L’élection de certains hommes est-elle constante et immuable ? Nous l’affirmons contre les remontrants.
Cette question va avec l’inconditionnalité de l’élection. Si l’élection est entièrement en Dieu et qu’il ne change pas, alors elle est certaine. Mais si une part de l’élection se fait en l’homme changeant, alors elle ne peut pas être sûre.
Les arminiens du XVIIe siècle distinguaient deux élections différentes : l’une muable et incertaine, avec un nombre de noms indéterminé, pour ceux qui croyaient sans persévérer. L’autre immuable et sûre, pour ceux qui persévéraient dans la foi jusqu’à la fin. Les réformés ne reconnaissent qu’une seule élection, immuable, sûre, et déterminée.
À noter que nous ne parlons ici que de la certitude objective du salut : est-il fixe ou changeant ? Quant à la certitude subjective, le fameux « puis-je être sûr d’être sauvé ? », il en sera question juste après.
Argumentation (§§ 6-15)
Premièrement, le décret d’élection est de même nature que les autres décrets de Dieu, qui sont immuables (cf Psaumes 33,11 ; Nombres 23,19 ; Malachie 3,6 ; Jacques 1,17 ; Ésaïe 46,10). Donc le décret d’élection est immuable. Il est écrit, au sujet du décret d’élection :
- Hébreux 6,17 : C’est pourquoi Dieu, voulant montrer avec plus d’évidence aux héritiers de la promesse l’immuabilité de sa résolution.
- Romains 9,11 : afin que le dessein d’élection de Dieu subsiste, sans dépendre des œuvres, et par la seule volonté de celui qui appelle.
- Romains 11,29 : en ce qui concerne l’élection, ils sont aimés à cause de leurs pères. Car les dons et l’appel de Dieu sont irrévocables.
- 2 Timothée 2,19 : le solide fondement posé par Dieu subsiste, avec ces paroles qui lui servent de sceau: Le Seigneur connaît ceux qui lui appartiennent Notez comment la solidité de la promesse de salut est liée à celui qui en est l’origine et le sujet: Dieu.
Deuxièmement, les élus ne peuvent pas être séduits ; Matthieu 24,24 : au point de séduire, s’il était possible, même les élus.
Troisièmement, il y a une connexion inséparable entre l’élection et la gloire finale. Romains 8,29-30 : Car ceux qu’il a connus d’avance, il les a aussi prédestinés […]. Et ceux qu’il a prédestinés, il les a aussi appelés; et ceux qu’il a appelés, il les a aussi justifiés; et ceux qu’il a justifiés, il les a aussi glorifiés. Ce passage est renforcé par Romains 11,7 : Ce qu’Israël cherche, il ne l’a pas obtenu, mais les élus l’ont obtenu, tandis que les autres ont été endurcis Notez comment le salut est obtenu par les élus, comme s’il n’y avait aucune différences entre élus et sauvés. Romains 11,2 : Dieu n’a point rejeté son peuple, qu’il a connu d’avance. De même, ceux qu’il a connus, il les sauve.
Quatrièmement, le noms des élus est écrit dans le livre de vie, qui ne souffre ni rature ni révision.
- Philippiens 4,3 : Clément et mes autres compagnons d’œuvre, dont les noms sont dans le livre de vie.
- Apocalypse 13,8 : Et tous les habitants de la terre l’adoreront, ceux dont le nom n’a pas été écrit dans le livre de vie de l’Agneau qui a été immolé dès la fondation du monde.
- Hébreux 12,23 : de l’assemblée des premiers-nés inscrits dans les cieux.
- Luc 10,20 : réjouissez-vous de ce que vos noms sont écrits dans les cieux.
- Malachie 3,16 : un livre de souvenir fut écrit devant lui pour ceux qui craignent l’Éternel et qui honorent son nom.
- Ésaïe 4,3 : Quiconque à Jérusalem sera inscrit parmi les vivants
- Apocalypse 3,5 : Celui qui vaincra sera ainsi revêtu de vêtements blancs; je n’effacerai point son nom du livre de vie, et je confesserai son nom devant mon Père et devant ses anges.
- Apocalypse 21,27 : il n’entrera que ceux qui sont écrits dans le livre de vie de l’Agneau.
Ainsi que le dit Augustin au sujet du Psaume 69 : Si un homme dit « j’ai écrit ce que j’ai écrit », Dieu inscrira-t-il dans un livre de vie pour ensuite l’en effacer ?
Réponses aux objections (§§ 16-25)
Considérant que la certitude de la fin n’exclue pas la nécessité des moyens, mais au contraire la présuppose, la doctrine de l’immuabilité de l’élection n’enlève pas l’utilité des avertissements et menaces (le moyen institué par Dieu pour l’exécution de son décret) et ne génère pas de sécurité charnelle. Ainsi les mêmes saints qui sont assurés de la vie éternelle et d’aller au ciel ne cessent pas de faire attention à leur salut parce qu’ils savent que ce salut ne peut être atteint sans les devoirs intermédiaires de la sainteté, et l’esquive de la conduite contraire : Quiconque a cette espérance en lui se purifie, 1 Jean 3,3.
François Turretin, Instituts de théologie élenctique, 4.12.21
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