Holger Lahayne est un théologien et missionnaire allemand, catéchète de la paroisse réformée de Vilnius (Lituanie) ; il enseigne aussi dans un institut biblique. Cet article est paru en mai 2017 sur le site de l’association des étudiants chrétiens de Lituanie.
Martin Luther ne fut pas seulement l’initiateur de la Réforme ; il est aussi considéré comme le plus prolixe des réformateurs. Ses œuvres complètes (la fameuse Weimarer Ausgabe) ne comportent pas moins de 127 tomes, environ 80 000 pages et occupent quelques mètres linéaires dans une bibliothèque. Les œuvres de Calvin (plus de 60 tomes !) n’atteignent qu’à peine la moitié de ce volume.
En traduisant la Bible, Luther a profondément influencé la langue allemande, dont il a forgé bon nombre de néologismes. Bien des pensées ou des citations de Luther sont aussi devenues proverbiales. Tous les réformateurs maîtrisaient bien le latin et ne manquaient pas de talent littéraire ; mais Luther avait aussi pour lui d’écrire clairement, intelligiblement, avec suggestion et souvent avec mordant. S’il nous fallait ne retenir qu’une phrase en particulier au sein de ce corpus abondant et riche en couleurs, laquelle serait-ce ?
La publication des quatre-vingt-quinze thèses, le 31 octobre 1517, fut l’étincelle qui embrasa la Réforme. Mais les thèses ne reflètaient pas encore la doctrine protestante en gestation ; au plan théologique, l’Église romaine d’alors aurait eu du mal à trouver quoi que ce soit à y reprocher. Même la première thèse (« En disant : Repentez-vous, notre Maître et Seigneur Jésus-Christ a voulu que la vie entière des fidèles fût une pénitence. ») ne saurait constituer la devise de la Réforme. Cette thèse est certes juste, mais elle est commune au christianisme tout entier, et ne dut pas poser problème à Rome à l’époque.
Vingt ans plus tard, dans les articles de Smalkalde, Luther parle déjà comme un réformateur mûr. Au début de la deuxième partie, il précise que seule la foi sauve, sans le secours des œuvres de la Loi ou des mérites humains, et ajoute : « De cet article dépend tout ce que nous enseignons et pratiquons contre le pape, le diable et le monde. C’est pourquoi nous devons en être fort assurés et n’avoir aucun doute à son sujet. Sinon, tout est perdu, et le pape et le diable, et tout ce qui s’oppose sera victorieux et aura raison. »
Luther avait souvent le sens de la formule, comme dans le Grand catéchisme : « Ce à quoi, dis-je, tu attaches ton cœur et t’adonnes, c’est là ton dieu. » Il a beaucoup écrit notamment sur la foi : « L’œuvre la plus grande et la plus noble est la foi en Christ… Cette œuvre contient toutes les autres. » (Des bonnes œuvres) Luther aimait les généralisations et les récapitulations, particulièrement dans ses Propos de table : « Trois choses maintiennent l’Église de Dieu et lui reviennent : la fidélité dans l’enseignement, le zèle dans la prière et la patience dans la souffrance » ; « La Loi est ce que nous devons faire, tandis que l’Évangile parle de Dieu, de ce que Dieu veut nous donner. » Le réformateur n’avait pas peur des propos acerbes : « Le “libre arbitre” n’est rien d’autre que l’esclave du péché, de la mort et de Satan. Une telle “liberté” n’est pas du tout la liberté. » (Du serf-arbitre) Et une pensée qui est restée d’actualité jusqu’à aujourd’hui : « Le monde et les masses ne sont pas et ne seront jamais chrétiens, même si les gens sont baptisés et qu’on les appelle chrétiens. »
Bien qu’on associe souvent la Réforme à l’aube de la modernité, Luther était plutôt un homme du Moyen Âge. Certes, il sait parfois s’affranchir nettement des limites de la pensée de cette époque, et fait un bon en avant, lorsqu’il met par exemple en avant la liberté de conscience. L’idée de la liberté de conscience (« il n’est ni sûr, ni honnête d’agir contre sa propre conscience »), exprimée à la diète de Worms de 1521, couronne le discours de Luther ; il la développe et la complète quelques années après dans son traité Du pouvoir civil : « Lorsque le pouvoir civil ose commander à l’âme, il s’ingère dans le pouvoir divin, corrompt vraiment et perd les âmes… »
