Du postmillénarisme théopolitain – Lettre à MM. Blocher et Denault
2 février 2025

Ce qui suit est une lettre adressée à MM. Henri Blocher et Pascal Denault, en vue d’un entretien que nous aurons prochainement et qui sera diffusé en ligne, sur l’eschatologie.


Cher Monsieur Blocher,
Cher Pascal,

J’ai enfin pu coucher par écrit les aspects les plus saillants de la position eschatologique qui est la mienne à ce jour et que je vais présenter lors de notre toute prochaine entrevue. Dans ce message, je souhaite faire parvenir à votre connaissance A. les principales caractéristiques de cette position particulière qui est devenue mienne, B. les principaux arguments que je retiens en ce sens.


A. Principales caractéristiques du « postmillénarisme théopolitain »


La position qui me convainc actuellement n’a pas vraiment de nom officiel. Elle relève, à l’analyse, du postmillénarisme, mais elle se distingue suffisamment du « postmillénarisme classique » en vogue autrefois parmi les puritains pour qu’il paraisse nécessaire de reconnaître son côté « non-classique » et de vouloir lui chercher une autre dénomination. Dans la mesure où les trois auteurs qui m’influencent à ce sujet sont James B. Jordan, Peter J. Leithart et Alastair Roberts, tous trois liés de diverses manières au Theopolis Institute dirigé par P. J. Leithart, je qualifierai donc, de manière provisoire, ma position de « postmillénairisme théopolitain » ou de « version théopolitaine » du postmillénarisme.
Ses caractéristiques sont les suivantes :

  1. Ce postmillénarisme distingue trois périodes entre la première et la seconde venue du Christ : (i) la période apostolique, entre la mort, la résurrection et l’ascension de Jésus en 30 ap. J.-C., et la fin de la guerre juive en 70 (ou en 73) ap. J.-C. : cette période est antécédente au millénium. Durant cette période coexiste le judaïsme apostat du second Temple et l’Église chrétienne à ses débuts, qui est persécutée par l’alliance impie des « nations », aussi bien les juifs que les non-juifs ; (ii) le millénium, qui est le temps de l’Église, après la destruction des institutions du judaïsme du second Temple (et principalement du Temple lui-même et de Jérusalem), qui est de très loin la période principale entre la première et la seconde venue du Christ ; (iii) une période finale de crise, hors millénium, décrite spirituellement en Apocalypse 20 comme « Gog et Magog », avec le diable liguant, comme durant l’époque apostolique, les « nations » contre le Christ et son Église.
    ➔ Il s’agit bien d’un postmillénarisme, puisque, contrairement à l’amillénarisme, cette position identifie une période de latence distincte entre l’Ascension et le début du millénium. Le millénium ne commence pas avec l’Ascension, comme c’est le cas dans tous les amillénarismes.
  2. Ce postmillénarisme énonce que nous sommes déjà dans le millénium depuis la destruction de Jérusalem en 70 ap. J.-C.
    ➔ Les convergences sont sur ce point avec l’amillénarisme et non avec le « postmillénarisme classique », qui envisageait qu’à un certain point de l’histoire encore à venir commencerait un âge d’or du christianisme. Dans la version théopolitaine, il n’y a pas besoin de se sentir dans un âge d’or pour se considérer dans le millénium, mais la conviction que ce qui précède immédiatement le millénium en Apocalypse 17-19 s’est bel et bien accompli dans la guerre juive qui a abouti à la destruction de Jérusalem suffit à considérer toute la période qui suit, jusqu’à ce jour et pour encore très longtemps, comme la période du millénium.
  3. Ce postmillénarisme considère que les « 1000 ans » du millénium sont à prendre symboliquement, comme l’expression d’une durée très longue (de telle sorte que 1000 ans peut symboliser 10 000, 100 000 ou 1 000 000 d’années, mais non 10 ou 100 ans, et probablement pas non plus 2000 ou 3000 ans, qui sont trop proches de 1000 pour pouvoir être symbolisés par le chiffre 1000).
    ➔ Cette position est, sous cet angle, réellement « amillénariste » : il ne faut pas attendre, et il n’y a jamais eu, de « millénaire de 1000 ans exactement ».
  4. Ce postmillénarisme est foncièrement optimiste sur le long-terme. Quelles que soient les vicissitudes de l’histoire, et malgré le fait que nous vivons une période particulièrement préoccupante au plan spirituel, le message de l’Évangile est appelé à transformer le monde en profondeur (beaucoup plus que ce dont l’histoire de l’Église n’a jamais été témoin pour l’instant), avec une christianisation des nations de ce monde inédite.
    ➔ Sur ce point, cette position ne diffère pas tellement des versions « optimistes » de l’amillénarisme, surtout ceux qui envisagent l’émergence dans un avenir proche ou lointain de systèmes de « chrétienté » perfectionnés, par rapport à ceux qui ont eu cours sur la fin de la période de l’Empire Romain ou durant le moyen-âge européen.
  5. Ce postmillénarisme est lié à l’habitude de rechercher de manière assez systématique une interprétation de type prétériste aux prophéties bibliques, et notamment de l’Apocalypse et des prédictions faites par Jésus (habituellement rapportées à la fin des temps, mais comprises ici comme relevant de l’époque de la destruction de Jérusalem dans « cette génération »)
    ➔ Tous les textes « pessimistes » (comme « quand le Fils de l’homme viendra trouvera-t-il la foi sur la terre ») peuvent être considérés comme se rapportant, non à la situation de l’humanité à la fin du millénium (quoique la révolte finale de « Gog et Magog » laisse ouvert la possibilité d’une réplique finale de l’accomplissement de ces textes), mais à celle de Jérusalem à la veille de sa destruction par les Romains.

