Nous vous prions, frères, d’avoir de la considération pour ceux qui travaillent parmi vous, qui vous dirigent dans le Seigneur, et qui vous exhortent. Ayez pour eux beaucoup d’affection, à cause de leur œuvre. Soyez en paix entre vous.
1 Thessaloniciens 5:12-13
Si vous fréquentez des Églises et des chrétiens, ne serait-ce que depuis peu de temps, vous aurez probablement déjà fait la triste expérience d’entendre des membres se plaindre de leurs pasteurs. Si vous êtes vous-même pasteur, vous aurez malheureusement peut-être vécu la situation inverse ; le défi que représente l’office pastoral mêlé à la faiblesse de la chair peut amener des anciens à se plaindre du troupeau dont ils ont la charge.
Face à ces expériences au sein de l’Église, il n’est pas surprenant de voir que l’apôtre Paul eut besoin d’exhorter les chrétiens de Thessalonique à avoir de la considération et de l’affection pour « ceux qui travaillent parmi eux », c’est à dire, leurs pasteurs. Cela ne veut pas dire que toute considération ou affection étaient absentes dans cette assemblée, mais, dans tous les cas, cela veut dire que c’est une chose qui doit être développée, à laquelle il faut être attentif, et donc une chose qui, selon la chair, ne doit pas être si évidente que cela à pratiquer. Autrement dit, considérer et aimer nos anciens fait partie de notre sanctification.
Je me suis donc demandé ce qui pouvait rendre difficile le fait d’avoir de la considération et de l’affection pour nos anciens. Il s’agit bien entendu d’un ensemble de raisons, externes et internes à nous même, que nous ne pourrons pas exhaustivement aborder ici. J’en ai retenu une qui est, à mon avis, la raison centrale à ce problème. Je crois que ce manque de considération et d’affection envers les pasteurs est directement lié au peu de considération que nous avons pour la santé de notre âme.
La santé de notre âme est la chose la plus importante
L’être humain, dirigé par sa chair, fait naturellement peu de cas de la bonne santé spirituelle de son âme. Et lorsque c’est le cas, il se trompe bien souvent sur ce dont son âme a véritablement besoin. C’est l’essence même de l’idolâtrie : fournir une mauvaise solution à un besoin réel. Ainsi, que ce soit consciemment ou inconsciemment, l’être humain est naturellement enclin à vivre une vie spirituellement malsaine. Et pourtant, le Seigneur Jésus-Christ, citant Deutéronome 8:3, nous a enseigné que « l’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Matthieu 4:4). Ainsi, notre vie ne dépend pas seulement du fait que nous mangions et buvions, mais également de ce que nous recevions la Parole de Dieu.
Nous savons que notre corps a besoin d’une bonne alimentation pour se développer correctement et se maintenir en bonne santé. Nous faisons donc attention à ce que nous mangeons. Toutefois, si cela est évident pour tout homme, la bonne alimentation spirituelle ne l’est pas pour l’âme dépravée, qui est spirituellement morte. C’est donc l’œuvre du Saint-Esprit, à travers la sanctification de notre être intérieur, de nous apprendre à être attentifs à la santé de notre âme, de sélectionner la nourriture qui lui permette de bien se développer et de se maintenir en bonne santé, et d’avoir de la considération et de l’affection pour tout ceux qui travaillent pour nous aider dans ce sens.
Si nous considérons que notre santé physique est importante, et que nous sommes malades, nous aurons de la considération, beaucoup de reconnaissance et même une certaine affection pour le médecin qui nous aura soignés. Si nous considérons que notre confort matériel est important, et que nous avons des difficultés financières, nous serons reconnaissants envers le conseiller qui nous trouvera un arrangement. En résumé : nous avons de la considération, de la reconnaissance et de l’affection envers les personnes qui nous portent assistance dans les domaines qui comptent le plus pour nous.