Que ne trouverions pas chez Luther ! Nous sommes étonnés par la variété de son style. Il a un goût plaisant pour les paradoxes, comme ici au début du traité De la liberté du chrétien : « Un chrétien est un libre seigneur de toutes choses et il n’est soumis à personne. Un chrétien est un serf corvéable en toutes choses et il est soumis à tout le monde. » Ailleurs il affirme : « Plus l’Évangile nous est précieux, plus nous devons surveiller notre langue. »
Luther était célèbre aussi pour son grand sens de l’humour et de l’autodérision. Il ne s’enorgueillissait jamais et ne se considérait pas trop sérieusement (alors que parmi les autres réformateurs, certains avaient une haute opinion d’eux-mêmes). De son vivant, il a vu un certain culte de sa personnalité s’affirmer, ce qui l’inquiétait fortement, et qu’il n’hésitait pas à attaquer : « Pauvre de moi, qui ne suis rien qu’un vulgaire tas d’asticots, pourquoi faudrait-il qu’on nommât les enfants de Christ de mon nom de pécheur ? » Il faut croire qu’il se serait fermement opposé à ce qu’on appelât des Églises luthériennes. Il n’est pas non plus difficile de s’imaginer quelle aurait été son opinion des monuments à son effigie qui ont fleuri au XIXe siècle : rien qu’en Allemagne, des centaines de bustes et de sculptures virent le jour, montrant le réformateur sous une pose héroïque (ce ne fut pas tant pour des raisons théologiques que la glorification de Luther fut encouragée en Allemagne, mais en raison de l’éveil des nations et du nationalisme allemand).
Le point de vue sobre de Luther sur son métier, sur le clergé et les théologiens est aussi plaisant. Dans la préface au Grand catéchisme, il recommande à « tous les pasteurs et ministres du saint Évangile qu’ils se gardent de vouloir être trop tôt des docteurs et de s’imaginer tout savoir […]. Ces chrétiens feraient donc bien de s’exercer tous les jours sans se lasser jamais , en se défendant du venin de la fausse assurance et de l’orgueil spirituel. » Dès 1520, dans son œuvre importante À la noblesse chrétienne de la nation allemande, il insistait sur le sacerdoce universel des croyants : « Tous les chrétiens appartiennent vraiment à l’état ecclésiastique, il n’existe entre eux aucune différence, si ce n’est celle de la fonction. »
Une des grandes découvertes de Luther fut sa prise de conscience qu’une vie agréable à Dieu et vécue à sa gloire était possible dans n’importe quel métier. Il n’y a pas que le clergé qui sert Dieu. « Un savetier, un forgeron, un paysan ont chacun la tâche et la fonction de leur métier et pourtant tous sont également consacrés prêtres et évêques, et chacun doit, en remplissant sa tâche ou sa fonction se rendre utile et secourable afin que, de la sorte, ces tâches multiples concourent à un but commun, pour le plus grand bien de l’âme et du corps, tout comme les membres du corps se rendent mutuellement service », écrit le réformateur (ibid.).
Il est indispensable, dans ce contexte, de citer aussi cette citation éloquente d’un sermon sur Jn 21, 19-24 : « Une servante pieuse qui obéit au comandement de son maître, balaie sa cour ou nettoie une étable, ou un employé labourant et charriant assidûment sont tous deux sur la bonne voie et vont droit au ciel ; mais celui qui prie saint Jacques, va à l’église mais délaisse sa tâche, ne fait pas son travail, celui-là va droit en enfer. »
L’amour de Dieu et des hommes
Il y a donc vraiment beaucoup de phrases dignes d’être connues dans les écrits du réformateur. Quelle est alors celle que je préfère (et mon choix est évidemment tout subjectif) ? Eh bien, ce n’est pas sa phrase fameuse sur le pommier (« Même si je vais que la fin du monde était pour demain, je planterais quand même aujourd’hui un pommier. »). D’ailleurs, cette citation n’est même pas de Luther, mais n’est probablement apparue que dans le dernier quart du XXe siècle.