B. Principaux arguments en faveur du « postmillénarisme théopolitain »

Je commence par les textes qui m’interrogeaient déjà lorsque j’étais encore amillénariste, et je termine par un argument qui m’apparaît décisif :

  1. 1 Corinthiens 15.24-24 : Christ règne actuellement et met tous ses ennemis sous ses pieds avant de remettre le royaume à son Père. Le passage précise que le dernier ennemi assujetti sera la mort elle-même, ce qui aura lieu lors du jugement dernier. Mais la phraséologie suggère que d’autres ennemis seront assujettis avant cette phase finale de l’histoire. Le royaume a été inauguré lors de la première venue du Fils, et il sera consommé lors de sa seconde venue. Mais faut-il penser que rien de nouveau n’adviendra en termes de succès de l’Évangile entre la première venue, si le Christ règne effectivement depuis son Ascension ?
  2. Matthieu 28.18-20 : le mandat missionnaire est donné dans un contexte où Jésus déclare qu’il a reçu les plein-pouvoirs : « Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre ». Ce préambule signifie que ce que le Fils glorifié va ordonner à son Église, il est aussi capable de lui donner. Le Fils glorifié va donner à son Église ce qu’il lui ordonne. Or, le mandat missionnaire comprend l’ordre d’enseigner « toutes les nations », et non seulement de faire des disciples « dans toutes les nations » ou « parmi toutes les nations ». Le mandat d’évangélisation ne concerne pas des individus seulement, mais des groupes de personnes appelés dans le texte « des nations ». A noter que le mandat ne concerne pas quelques nations seulement, mais « toutes les nations » (ce qui suggère une expansion considérable de l’Évangile, si toutes sortes de nations doivent en effet être enseignées dans la foi). En outre, il n’est pas seulement demandé de les évangéliser superficiellement, ou de s’en tenir à l’annonce de la doctrine libératrice de la justification par la foi seule, mais de leur « enseigner à observer tout ce que j’ai prescrit ». Il s’agit d’enseigner « à toutes les nations », non seulement la bonne nouvelle du salut, mais aussi à mettre en pratique, par ex., le contenu du sermon sur la montagne. Bien sûr, si « toutes les nations » sont ainsi enseignées dans tout le conseil de Dieu, il faut s’attendre à ce que le monde évolue très positivement par rapport à ce que nous connaissons.
    Le principe de « chrétienté », suivant lequel l’annonce de l’Évangile ne transforme pas seulement la vie des croyants, mais peut aussi bouleverser l’ordre politique d’une nation qui ferait alliance avec le christianisme pour faire de ses articles de vie et de foi le fondement de la vie de la nation, n’est pas étranger à la discussion. Le psaume 2 et Esaïe 49 prédisent un ordre nouveau (premièrement accompli au retour de l’exil babylonien, mais visiblement appelés à se répéter à l’époque néotestamentaire si l’on en croit l’usage de ces deux textes dans le NT) dans lequel les rois de la terre se soumettent à Dieu et à son Christ. C’est le devoir des princes de ce monde d’embrasser le Fils avant que sa colère ne s’embrase (une injonction qui n’a plus lieu après la parousie), et l’application du reste du psaume 2 à l’époque de l’Église naissante indique que cette injonction est valable pour l’époque de l’Église, jusqu’à aujourd’hui.
  3. Les paraboles du royaume, et notamment celles de l’ivraie et de la graine de moutarde. Le royaume est décrit dans plusieurs parabole comme devant croître. La perspective n’est pas celle d’un commencement prometteur, puis d’une longue stagnation, et finalement d’un parachèvement final radicalement distinct de ce qui l’a précédé. Les paraboles suggèrent plutôt un développement lent et graduel, imperceptible dans ses changements, quoique, avec le temps, il soit possible de mettre un nom sur ces différences. Cela suggère un temps long, marqué par un progrès graduel, bien qu’épisodiquement ralenti ou interrompu.
    Le texte seul suggèrerait plutôt une croissance quasi-linéaire. L’histoire de l’Église jusqu’à ce jour montre toutefois qu’il faut plutôt comprendre ce progrès comme étant tendanciel et non constant : il peut certainement y avoir non seulement des progrès spirituels au sein de l’histoire de l’humanité durant le millénium, mais aussi des reculs temporaires.
    De mon point de vue, notre 21e siècle est plutôt un siècle de recul massif, mais temporaire. De la décadence occidentale surgira un monde renouvelé, dans lequel le christianisme s’épanouira de nouveau dans de plus grandes proportions, d’une manière qu’il est difficile d’imaginer aujourd’hui, tant que cela n’aura pas lieu.
  4. La comparaison d’Apocalypse 12 et Apocalypse 20 établit sans détour que la période entre la première et la seconde venue n’est pas d’un seul tenant (comme le suppose l’amillénarisme), mais qu’il faut distinguer deux périodes : une période avant le millénium, et le millénium lui-même.
    En Apoc 20.2, Satan est décrit à l’aide de quatre expressions successives : (i) le dragon, (ii) le serpent d’autrefois, qui est (iii) le diable et (iv) Satan.
    En Apoc 12.9, Satan avait déjà était décrit de la même manière comme (i) le grand dragon, (ii) le serpent d’autrefois, celui qui est appelé (iii) le diable et (iv) Satan. En plus de ces noms, une autre indication est donnée : il est celui qui égare toute la terre habitée. Au chap. 12, Satan est jeté sur la terre, et son activité, après l’Ascension de Jésus-Christ, « consiste a égaré toute la terre habitée ».
    En revanche, en Apoc 20.3, la ligature du diable est spécialement mise en relation avec sa désormais incapacité à égarer les nations : l’ange possesseur de la clef de l’abîme le jeta dans l’abîme, qu’il ferma et scella au-dessus de lui, pour qu’il n’égare plus les nations jusqu’à ce que les mille ans soient achevés.Il y a donc un changement radical de situation : le même dragon, serpent, diable, Satan égare l’écoumène au chap. 12, mais au chap. 20 il n’égare plus les nations. Et cela a une conséquence dogmatique importante : sur un point, les prémillénaristes ont raison contre les amillénaristes – la situation décrite en Apocalypse 20 n’est pas la même que celle décrite en Apocalypse 12 (et en fait en Apocalypse 6 à 18). Apocalypse 6-18 décrit une époque durant laquelle le diable égare l’écoumène. Mais Apocalypse 19-22 décrit une phase de l’histoire du monde dans laquelle il ne peut plus égarer les nations (sauf dans l’interlude final que constitue l’épisode du rassemblement de Gog et Magog).