Et qu’est ce qui pourrait bien être plus important que la vie de l’âme ? La mort physique est une chose. Par elle, nous disparaissons de ce monde pour un temps. Mais notre âme, elle, vit à toujours depuis sa création, et c’est son destin qui détermine celui de notre être tout entier. Notre corps ne retourne à la poussière que pour attendre le jour du jugement où il rejoindra notre âme pour une éternité vécue soit dans la présence favorable de son créateur au paradis, soit dans la terrible présence de son ardente colère en enfer. Notre destin éternel est entièrement lié à celui de notre âme et il se décide dans cette vie ici-bas, avant notre mort physique. Après quoi, il n’y a plus de seconde chance, comme cela est rendu très clair dans la parabole du riche et de Lazare en Luc 16.
Ainsi, lorsque nous comprenons que la santé de notre âme n’est pas seulement très importante, mais qu’elle est bien ce qu’il y a de plus important, car elle détermine où et comment nous passerons l’éternité, alors il en résulte que nous devrions avoir non pas seulement de la considération, mais bien la plus grande considération et affection pour ceux qui nourrissent, éduquent, et soignent nos âmes, afin que nous ayons part à la vie éternelle.
Le travail diligent et excellent est digne de considération
En tant qu’êtres humains, nous sommes naturellement portés à avoir une haute estime des personnes qui accomplissent un travail qui force l’admiration et le respect. L’être humain a une affection naturelle pour ceux qui travaillent avec excellence et diligence.
Si nous manquons d’une telle estime envers nos pasteurs, c’est probablement car nous n’avons pas conscience que leur office est le plus noble, le plus digne de tous. Le prédicateur anglais, Martin Lloyd Jones, quitta son métier de médecin pour s’engager dans l’office pastoral, considérant qu’il s’agissait de la plus noble des vocations, plus noble encore que la médecine, cette dernière ne pouvant que soigner le corps pour un temps, alors que le pasteur a le privilège, par la grâce de Dieu, de prendre soin de l’âme en vue de la vie éternelle.
Avons-nous même simplement conscience que l’office pastoral est un véritable travail, et non pas une simple passion ou occupation secondaire ? Nous le devrions en tout cas, selon les termes utilisés par l’Apôtre dans ces versets : « travaillent », « dirigent », « exhortent », « œuvre ». L’office pastoral est un véritable travail. Nos anciens transpirent, se fatiguent, se sacrifient, se dévouent à cette tâche, aussi glorieuse soit-elle. C’est un travail avec d’immenses responsabilités, devant l’Éternel lui même1; si nous avons de la considération pour les magistrats d’un illustre roi, outils de sa volonté, comment ne pas considérer d’avantage encore les instruments que le Christ utilise pour le soin de son troupeau ? Nos anciens seront redevables devant Dieu pour le travail qu’ils auront effectué au sein de son Église. Ayons de la considération et de l’affection pour eux lorsque nous les voyons remplir les responsabilités de leur appel, qu’ils ont reçu de Dieu lui même, avec diligence, zèle et excellence.
Mais la dignité de cet office ne s’arrête pas là : ce en quoi il consiste force notre considération également. Le Christ, notre pasteur, dirige son troupeau à travers ses co-pasteurs, que sont nos anciens. Ils « nous dirigent dans le Seigneur ». De même, il nous exhortent à travers eux : tout comme les prophètes de l’ancienne alliance, nos pasteurs sont là pour nous rappeler que nous faisons partie de l’alliance que Dieu a conclue avec son peuple en Jésus-Christ, et quelles sont les implications de cette alliance. Ils sont là pour nous exhorter à l’obéissance et à la fidélité, et nous mettre en garde, nous décourager et nous rediriger vers le droit chemin lorsque nous sommes sur une voie qui mène à la perdition. Ils sont en cela, les co-gardiens de nos âmes, le gardien étant le Christ lui même.
Nous pouvons d’ailleurs constater qu’en bien des points, l’office pastoral reprend celui du Christ sur son Église. C’est en cela que nous pouvons appeler nos anciens des prêtres, sacrificateurs, pasteurs, bien que Christ soit l’ultime prêtre, sacrificateur, et pasteur. Le fait que nos anciens soient co-participants de l’office du Christ les rend tout à fait digne de notre considération et de notre affection, si nous en avons pour notre Seigneur lui-même.