Parmi mes favoris, je rangerais assurément l’explication du troisième article du symbole, dans le Petit catéchisme : « Je crois que je ne puis, par ma propre raison, ni par mes propres forces, croire en Jésus-Christ, mon Seigneur, ni venir à lui ; mais que le Saint-Esprit m’a appelé par la voix de l’Évangile, qu’il m’a éclairé de ses dons, qu’il m’a sanctifié et me conserve dans la vraie foi. » Je crois que je ne peux pas croire… on ne peut pas le dire avec plus de génie !
Mais la phrase de Luther que je trouve la plus belle de toutes se situe dans le premier ouvrage du réformateur, datant du printemps 1518. À cette époque, le moine avait déjà élaboré sa théologie et l’avait exposée pour la première fois lors de la dispute de Heidelberg. Comme Luther appartenait aux Augustins, la direction de l’ordre l’invita à une dispute publique chez l’électeur du Palatinat. Le 26 avril, il présenta ses positions en quarante thèses expliquées (vingt-huit thèses théologiques et douze thèses philosophiques). La dispute n’eut pas lieu dans un monastère, mais à l’université (Schola artistarum, faculté des arts libéraux).
On peut distinguer quatre parties dans les thèses de la dispute de Heidelberg. Les douze premières thèses parlent des bonnes œuvres. Luther commence par affirmer que « la loi de Dieu, l’art de vivre le plus salutaire soit-il ne peut amener l’homme au salut. » (I) La Loi est bonne et désirée par Dieu, mais elle n’est pas l’Évangile ; après la Chute, les bonnes œuvres ne sauvent pas, car « elles reluisent extérieurement, mais sont pourries au dedans » (III, commentaire).
De la treizième à la dix-huitième thèse, Luther examine le libre-arbitre. Est-il possible de participer à son salut par des décisions de notre propre chef ? Non, car la volonté est « prisonnière et esclave du péché. Ce n’est pas qu’elle n’est rien, c’est qu’elle n’est libre que pour le mal ! » (XIII) La volonté est prisonnière des griffes du mal. L’homme, même « en faisant tout ce qu’il peut », en tâchant de toutes ses forces et en essayant d’obtenir son salut, n’édifie en fin de compte qu’un « péché mortel ». Luther commente ainsi la thèse XVII : « On ne peut désirer la grâce que lorsqu’on comprend le péché. Quand un malade comprend que sa maladie est terrible, alors il commence à désirer le remède. » La dernière de ces thèses résume cette partie : « En vérité, l’homme doit d’abord être déçu de lui-même pour être prêt à recevoir la grâce de Christ. » (XVIII)
Dans les thèses suivantes, Luther confronte le « théologien de la gloire » au « théologien de la croix ». Le théologien véridique (non seulement les professionnels de la discipline, mais tout chrétien s’occupant de théologie) est seulement celui « qui conçoit Dieu visible au monde en tant qu’il s’est rendu visible par la souffrance et la croix » (XX). C’est en Jésus-Christ crucifié que Dieu veut être reconnu. Luther commente : « Il ne suffit à personne de connaître Dieu dans sa grandeur et dans sa gloire, mais de l’ignorer dans l’humiliation et la honte de sa croix. »
Luther nous avertit de ne pas nous perdre dans les mystères de Dieu : ceux qui nous ont été révélés nous suffisent, et la croix en est le sommet. À la croix, Dieu, bien que « caché dans sa souffrance », nous est tout de même visible et révélé. Nous ne devrions pas méditer sur Dieu à partir de mystères invisibles qui nous sont dissimulés, mais le chercher et le connaître précisément là où il se révèle.