En bref, je dois donner raison aux prémillénaristes qui considèrent à juste titre que le millénium correspond à une autre époque que celle décrite au centre de l’apocalypse, à une époque ultérieure. C’est donc que le millénium commence après le ministère terrestre du Christ, et même après son ascension, puisqu’Apocalypse 12 décrit une période qui commence au moment où l’enfant est enlevé au ciel – lorsque le Christ monte donc au ciel, une période où le diable peut encore égarer toute la terre.

Voilà, chers amis, où j’en suis actuellement. Je me réjouis de l’opportunité d’en discuter avec vous, pour partager avec vous mes réflexions, et recevoir vos remarques et corrections fraternelles.

Je vous salue en Christ,

Pierre-Sovann


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La fin des temps – cours d’eschatologie

Pierre-Sovann Chauny

Pierre-Sovann est professeur de théologie systématique à la Faculté Jean Calvin, à Aix-en-Provence. Il s'intéresse particulièrement à la doctrine des alliances, à l'interprétation des textes eschatologiques, à la scolastique réformée, aux prolégomènes théologiques et aux bons vins. Il est un époux et un père heureux.

4 Commentaires

  1. Paulin Bédard

    Bonjour à l’équipe de Par la foi. Je viens de lire cet article: https://parlafoi.fr/2025/02/02/du-postmillenarisme-theopolitain-lettre-a-mm-blocher-et-denault/. J’aurais des questions dans le but de mieux comprendre.

    (A) Pierre-Sovann Chauny commence par dire qu’il y aurait trois périodes entre la première et la seconde venue du Christ: la période apostolique (30 à 70 ap. J.-C.), le millénium (ou temps de l’Église) et la période finale de crise.
    (B) Puis, quand il compare Apocalypse 12 et Apocalypse 20, il dit qu’il faut distinguer deux périodes: avant le millénium (où Satan égare toute la terre habitée, Apoc. 12; cette période serait décrite en Apoc. 6 à 18) et le millénium lui-même (où Satan est lié, incapable d’égarer les nations, Apoc. 20; cette période serait décrite en Apoc. 19 à 22). Il affirme ainsi que « le millénium correspond à une autre époque que celle décrite au centre de l’apocalypse, à une époque ultérieure ».
    (C) Enfin, il conclut en disant: « C’est donc que le millénium commence après le ministère terrestre du Christ, et même après son ascension, puisqu’Apocalypse 12 décrit une période qui commence au moment où l’enfant est enlevé au ciel – lorsque le Christ monte donc au ciel, une période où le diable peut encore égarer toute la terre. »

