrai soucis et que la planète a largement assez de ressources pour nourrir tout le monde si l’on en avait la volonté (cf. Évolutions démographiques, dimensions pastorales et éthiques, éditions Cerf).

    La continence est en effet l’alternative au fait de ne pas vouloir fonder de famille et non pas une sexualité sans procréation ! Luther approuve d’ailleurs cela ailleurs en disant, tout comme Paul et Jésus lui-même, qu’il faut être appelé à être eunuque pour le royaume de Dieu mais qu’il ne s’agit pas de la condition commune des hommes. Autrement dit, cette exception confirme la règle bien plus qu’elle ne l’infirme.

    Quant aux réflexions sur la vie de Luther, quand on sait au contraire la réticence qu’il a eu à entrer dans la vie matrimoniale après la Réforme alors qu’il en avait toute liberté, on ne peut que tenir pour de la calomnie vos remarques qui relèvent du sophisme ad hominem bien plus que de la véritable argumentation. Et puis cette psychanalyse de comptoir introduite par « c’est bien connu » restera sans commentaire ! À ce jeu là, je pourrai dire que ceux qui critiquent Luther le font parce qu’ils ont bien envie d’utiliser des méthodes abortives et contraceptives pour jouir d’une manière irresponsable de leur sexualité ! Mais je sais que la situation est bien plus complexe que cela en réalité.

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