Nous sommes personnellement l’objet de l’ouvrage de nos pasteurs
Les deux raisons précédentes seraient déjà suffisantes pour nourrir notre considération et notre affection envers nos pasteurs. Mais à celles-ci s’ajoute le fait que nous sommes, personnellement, l’objet de cet ouvrage. Nos anciens transpirent, se fatiguent, se sacrifient, se dévouent à cette tâche glorieuse pour nous. En cela ils sont à nouveau les imitateurs du pasteur de l’Église universelle, Jésus-Christ, qui s’est rendu humble et obéissant jusqu’à la mort de la croix pour nous servir et nous sauver (Philippiens 2:8). N’est ce pas absolument incroyable de méditer sur le fait que le créateur de toutes choses se soit fait le serviteur de ses propres créatures rebelles envers lui ?
Nos pasteurs sont certes des créatures et des hommes comme tous les autres. Mais en suivant leur vocation, ils imitent le Christ en se sacrifiant pour nous et en nous servant. C’est pourquoi ils doivent être pour l’assemblée à la fois un modèle d’autorité mais aussi de service. Nous sommes l’objet de leurs pensées, de leurs prières, de leurs conseils, de leurs enseignements, de leurs exhortations, de leurs réprimandes. En tout cela, ils reflètent l’engagement du Christ lui-même envers nous, son Église. Nous sommes personnellement l’objet de l’ouvrage de nos pasteurs car ils ne sont que les outils dans les mains du Christ qui prend soin de son troupeau à travers eux.
C’est pourquoi en considérant et en aimant nos pasteurs, c’est le Christ que nous considérons et que nous aimons à travers eux.
Soyez en paix entre vous
À cause de tout cela, dit l’apôtre, ayez pour vos pasteurs beaucoup d’affection. On peut alors se demander comment nous pouvons manifester notre considération et notre affection envers ceux qui œuvrent parmi nous pour la bonne santé de nos âmes. La réponse nous est donnée juste après : « Soyez en paix entre vous ». Il est étonnant de constater à quelle fréquence Paul fait cette exhortation aux Églises dans ces lettres. À de nombreuses reprises, il prie le Dieu de paix de la leur donner2. La paix dans le cœur du chrétien, et au sein de l’assemblée, est un don de Dieu. Notre Dieu aime la paix, et il agit dans ce monde depuis la chute pour la restaurer parfaitement et éternellement. Si nous sommes appelés à refléter le caractère de notre Seigneur dans notre vie, nous devons être en tout temps des agents de paix (Romains 12:18).
Ailleurs, l’apôtre Paul encourage les assemblées à faciliter le travail de leurs pasteurs afin que ceux-ci ne les servent pas « en gémissant ». Cette péricope est particulièrement pertinente, car elle résume très bien les différents aspects de notre discussion :
Obéissez à vos conducteurs et ayez pour eux de la déférence, car ils veillent sur vos âmes comme devant en rendre compte; qu’il en soit ainsi, afin qu’ils le fassent avec joie, et non en gémissant, ce qui ne vous serait d’aucun avantage.
Hébreux 13:17
Il est aisé de comprendre en quoi être en paix les uns avec les autres est un bénéfice à tout point de vue. Dans un monde régi par le conflit, la guerre, et les querelles de tout genre, une communauté ou règne la paix et l’amour est toujours un témoignage interpellant (Jean 13:35). Une Église où règne la paix est un véritable refuge, un foyer, pour bien des personnes qui ont, malgré leur bonne volonté, une vie conflictuelle épouvante au travail ou dans leur famille. Si notre Seigneur Jésus-Christ lui-même a donné sa vie sur la croix afin que la paix soit définitivement restaurée dans sa Création, nous devrions tous travailler individuellement et collectivement à instaurer en entretenir cette paix, même imparfaite, dans nos Églises, dès aujourd’hui, par l’aide du Saint-Esprit.
En faisant cela nous honorons notre Dieu, en facilitant l’œuvre bien souvent éprouvante de ses serviteurs que sont nos anciens. Nous facilitons leur travail en créant un environnement de paix, favorable à la sanctification du corps du Christ. Considérer cela nous aidera certainement à pardonner plus facilement et à supporter plus généreusement les offenses personnelles par amour pour nos frères et sœurs, pour nos pasteurs, et ultimement, par amour pour le Christ lui-même.