    Mes questions:
    1. Quand le millénium commence-t-il? Après l’an 70 (d’après A)? Quand Satan est lié décrite en Apoc. 19 à 22 (d’après B)? Ou après l’ascension du Christ, période où le diable peut encore égarer toute la terre (d’après C)?
    2. À quoi correspond la période où Satan peut encore égarer toute la terre? De l’an 30 à l’an 70 ap. J.-C.? (semble-t-il d’après A)? À une époque décrite au centre de l’Apocalypse (Apoc. 6 à 18), d’après B)? De l’ascension à une période indéterminée (d’après C)?
    3. À quoi correspond la période où Satan est lié? S’étend-elle à la période décrite en Apoc. 19 à 22 (d’après B)? Commence-t-elle en l’an 70 ap. J.-C. (d’après A)? Commence-t-elle plus tard dans l’histoire de l’Église? A-t-elle déjà commencé ou devons-nous l’attendre encore à l’avenir?
    4. En ce moment, sommes-nous dans le millénium? Oui (d’après A et C)? Il semble que non (d’après B)?
    5. Sommes-nous dans la période où le diable peut encore égarer toute la terre (Apoc. 6 à 18), ou dans la période où Satan ne peut plus égarer les nations (Apoc. 19 à 22)?
    6. Sur le plan de l’histoire de la rédemption, si nous sommes encore dans la période où Satan peut encore égarer toute la terre, quel acte rédempteur nouveau devons-nous attendre pour établir l’inauguration de la période où Satan ne pourra plus égarer les nations? Si par contre nous sommes déjà dans la période où Satan ne peut plus égarer toutes les nations, quel acte rédempteur nouveau a été accompli après l’ascension, la Pentecôte et la destruction du temple en l’an 70 pour inaugurer cette nouvelle période? Bref, qu’est-ce qui nous permet de dire que nous sommes passés (ou que nous serons passés) d’une période à l’autre? Pour le dire autrement, quelle fête manque-t-il au calendrier liturgique chrétien?

    Merci de m’éclairer, car j’avoue ne pas avoir compris…

    Paulin Bédard

    Réponse
  2. Pierre-Sovann Chauny

    Cher Paulin,

    Je distingue trois période entre l’Ascension et la Parousie :
    1. De l’Ascension à la destruction de Jérusalem. Il s’agit de la période racontée en partie dans le livre des Actes (de l’Ascension à 62), mais également, suivant ma lecture de l’Apocalypse à la suite de Jordan et Leithart, dans Apocalypse 6-19. Durant cette période, la nouvelle alliance a été inaugurée, mais l’ancienne alliance est encore là, quoique vieillie et en passe de disparaître. Satan est jeté sur la terre (Apoc 12) à peu près au moment où l’Esprit-Saint est donné à l’Eglise au moment de la Pentecôte. Il a durant cette période le pouvoir de liguer la terre contre le Christ et son Eglise, et c’est ce qui se passera à la fin de cette période, avec une coalition contre nature des Juifs et des Romains contre les chrétiens sur la période 63-70.
    2. Le millénium, qui commence avec la destruction de Jérusalem en 70, et qui couvre l’immense majorité de la période entre la première et la seconde venue. Le diable est durant cette période empêché de séduire les nations dans le sens de ce qui est décrit au milieu de l’apocalypse (chap. 6-19) : la coalition des nations, juifs et non-juifs, contre le Christ et son Eglise. Cela ne signifie pas que le diable ne peut pas empêcher la progression de l’Evangile localement, mais qu’il ne peut l’empêcher de progresser en tous lieux. Nous vivons donc dans ce millénium depuis 70, et cette période durera quasiment jusqu’au retour du Christ.
    3. Il y aura enfin une période à durée indéterminée, mais apparemment brève, à la fin de la période du millénium, durant laquelle le diable pourra de nouveau coaliser les nations contre le Christ et son Eglise, et ne se privera pas de le faire. Cela aura lieu durant les dernières années, ou peut-être seulement les derniers mois, de l’histoire humaine avant la parousie.

    Dans cette lecture de l’Apocalypse et cette compréhension de l’histoire entre les deux venues, c’est le rôle de la destruction du Temple comme terminaison de l’ancienne alliance qui est particulièrement souligné. Je ne sais pas si cela mériterait une fête liturgique de la destruction du Temple (mais pourquoi pas : la fête de la fin de l’ancienne alliance ?), mais il faut admettre que l’importance théologique de cet événement est sous-estimé dans de très nombreux milieux chrétiens.

    Je ne réponds pas à toutes vos questions ce soir. Je préfère vous laisser visionner la discussion amicale avec Pascal Denault et Henri Blocher disponible en ligne avant de répondre plus à vos questions si vous le souhaitez : https://www.youtube.com/watch?app=desktop&v=x91Jo53RLQ0&list=PLtdR9542LkZZbxw8W74mteOLRQp7w8pG5&index=1

    Je vous envoie mes chaleureuses salutations en Christ et en toute amitié réformée,

    Pierre-Sovann

    Réponse
  3. Paulin Bédard

    Cher Pierre-Sovann,

    Je viens de terminer d’écouter la discussion amicale que vous avez eue avec Henri Blocher et Pascal Denault. J’ai aussi lu votre réponse à mes questions. Merci beaucoup pour toutes ces explications. Je crois que c’est utile et bien présenté, et je comprends beaucoup mieux maintenant.