La thèse XXV permet au réformateur d’avancer vers la conclusion : « Ce n’est pas celui qui fait beaucoup d’œuvres qui est justifié, mais celui qui croit beaucoup en Christ. » La justice de Dieu ne se gagne pas par les œuvres, mais « s’obtient par le don de la foi ». « Il ne s’agit pas de dire que le juste ne fasse pas d’œuvres, mais que ses œuvres ne lui assurent pas la justification. C’est au contraire sa justification qui produit des œuvres. » Et à la thèse XXVI, Luther présente une belle conclusion : « La Loi dit : “Fais cela !”, et rien ne se passe. La grâce dit : “Tu dois croire en lui !” car tout est déjà accompli. »
Et nous arrivons ainsi à la dernière des thèses théologiques. La voici en langue originale (en latin) :
Avec cette affirmation, Luther saisit la racine profonde de l’Évangile, l’amour de Dieu. La grande différence entre le vrai Évangile et les faux évangiles que répandent d’autres religions, ou des mouvements qui se donnent faussement le nom de chrétiens, c’est le fondement que nous donnons à l’amour de Dieu. Pour le dire plus simplement, c’est la réponse à cette question : pourquoi Dieu nous aime ? Les faux évangiles essaient de trouver quelque chose d’aimable en l’homme (de bonnes œuvres, des rites religieux, l’appartenance à tel ou tel groupe, le libre-arbitre, des vertus, son intelligence, sa dignité d’homme) qui provoquerait et justifierait l’amour de Dieu pour les hommes.
Mais malheureusement, il n’y a absolument rien en nous sur quoi bâtir le fondement de notre salut. Tout est empoisonné par le péché ; se sauver nous-mêmes n’est pas possible. Dieu ne se dit pas : « Oui, les hommes sont vraiment des ratés. Mais regardons tout de même, peut-être qu’ils arriveront à me satisfaire et à se rendre dignes de mon amour. Je ne suis pas trop sévère, je vais les aider, je n’ai pas besoin de beaucoup : juste un peu d’efforts, au moins dans la foi. Si ils collaborent avec moi, s’ils m’aiment et croient en moi, alors je les aimerai. » S’il en était ainsi, on ne parviendrait à rien. Nous n’avons rien à échanger avec Dieu. De nous-mêmes, nous n’arrivons même pas à croire.
L’amour du Dieu que prêche le vrai Évangile vient de lui-même, de son intimité (ne serait-ce que parce qu’il est trine !) ; l’amour de Dieu semble s’épancher dans les hommes, qu’il aime de manière absolument imméritée. Dans les hommes, Dieu ne cherche rien d’agréable ni d’attrayant. Il « aime ce qui est peccamineux, défectueux, stupide et faible, pour rendre tout cela juste, bon, sage et fort », écrit Luther dans son commentaire de cette thèse. Dieu justifie l’homme par grâce, gratuitement, et lui crée une nouvelle vie : la repentance et la foi sont les premiers signes de cette nouvelle vie. Dieu nous rend tout d’un coup dignes de son amour, sans aucune ingérence de notre part.
Dieu est à la fois rédempteur et créateur. Le monde a été créé à partir de rien, et le salut est créé de nouveau à partir de rien. Le salut n’est pas une appendice que Dieu rajoute à nos efforts (même quand ceux-ci n’en constitueraient qu’à peine un pourcent, et que Dieu fournirait tout le reste). Dieu agrée les pécheurs, mais ne les laisse pas dans l’état où ils sont. Il nous aime afin de créer en nous, dit Luther, « justice, bonté, sagesse et force ».
