Romel Quintero est un jeune théologien réformé colombien, responsable du site Irenismo Reformado [Irénisme réformé], partenaire de Par la foi. L’article que nous proposons aujourd’hui en traduction a été publié en espagnol ce mois-ci.
Parler du catéchisme de Heidelberg (1563) comme d’un document « luthérien » peut paraître étrange, mais ce l’est déjà moins si l’on comprend par là qu’il a été influencé en partie par la tradition luthérienne, et non comme un de ses textes officiels.
Voici ce que Lyle D. Bierma, un des experts contemporains du catéchisme de Heidelberg, dit à propos de l’influence luthérienne :
« Le texte et la théologie du catéchisme de Heidelberg ont pour fondement quelques-uns des principaux documents de la tradition luthérienne : le Petit catéchisme de Luther de 1529, qui était déjà largement utilisé dans le Palatinat avant la parution du catéchisme de Heidelberg ; la confession d’Augsbourg de Mélanchthon, à laquelle le Palatinat avait adhéré selon les termes de la paix d’Augsbourg ; et l’Examen des ordinands de Mélanchthon, une œuvre catéchétique que l’Électeur palatin Otto-Henri incorpora à la discipline ecclésiastique du Palatinat en 15561. »
Comment cette influence s’est-elle incarnée dans le catéchisme de Heidelberg ? D’après Bierma, c’est l’intégration de « thèmes et motifs textuels » typiques de la tradition luthérienne qui en témoigne. Il a particulièrement à l’esprit « le thème et la structure du catéchisme ; le mariage entre la Loi et l’Évangile (parties 1 et 2) ; les sections sur la Trinité (partie 2) ; les définitions de thèmes aussi importants que la foi, la providence et les sacrements. » Il ajoute plus loin : « Le catéchisme de Heidelberg et la confession d’Augsbourg de Mélanchthon s’accordent sur le fond sur les doctrines du péché, de la réconciliation, de la justification, sur la prédication, sur la relation entre Parole et Esprit, et en grande partie (sinon sur tout) sur la doctrine de la Cène. »
Ces éléments luthériens auraient été intégrés dans le catéchisme de Heidelberg par « esprit œcuménique » (Bierma), ou bien seraient dus au fait que les réformés recherchaient l’unité avec la tradition luthérienne en Allemagne, ce qui obéissait à des motivations tant religieuses que politiques. Le Palatinat, après tout, était une région traditionnellement luthérienne, qui souscrivait à la confession d’Augsbourg. Une telle unité ne fut finalement pas possible, mais l’intention d’unification demeure dans le texte du catéchisme.
Bien sûr, le catéchisme de Heidelberg a également des caractéristiques spécifiquement réformées, mais ce que l’on veut souligner ici est le procédé irénique qui consiste à les mêler d’éléments luthériens. Car oui, le catéchisme de Heidelberg, remis dans le contexte de sa rédaction, n’appartient exclusivement ni aux luthériens, ni aux réformés. C’est bien plutôt, comme le dit Bierma, « une synthèse luthéro-réformée, qui prétendait établir un consensus sur la base de cette synthèse ». Ainsi, le catéchisme de Heidelberg est un exemple historique de plus d’une fusion luthéro-réformée, ou d’une fusion protestante classique.
Illustration : William Turner, Heidelberg avec un arc-en-ciel, huile sur toile, 1841 (Galerie nationale écossaire, Édimbourg).
- Lyle D. Bierma, The Theology of the Heidelberg Catechism: A Reformation Synthesis, Columbia Series in Reformed Theology, Westminster : John Knox Press, 2013.[↩]
0 commentaires