    Ces explications soulèvent toutefois en moi plusieurs questions et difficultés. Dans le but d’alimenter la réflexion et en toute amitié, j’aimerais vous en soumettre ici quelques-unes (numérotées de 1 à 14) :

    Concernant votre compréhension d’Apoc. 12:9 où Satan est décrit comme « celui qui séduit toute la terre habitée », vous dites ceci :
    « Ce dont il est question, spécialement pour Leithart, dans tout Apoc 12 à 19, c’est pas seulement que le diable séduit les nations en empêchant l’Évangile d’y aller, mais […] c’est spécialement une coalition… » (1:24:42 à 1:25:12).
    Q-1 : Voulez-vous dire que la période apostolique (30-70) est quand même caractérisée par (au moins) le fait que le diable a séduit les nations en empêchant l’Évangile de s’y propager?
    À la lumière du mandat missionnaire donné juste avant l’ascension (fondé sur « tout pouvoir » qui a été donné au Christ « dans le ciel et sur la terre »), puis à la lumière du NT en général et du travail missionnaire de Paul en particulier, j’aurais plutôt cru le contraire, c’est-à-dire que, dès la Pentecôte, il apparaît que le diable ne peut justement plus séduire les nations comme autrefois (dans ce sens relatif) et que l’Évangile a au contraire toute liberté de se répandre : aux Juifs d’abord, puis aux Grecs, « ils annonçaient la parole de Dieu avec assurance » (Ac 4:31); « la parole de Dieu se répandait » (Ac 6:7); « la parole du Seigneur se répandait et progressait » (Ac 12:24); « la parole du Seigneur se répandait dans le pays tout entier » (Ac 13:48); « c’est ainsi que, par la force du Seigneur, la parole se répandait efficacement » (Ac 19:20); « il prêchait le royaume de Dieu et enseignait ce qui concerne le Seigneur Jésus-Christ, en toute assurance et sans empêchement », et ce, jusqu’au cœur de Rome (Ac 28:31); et même cet Évangile « porte des fruits et fait des progrès dans le cosmos entier » (Col 1:6), et « a été prêché à toute créature sous le ciel » (Col 1:23). Comme c’est à l’oral, au milieu d’un échange libre, que vous avez prononcé cette phrase citée plus haut, et que vous vouliez souligner surtout la seconde partie de la phrase, je veux simplement m’assurer de vous avoir bien compris.

    Puis, dans la même phrase, dans la partie que vous vouliez souligner, vous continuez en disant : « … mais c’est spécialement une coalition de toutes les forces présentes susceptibles de s’opposer à l’Évangile qui s’oppose effectivement » (1:25:10 à 1:25:17).
    Q-2 : Où voit-on la notion de « coalition de toutes les forces présentes » dans Apoc 12?
    Q-3 : Si c’est une coalition de toutes les forces présentes, pourquoi, dans la réponse écrite que vous m’avez donnée ci-haut, limitez-vous ces forces présentes à « une coalition contre nature des Juifs et des Romains contre les chrétiens sur la période 63-70 »? Pourquoi ne pas inclure également une coalition avec d’autres peuples de cette époque susceptibles d’être rapidement rejoints par l’Évangile, que ce soient des peuples « barbares » variés annexés à l’Empire romain (comme les Juifs qui avaient été annexés) ou d’autres peuples ou royaumes qui étaient extérieurs à l’Empire romain (ex. : les régions des Parthes, des Mèdes, des Élamites, des Arabes, de Mésopotamie, mentionnées en Ac. 2:9-11, ou de l’Éthiopie, dont on voit un représentant en Ac 8:26-40, régions qui n’étaient pas si loin du point de départ de la mission à Jérusalem)?
    Q-4 : Le sens de « oikouménè » dans le NT exige-t-il de limiter ses contours au monde gréco-romain? Je conçois que ça peut être le cas dans certains passages, mais dans Matt 24:14, Luc 4:5, Ac 17:31, Rom 10:18 et Hé 2:5, le mot semble désigner un ensemble bien plus vaste, partout où l’Évangile devait être annoncé.

    Toujours à propos de cette « coalition entre Juifs et Romains », je pensais que les événements précédant et menant à la prise de Jérusalem, à la destruction du temple et à la prise de Massada étaient avant tout une guerre entre Juifs et Romains (Flavius Josèphe : « La Guerre des Juifs contre les Romains »).
    Q-5 : Pouvez-vous m’expliquer comment on peut établir sur le plan historique que ce conflit majeur opposant Juifs et Romains (la première des trois grandes révoltes des Juifs contre les Romains, en fait) était en réalité une coalition entre Juifs et Romains contre les chrétiens?

    Enfin, je ne comprends pas ce que vous voulez dire lorsque vous affirmez que cette coalition de toutes les forces présentes susceptibles de s’opposer à l’Évangile « s’oppose effectivement » à l’Évangile.
    Q-6 : Voulez-vous dire que cette coalition s’est opposée réellement à l’Évangile, mais sans nécessairement avoir eu le succès escompté, ou bien qu’elle s’est opposée efficacement à l’Évangile, empêchant réellement sa progression?
    Je veux bien reconnaître qu’il y a eu des oppositions multiples à l’annonce de l’Évangile durant la période apostolique (coalition ou pas), comme nous le voyons dans le livre des Actes ou dans des épîtres, et comme il y en a eu encore maintes fois après l’an 70, mais chaque fois, dans les Actes par exemple, ces oppositions ont été renversées et utilisées par le Seigneur pour que l’Évangile continue de progresser. Par exemple, la persécution des chrétiens de Jérusalem a forcé leur dispersion, ce qui a favorisé la propagation de l’Évangile vers d’autres territoires (Ac 8:1-4). L’arrestation de Paul lui a permis de se rendre jusqu’à Rome pour y annoncer le royaume « sans empêchement » (Ac 28:31). Même plus tard, vers la fin de sa vie, quand l’apôtre Paul souffrait pour l’Évangile jusqu’à être lié comme un malfaiteur, « la parole de Dieu n’est pas liée », a-t-il dit (2 Tim 2:2). Avec cette deuxième lettre à Timothée, nous ne sommes pas loin de l’an 70. La parole de l’Évangile était et demeure sans entrave! Je crois pouvoir affirmer avec foi et confiance qu’aucune coalition de quelque force ennemie que ce soit ne pouvait au temps apostolique ni ne peut encore aujourd’hui être une entrave à l’Évangile! Je crois que les textes plus clairs du NT devraient éclairer notre compréhension de textes moins clairs comme Apoc 12, et non l’inverse.