Conclusion
Ainsi, il apparaît clairement que pour avoir une considération et une affection réelles pour nos pasteurs et leur œuvre dans nos Églises, nous devons commencer par avoir la plus grande considération pour l’importance de la santé spirituelle de notre âme. Sans cela, nos pasteurs seront au mieux des psychologues alternatifs, tout juste bon à nous écouter et nous donner de bons conseils pour améliorer notre vie ici-bas. Mais si nous comprenons que la vie de notre âme est ce qu’il y a de plus important, et que nos pasteurs travaillent activement, devant le Seigneur, afin que celle-ci soit toujours en bonne santé et parvienne à la vie éternelle, alors notre affection pour eux en sera très largement ravivée.
J’aimerais conclure en disant que tout cela est également vrai dans le sens inverse (1 Pierre 2:3). Car bien des pasteurs peuvent avoir une faible considération de leur propre office, une faible affection pour leur assemblée, en raison de la faible importance qu’ils accordent à la santé spirituelle des âmes dont ils ont la charge. Ils se transforment alors eux mêmes en psychologues ou assistants sociaux, et oublient qu’ils sont les co-pasteurs du Christ, qu’ils ont la charge de son troupeau ici-bas, et que leur mission est de le guider le plus sûrement possible vers la maison de leur maître, c’est à dire, la Jérusalem céleste. Il n’y a pas d’appel plus digne que celui-ci, il n’y a pas de responsabilités plus grande que celle ci.
Considérer chaque personne comme une âme qui passera l’éternité soit en enfer, soit au paradis : voilà la plus grande motivation qui pousse chaque chrétien à être zélé dans sa mission qui est de prêcher l’Évangile aux nations, et chaque pasteur à prendre soin du troupeau, en nourrissant les âmes régulièrement avec la meilleure nourriture qui soit — la Bible. C’est cette réalité qui encouragera les membres d’Églises à avoir de la considération et de l’affection pour leurs pasteurs, et ces derniers, à répondre avec zèle et persévérance à la plus glorieuse des vocations, à savoir : paître le troupeau du Christ dans l’attente de son glorieux retour.
Illustration de couverture : Arthur Streeton (1867-1943), Golden summer, Eaglemont, 1889, huile sur toile, 813 x 1526 mm.
- Ezéchiel 33:1-9 est l’un des passages les plus clairs sur la redevabilité des pasteurs envers Dieu :
La parole de l’Éternel m’a été adressée: « Fils de l’homme, parle aux enfants de ton peuple! Tu leur diras: ‘Admettons que je fasse venir l’épée sur un pays et que la population du pays prenne l’un des siens pour l’établir comme sentinelle. Si cet homme voit venir l’épée sur le pays, sonne de la trompette et avertit le peuple, mais que celui qui entend le son de la trompette ne se laisse pas avertir et se laisse surprendre par l’épée, il sera seul responsable de sa mort. Il a entendu le son de la trompette mais ne s’est pas laissé avertir; son sang retombera donc sur lui. Si en revanche il se laisse avertir, il sauvera sa vie. Si la sentinelle voit venir l’épée et ne sonne pas de la trompette, si le peuple n’est pas averti et que l’épée vienne prendre la vie à quelqu’un, cette personne mourra à cause de ses fautes, mais je réclamerai son sang à la sentinelle. C’est toi, fils de l’homme, que j’ai donné comme sentinelle à la communauté d’Israël. Tu dois écouter la parole qui sort de ma bouche et les avertir de ma part. Quand je dirai au méchant: « Toi qui es méchant, tu vas mourir, c’est certain », si tu ne parles pas pour avertir le méchant afin qu’il renonce à sa conduite, ce méchant mourra à cause de sa faute, mais je te réclamerai son sang. Si au contraire tu avertis le méchant afin qu’il renonce à sa conduite, pour qu’il s’en détourne, et qu’il ne change pas de conduite, il mourra à cause de sa faute, mais toi, tu auras délivré ton âme.[↩] - Par exemple : 1 Thessaloniciens 1:1, 2 Thessaloniciens 1:1, 2 Thessaloniciens 3:16.[↩]
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