Du nom יהוה – Turretin (3.4)
21 juin 2022

Le nom divin est-il si particulier à Dieu qu’il ne peut être communiqué à aucun autre ? Contre les sociniens nous l’affirmons.

Nous retrouvons ici quelque chose de semblable à la question 13 de la Summa Ia, mais adapté aux débats du XVIIe siècle. Quand nous utilisons certains noms pour désigner la Divinité, qu’il s’agisse de « Dieu », « Seigneur », etc., qu’est-ce que cela veut dire? Sommes nous vraiment en train de le décrire?

Dans le cadre de cette question, Turretin se concentre cependant sur le nom « Yahvé » ou « Jéhovah » (יְהֹוָה‎) comme l’écrivent volontiers les anciens.

Formulation de la question (§§ 2-3)

Les sociniens soutenaient que יהוה n’était pas un nom particulier de Dieu : il pouvait être attribué à d’autres que Dieu, que ce soit des anges, ou le christ en tant qu’ambassadeur de Dieu. Ainsi, si Paul appelle Jésus Seigneur, cela ne signifie pas pour autant que Jésus est Dieu. Voilà l’essentiel de la thèse socinienne, qui permet de réfuter la divinité de Christ.

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Socini, précurseur des libéraux protestants, anti-trinitaire.

Contre cela, les orthodoxes (ceux qui adhèrent aux confessions de foi protestantes) affirment que le nom יהוה appartient à Dieu seul, et n’est communiqué à aucun autre.

Argumentation (§§4-6)

Premier argument : Dieu affirme que son nom lui est propre : Je suis l’Éternel, c’est là mon nom ; et je ne donnerai pas ma gloire à un autre, ni mon honneur aux idoles. (Ésaïe 42,8 ; cf aussi 48,11 et Amos 5,8 et 9,6)

Deuxième argument : L’étymologie et la signification du nom tend à le considérer comme inapplicable à une créature.

  • En effet dans ce « Je suis celui qui est » (Exode 3,14) il se désigne comme l’Être avec un grand E. Cela s’accorde avec la parole de Jean dans l’Apocalypse celui qui est, qui était, et qui vient (Apocalypse 1,4) qui fait le parallèle avec une formule liturgique païenne de son temps: Zeus était, Zeus est, Zeus sera, ô grand Zeus.
  • Il implique qu’il est la cause première, puisqu’il contient en lui toutes les sortes d’êtres.
  • Il implique l’immuabilité [= il ne change pas] et la fidélité de ses promesses.

Troisième argument : C’est un nom écrit au singulier, et qui n’est jamais utilisé au pluriel.

Quatrième argument : Il n’est jamais composé ou affixé à un autre nom. Il est spécifique à un seul.

Objections (§§7-19)

Dans les passages où le nom est attribué à un ange, il s’agit en fait d’un ange incrée, c’est à dire notre Seigneur Jésus-Christ. (Genèse 16,13 ; 18,17 ; 48,15-6 ; Exode 3,2). On le sait ainsi :

  1. Seul un des trois anges en Genèse 18 est appelé יהוה.
  2. Il s’attribue l’omnipotence et l’omniscience, et il est appelé juge de toute la terre.
  3. Abraham l’adore sans que cet ange-là ne refuse.
  4. En Genèse 48,16, cet « ange » dit avoir pardonné à Jacob.

Bref, cet « ange de יהוה » n’est pas un autre יהוה, mais une autre personne du même יהוה.

Étienne Omnès

Mari, père, appartient à Christ. Les marques de mon salut sont ma confession de foi et les sacrements que je reçois.

1 Commentaire

  1. André Pinard

    Merci pour vos articles instructifs, et pour rendre accessible les trésors de François Turretin.

    Ah! Le tétragramme, ce nom unique de Dieu!

    Réponse

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