    J’ai aimé les interventions de M. Blocher à propos d’Apoc. 12:9 et Apoc. 20:1-6. Le millénium d’Apoc. 20 est effectivement décrit sous deux angles : terrestre (Satan est lié pendant mille ans afin qu’il ne séduise plus les nations) et céleste (les âmes de ceux qui étaient morts… revinrent à la vie et ils régnèrent avec Christ pendant mille ans). Sauf erreur, il semble bien que vos interventions ont porté essentiellement sur l’aspect terrestre, où vous avez comparé l’aspect terrestre d’Apoc 20 à l’aspect terrestre d’Apoc 12. Je ne sais pas pourquoi vous vous êtes limité à cet aspect. Par manque de temps, peut-être. Je serais intéressé d’en savoir davantage sur votre compréhension de l’aspect céleste de ce millénium.
    Q-7 : Si le millénium a effectivement commencé en l’an 70 (ou 73), quels bienfaits plus riches ce millénium a-t-il procuré aux chrétiens morts après l’an 70, comparés à ce que les chrétiens morts avant l’an 70 ont pu recevoir à leur décès (ex : Étienne, Jacques, les Thessaloniciens « endormis » de 1 Th 4, les attentes en tension de Paul en Phil 1:21-23, etc.)? Quels bienfaits supplémentaires les chrétiens morts après 70 ont-ils obtenu à leur mort en vertu de leur règne de mille ans avec le Christ qui n’existait présumément pas auparavant et qui venait supposément de commencer en 70?

    Je remarque qu’à l’instar d’Apoc 20, Apoc 12 parle aussi du règne du Christ, mais sous un angle différent, en déclarant son arrivée décisive, et ce, dans le contexte où le Christ venait de monter au ciel et que Satan venait d’être délogé du ciel : « Maintenant est arrivé le salut, ainsi que la puissance et le règne de notre Dieu, et l’autorité de son Christ » (Apoc 12:10). Cela nous rappelle Matthieu 28 où Jésus avait bien précisé à ses apôtres que toute autorité lui avait été donnée non seulement au ciel, mais également sur la terre.
    Q-8 : Comment comprenez-vous le rapport logique et théologique entre la dimension céleste et la dimension terrestre qui sont décrites côte à côte en Apoc 12? Autrement dit, comment est-il possible que l’arrivée du salut, de la puissance et du règne de notre Dieu et de l’autorité de son Christ ait été annoncée d’une voix forte venant du ciel (et donc entendue sur la terre, avec des conséquences terrestres qui s’en suivent), mais que le millénium, quant à lui, avec son incidence sur terre comme au ciel, n’aurait débuté qu’une quarantaine d’années plus?

    J’ai l’impression que si l’on établit bien ce rapport entre la dimension terrestre et la dimension céleste d’Apoc 12, cela pourrait en même temps donner un meilleur éclairage sur le lien étroit qui peut exister entre Apoc 12 et Apoc 20. Autrement dit, si Apoc 12 parle de la venue décisive du règne du Christ, mais sous un angle différent du règne des chrétiens avec le Christ pendant mille ans décrit en Apoc 20, on pourrait, je crois, mieux comprendre qu’Apoc 12 parle des mêmes réalités terrestres qu’Apoc 20, mais sous un angle également différent. Ce qui permettrait de mieux voir que les deux passages traitent de la même période, mais sous deux angles différents. La clé, toutefois, réside, me semble-t-il, à commencer la réflexion par le ciel et non par la terre.

    Q-9 : Pourquoi ne pas commencer la réflexion et même fonder entièrement la réflexion sur cette réalité nouvelle et décisive de l’arrivée du règne du Christ à son ascension pour éclairer ensuite ce qu’Apoc 12 nous dit sur les réalités terrestres? Cette nouvelle réalité glorieuse célébrée en Apoc 12, fondée sur des événements rédempteurs décisifs qui venaient de se produire au ciel, ne peut-elle pas jeter un meilleur éclairage sur le sens et la portée (relative) des actions mauvaises de Satan sur la terre?
    Il me semble que nos yeux devraient demeurer rivés sur le Christ au ciel, et non sur ce qui se passe visiblement sur la terre, et cela, afin de mieux saisir le sens spirituel de ce qui se passe sur la terre, mais aussi afin de mieux communiquer aux croyants en lutte sur terre une parole certaine d’encouragement et de persévérance. À mon humble avis, il me semble que cela nous éviterait de tomber dans de multiples spéculations d’ordre géopolitiques hypothétiques et improuvables. Après tout, quel est le but du livre de l’Apocalypse? N’est-ce pas de consoler et d’encourager les chrétiens au milieu de leurs épreuves et persécutions?

