Cet article est le premier d’une série de courts articles qui vise à donner des pistes de compréhension du langage baptismal chez les pères et les liturgies antiques.
Extrait de Baptism and Regeneration, James Packer, 2013 :
« Dans le Nouveau Testament, « régénération » et « nouvelle naissance » ne sont pas des termes techniques (c’est-à-dire des mots ayant une signification précise, définis positivement, négativement et globalement) dans la mesure où, par exemple, le langage de la justification devient chez Paul un langage technique. Il s’agit plutôt de paraboles picturales, illustrant par analogie des thèmes comme le fait une grande partie des paroles utilisées par Jésus dans son enseignement. Ce sont des termes qui n’ont pas d’arêtes conceptuelles tranchantes et qui ne s’intègrent pas précisément dans un système de pensée donné ; ce sont plutôt des images panoramiques complètes d’une vie remodelée, radicales dans leur élan mais non spécifiques dans les détails. Paul n’utilise le mot « régénération » qu’une seule fois, lorsqu’il parle du « bain de la régénération » en Tite 3,5, et il n’utilise pas du tout le langage de la « nouvelle naissance ». Jésus ne parla apparemment de la nouvelle naissance qu’une seule fois, puis de façon énigmatique, pour faire prendre conscience à Nicodème le théologien pharisaïque qu’il ne savait pas tout ce qu’il devait savoir (Jean 3:3-8). Alors que la première lettre de Jean donne un aperçu de ce que les gens nés de Dieu croient et de leur comportement, et que Jacques et Pierre notent que c’est par la parole de la vérité de l’Evangile que Dieu opère le changement (Jacques 1:18 ; 1 Pierre 1:23-24), aucun de ces passages ne décrit sa nature exacte. Et là-dessus, en fait, il y a dans la tradition chrétienne en général et, ce qui est le plus frappant dans l’anglicanisme, deux types d’opinions.
Le premier type voit cette imagerie de régénération/nouvelle naissance/nouveau-né de Dieu comme symbolisant et illustrant un changement relationnel : ce n’est pas une première implantation de vie en aucun sens, pas plus que la naissance naturelle n’implante la vie chez les enfants qui depuis neuf mois ont grandi dans l’utérus ; mais la réorganisation totale des attitudes et actions que le remplacement de la centralité de soi par la centralité du Christ implique, à la façon des nouveaux nés qui doivent s’ajuster à leur nouvel environnement hors du sein, ou des nouveaux mariés qui doivent s’adapter entre eux. Les théologiens pionniers de l’Eglise des deuxième et troisième siècles (que, par ailleurs, les anglicans désirent suivre) ont pensé la question de cette manière et ont appelé le baptême « régénération » – ce qui signifie que le baptême conduit à un mode de vie nouveau et plus riche, qui prend corps et forme vers Dieu et vers les hommes par la participation à la mort du Christ et par la résurrection du Saint Esprit à travers une foi personnelle. C’est le type de compréhension que révèle le quintuple fruit de la régénération de l’article 27 (note : de la Confession des églises anglicanes), et que les livres de prières anglicans reflètent lorsqu’ils parlent de ceux qui ont reçu le baptême de la bonne manière (c’est-à-dire, en toute foi) comme régénérés maintenant. La régénération est ici conçue comme un processus dynamique, qui change la vie dans et par le Christ, décisif dans sa phase initiale et qui progresse vers la perfection par ce que l’Eglise appelle la sanctification et le Nouveau Testament la croissance. »
Ce commentaire de James Packer est intéressant à deux égards :
- Selon lui, la Bible est plus souple dans son usage du terme régénération que ne l’est la théologie réformée. Cela n’est pas pour dire que la théologie réformée se trompe, mais qu’il convient d’y être sensible lors de notre lecture de la Bible. Le langage théologique s’éloigne parfois volontairement du langage biblique afin, par sa technicité, d’éviter toute ambiguïté. Mais il faut le reconnaître afin de ne pas lire les textes d’une façon trop étroite.
- Toujours selon cette analyse, c’est ainsi que les pères des premiers siècles parlaient de régénération par le baptême. Il ne s’agit pas de régénération baptismale au sens moderne du terme : il n’y a pas d’habitus changé dans le baptisé ni d’infusion d’une grâce particulière mais un changement relationnel, légal, qui invite la personne à une nouvelle vie.
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