Le réformateur revient ici à sa première thèse au sujet de la Loi ; on revient de l’amour de Dieu à la loi de Dieu. Le but du salut est que nous soyons à l’image du fils de Dieu, qui obéit parfaitement à la Loi, laquelle exprime le comportement parfait de Dieu. Sans la théologie de la croix, l’homme abuse de la « meilleure des choses » qu’est la Loi (thèse XXIV). Mais quand il est « délivré de l’orgueil », il sait alors que « Dieu fait et crée tout en lui », et lui obéit alors librement, mû par la gratitude (commentaire de la thèse XXIV). Commentant la thèse XXVII, il dit : « Quand Christ vient habiter en nous par la foi seule, il se met à nous inciter à agir, en faisant confiance à ce qu’il accomplit. Car ce sont ces œuvres-là, qu’il accomplit lui-même, qui accomplissent les commandements de Dieu, et qui nous sont accordés par la foi. Si nous les contemplons, nous ressentirons le désir de faire de même. »
Dans notre phrase latine, le verbe est creat : Dieu crée. Pour décrire cette opération dans un contexte sotériologique, la Bible recourt à différentes métaphores : « Je vous donnerai un cœur nouveau et je mettrai en vous un esprit nouveau ; j’ôterai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair. » (Éz 36,26). C’est une opération radicale ! Elle est absolument nécessaire, car Dieu hait le péché (Hé 1,9 ; Ap 2,6). Mais ce n’est là que la moitié de la vérité, malheureusement : Dieu hait aussi celui qui commet le péché (Ps 5,6 ; 11,5 et ailleurs ; D. A. Carson dénombre pas moins de quatorze occurrences de cette idée dans les cinquante premiers psaumes ! Voir aussi Lv 20,23) c’est pourquoi « la colère de Dieu demeure » sur eux (Jn 3,36).
Dieu merci, cela ne s’arrête pas là ! « Cet amour consiste non pas en ce que nous avons aimé Dieu, mais en ce qu’il nous a aimés et qu’il a envoyé son Fils comme victime expiatoire pour nos péchés. » (1 Jn 4,10) Après la Chute, l’homme est complètement incapable d’aimer Dieu « de tout son cœur, de toute son âme et de toute sa pensée » (Mt 22,37). En revanche, Dieu nous a aimés « lorsque nous étions encore pécheurs » (Rm 5,8). Dieu hait et aime les pécheurs en même temps. Il ne peut en être autrement. Sa justice et sa sainteté parfaites exigent l’une chose, son amour parfait exige l’autre.
Jean Calvin (IRC II.16.4) cite Augustin : Dieu « nous a aimés avant la fondation du monde ». Le père de l’Église se fonde sur Rm 5,8 pour affirmer que Dieu « nous couvait de son amour même lorsque nous vivions en rébellion contre lui… Il accomplissait ainsi un miracle divin, nous haïssant et nous aimant d’un même mouvement. »
Nous ne sommes pas capables de nous imaginer comment concilier ces deux actes : dans nos relations humaines, amour et haine s’opposent l’une à l’autre. Si nous édifions notre théologie « par le bas », que nous contemplons cela de notre perspective humaine limitée et que nous parlons de Dieu à partir de notre expérience, alors il doit se conformer à nos exigences. Une telle théologie dicte à Dieu comment il doit être, comment il doit se comporter et de quelle manière il doit montrer son amour. L’argile serait alors maître du potier (Rm 9,21).
La bonne théologie vient « d’en haut ». Dieu a dû se révéler, nous montrer qui il est et comment il se comporte avec nous. Un Dieu qui hait et qui aime n’est pas et ne peut être le produit de notre imagination, on le connaît par la révélation. La bonne nouvelle est que Dieu est différent ; et son amour est différent de celui des hommes. Nous voyons cet amour en Jésus crucifié. La colère de Dieu, sa haine du péché, dont nous devions être la cible, s’est déchaînée sur son Fils, c’est-à-dire sur Dieu lui-même. C’est de cette manière que Dieu a concilié sainteté, justice et amour. On peut donc répéter avec Luther ce qui pourrait devenir un sola protestant de plus : crux sola est nostra theologia, « la croix seule est notre théologie ». C’est encore une des belles affirmations du réformateur, et de la Réforme tout entière.
On notera que cette phrase de la dispute de Heidelberg est une paraphrase d’une idée semblable de Thomas d’Aquin ! (Somme théologique, 1.9.20, a. 2) [note du traducteur].
Illustration : Laurits Andersen Ring, Le potier Herman Kähler dans son atelier, huile sur toile, 1890 (musée d’art de Randers).
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