    Comme vous savez, il existe d’autres textes dans le NT qui décrivent les chrétiens comme étant déjà ressuscités spirituellement avec le Christ et comme régnant déjà spirituellement avec lui, et cela, pendant qu’ils vivaient encore sur terre entre 30 et 70 (par exemple, les chrétiens de Rome, Rom 5:17, d’Éphèse, Éph 2:6-7, et de Colosses, Col 2:12, Col 3:1-3).
    Q-10 : Comment expliquer que ces chrétiens ont pu, bien des années avant l’an 70, bénéficier richement de cette résurrection spirituelle et de ce règne spirituel avec le Christ pendant leur vie sur terre, alors que, s’ils sont morts avant l’an 70, leur résurrection spirituelle et leur règne spirituel avec le Christ au ciel auraient dû être reportés à plus tard, si toutefois l’on croit que le millénium a commencé seulement en l’an 70? Comment comprendre ce décalage entre le moment où les chrétiens ont déjà pu vivre et régner spirituellement avec le Christ sur la terre et le moment où les chrétiens ont pu, seulement plus tard, commencer à vivre et régner spirituellement avec le Christ au ciel?

    La même question se pose aussi à propos du règne du Christ lui-même.
    Q-11 : Si le Christ est entré dans son règne à son ascension, quand il s’est assis à la droite du Père, comment se fait-il que les bienfaits qui en découlent pour les chrétiens décédés n’aient commencé à être reçus qu’une quarantaine d’années plus tard? Qu’est-ce qui manquait au règne du Christ au ciel pendant ces 40 ans pour l’empêcher d’associer à son règne les chrétiens décédés?

    Je crois utile ici de mettre en contexte. Étant donné que j’ai le grand bonheur d’enseigner depuis de nombreuses années le Catéchisme de Heidelberg aux adultes comme aux jeunes, j’ai développé le réflexe (bon? mauvais?) d’associer étroitement les actes rédempteurs du Christ (conception, naissance, souffrance, mort, résurrection, ascension, session à la droite du Père, retour en gloire) aux bienfaits qui en découlent pour ceux qui sont unis à lui. Le Catéchisme est réputé pour son ton chaleureux et personnel, avec ses multiples questions du genre : « Quel profit te revient-il de…? » Dans ce contexte de responsabilité pastorale et catéchétique, je ne peux pas m’empêcher de me poser ce genre de question que je viens de soulever à propos des bienfaits qui découlent de son règne pour les chrétiens vivants et décédés. Je ne peux pas m’empêcher de noter, très étonné, que, si l’on croit que le millénium n’a commencé qu’en l’an 70, les bienfaits du règne du Christ, quant à eux, au moins pour les chrétiens décédés, sont déphasés de 40 ans par rapport au fait de l’entrée du Christ dans son règne. J’ai de la compassion pour les catéchètes de la période apostolique qui – si votre position est correcte – ont dû faire face à de grands défis pour expliquer la chose à leurs catéchumènes ébahis (et peut-être craintifs à l’idée de mourir avant l’arrivée du millénium, dont ils ne pouvaient qu’ignorer, eux, la future date d’inauguration)… Je vois ces catéchumènes lever la main et je les entends poser la question : « Notre Seigneur a promis au vainqueur de le faire asseoir avec lui sur son trône, comme lui a vaincu et s’est assis avec son Père sur son trône (Apoc 3:21), mais, si nous mourons aujourd’hui, quand allons-nous pouvoir enfin régner avec le Christ au ciel? »

    Un dernier point. Le NT contient des marqueurs de temps eschatologiques bien connus : D’une part, les expressions « le dernier jour » (Jn 6:39-40,44,54; 11:24; 12:48) ou « les derniers temps » (1 Pi 1:5) désignent le moment du retour du Christ (résurrection corporelle, jugement dernier, salut final pleinement révélé). D’autre part, les expressions semblables « les derniers jours » (Ac 2:12; Hé 1:2; Jc 5:3; 2 Pi 3:3; Jude 1:18), « la fin des temps » (1 Pi 1:20), « les derniers temps » (1 Tm 4:1), « les temps accomplis » (Ga 4:4; Ép 1:10) et « l’heure dernière » (1 Jn 2:17) désignent aussi la période qui a commencé avec la première venue du Christ et qui s’est poursuivie durant la période apostolique. On pourrait de la même façon relever des passages qui annoncent l’arrivée « déjà » inaugurée du royaume de Dieu par la venue même du Roi (« eschatologie réalisée »), et sa consommation future « pas encore », attendue au moment du retour en gloire du Roi. Or, si je comprends bien, le millénium, dans la perspective biblique, a sans doute une profonde signification eschatologique et est sans doute en lien étroit avec le royaume de Dieu.
    Q-12 : Dans la perspective où le millénium aurait commencé seulement vers l’an 70, comment comprendre alors que le début du millénium ne coïncide pas avec le début des « derniers temps » et l’arrivée du Roi et du royaume? Comment comprendre que les contours du millénium (au moins son début) ne cadrent pas avec la structure eschatologique du NT?

    À la fin des siècles, le péché (ce qui donne de la force au diable) a déjà été définitivement aboli une fois pour toutes par le sacrifice du Christ à la croix (Hé 9:26). Celui qui « a paru une seule fois » pour abolir le péché et qui « s’est offert une seule fois » pour porter les péchés d’un grand nombre, apparaîtra « une seconde fois » (deux temps forts) pour ceux qui l’attendent en vue de leur salut (Hé 9:28). Le dernier Adam était déjà ressuscité à Pâques pour inaugurer la nouvelle création et devenir « un esprit vivifiant » (1 Co 15:45). Le Christ ressuscité était déjà les prémices annonçant et garantissant la grande récolte de la résurrection à venir (1 Co 15:20-23). Le Messie était déjà entré dans son règne à l’ascension. Les chrétiens pouvaient déjà, dans cette vie de misère et de corruption, être ressuscités avec lui et être assis avec lui au ciel (Ép 2:6). Ils pouvaient être assurés que leur Seigneur, désormais assis à la droite du Père dans les lieux célestes, pouvait non seulement déployer « la grandeur surabondante de sa puissance envers nous qui croyons selon l’action souveraine de sa force », mais qu’il était également placé « au-dessus de toute principauté, autorité, puissance, souveraineté [j’ajouterais : coalition], au-dessus de tout nom qui peut se nommer, non seulement dans le siècle présent, mais encore dans le siècle à venir » (encore deux temps forts, Ép 1:19-22). Notre souverain Sacrificateur avait déjà traversé les cieux pour que nous puissions nous approcher du trône de la grâce avec assurance et y trouver et grâce compassion (Hé 4:14-16). Ce souverain Sacrificateur s’était déjà définitivement assis à la droite du trône de la majesté divine dans les cieux afin d’instaurer la nouvelle alliance et d’être ministre du véritable sanctuaire céleste, ayant « maintenant » (un autre mot eschatologique important dans le NT) obtenu un ministère d’autant supérieur qu’il était devenu médiateur d’une alliance meilleure (Hé 8:1-2,6). Les ombres des choses à venir avaient laissé place à la réalité du Christ (Col 2:17). Le début du siècle à venir avait déjà commencé dans le présent par la puissance du Saint-Esprit déversé à la Pentecôte. La nouvelle création avait déjà surgi dans l’ancienne (2 Co 5:17), le Christ avait déjà établi l’ordre nouveau à sa première venue en attendant sa consommation finale. Au milieu de la tribulation, de l’angoisse, de la persécution, de la faim, du dénuement, du péril ou de l’épée, rien ne pouvait séparer les chrétiens de l’amour du Christ, et même que « dans toutes ces choses » atroces, ces chrétiens étaient déjà « plus que vainqueurs » par celui qui les avait aimés (Rom 8:35-37). Et je pourrais continuer encore longuement la litanie de tout ce que le début des derniers temps, proclamé par les apôtres, avait apporté. C’est ce que j’appellerais une « eschatologie réalisée optimiste », optimiste non à cause de ce que nos yeux charnels pourraient ou espéreraient détecter, mais optimiste grâce aux yeux de la foi, car « la victoire qui triomphe du monde, c’est notre foi » (1 Jn 5:4).

    Et pourtant, le millénium, dites-vous, n’avait pas encore commencé. Je ne comprends pas. Puis-je me permettre, en tout respect : je vous trouve bien pessimiste par rapport à la période apostolique…
    Q-13 : Au fond, qu’est-ce que l’arrivée du millénium, en l’an 70, aurait réellement ajouté à toute l’immense richesse que les chrétiens de la période apostolique possédaient déjà en Jésus-Christ? Qu’est-ce qui manquait tant à ces chrétiens que le millénium serait plus tard venu combler? Et enfin :
    Q-14 : Où trouve-t-on, dans tout le NT, l’attente fébrile, dans une espérance vivante et joyeuse, de la venue du millénium?

    Je conçois bien que mon intervention est longue et mes questions nombreuses, pouvant exiger temps et réflexion. Je me m’attends pas à une réponse immédiate ni complète. Je ne souhaite pas non plus entrer plus avant en débat. Je présente simplement mes questions et commentaires dans le but de stimuler la réflexion. Vous en faites ce que vous voulez, selon le temps, l’énergie et la volonté que vous aurez.

    Je vous remercie simplement d’avoir été patient à me lire et de considérer mes questions et commentaires.

    En toute amitié en Jésus-Christ,

    Paulin Bédard

    Réponse
    • Maxime Georgel

      Bonnes questions ! Hâte de voir ce que PSC en dit !

      Réponse

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  1. Regards croisés sur le millénium [#CoramDeo 363] – Un Héraut dans le net - […] et le professeur Chauny, quant à lui, défend depuis peu une compréhension postmillénariste(https://parlafoi.fr/2025/02/02/du-postmillenarisme-theopolitain-lettre-a-mm-blocher-et-denault/). Nous comparerons ces deux conceptions afin…

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