Contrairement aux articles précédents, il s’agit d’une traduction et non d’une synthèse. Il s’agit des conférences « mystagogiques », c’est à dire données après le baptême. Vous lisez aujourd’hui la liturgie baptismale du IVe siècle, avec son interprétation.
1. J’ai depuis longtemps désiré, ô enfants véritables et bien-aimés de l’Église, vous parler de ces mystères spirituels et célestes ; mais sachant bien que la vue persuade plus fortement que l’ouïe, j’ai attendu le moment présent, afin qu’après votre expérience récente, plus disposés à recevoir l’influence de mes paroles, je puisse vous conduire par la main dans le pré lumineux et embaumé du Paradis qui s’ouvre devant nous. D’autant plus que vous avez été rendus dignes de recevoir les mystères sacrés après avoir été jugés dignes du Baptême divin et vivifiant.
Puisqu’il reste donc à vous présenter une table d’instructions plus parfaites, enseignons-les maintenant avec exactitude, afin que vous compreniez l’effet produit sur vous lors de cette soirée de votre baptême.
2. Vous êtes d’abord entrés dans le vestibule du baptistère, et là, tournés vers l’Occident, vous avez entendu l’ordre de tendre la main, et, comme en présence de Satan, vous l’avez renié. Sachez que cette figure se retrouve dans l’histoire ancienne. Car lorsque Pharaon, ce tyran cruel et amer, opprimait le peuple libre et noble des Hébreux, Dieu envoya Moïse pour les libérer de l’esclavage des Égyptiens. Les montants des portes furent alors oints du sang d’un agneau, pour que le destructeur fuie les maisons marquées du signe du sang ; et le peuple hébreu fut merveilleusement délivré. Mais l’ennemi, après leur délivrance, les poursuivit et vit la mer s’ouvrir avec prodige devant eux ; néanmoins, il continua à les suivre de près et fut tout à coup englouti dans la mer Rouge.
3. Passe maintenant de l’ancien au nouveau, de la figure à la réalité. Là, Moïse fut envoyé par Dieu en Égypte ; ici, c’est le Christ qui fut envoyé de Son Père dans le monde : là, Moïse devait faire sortir un peuple affligé d’Égypte ; ici, le Christ vient sauver ceux qui sont opprimés par le péché. Là, le sang d’un agneau servait de protection contre le destructeur ; ici, c’est le sang de l’Agneau sans tache, Jésus-Christ, qui repousse les esprits mauvais. Le tyran d’autrefois poursuivait l’ancien peuple jusqu’à la mer ; ici, l’esprit audacieux et sans honte, auteur du mal, te poursuivait jusqu’aux flots mêmes du salut. L’ancien tyran fut noyé dans la mer ; celui-ci disparaît dans l’eau du salut.
4. Néanmoins, il t’est ordonné de dire, bras tendu vers lui comme s’il était présent : « Je te renie, Satan. » Je veux aussi expliquer pourquoi vous êtes tournés vers l’Occident : car l’Occident est le lieu des ténèbres sensibles, et lui, étant ténèbres, a sa domination dans les ténèbres. Ainsi, regardant symboliquement vers l’Ouest, vous reniez ce souverain ténébreux et lugubre. Que disiez-vous alors chacun debout ? « Je te renie, Satan » – toi, méchant et cruel tyran ! Cela signifie : « Je ne crains plus ta puissance, car le Christ l’a renversée, Lui qui a partagé avec moi la chair et le sang, afin de détruire la mort par la mort, pour que je ne sois plus jamais esclave. » « Je te renie » – toi, serpent rusé et subtil. « Je te renie » – toi, comploteur, qui sous l’apparence de l’amitié as suscité la désobéissance et causé l’apostasie de nos premiers parents. « Je te renie, Satan » – artisan et instigateur de toute iniquité.
5. Ensuite, dans une seconde formule, vous dites : « et toutes tes œuvres. » Les œuvres de Satan sont tous les péchés, que tu dois aussi renier – de même que celui qui échappe à un tyran échappe aussi à ses armes. Tout péché, de toute nature, fait donc partie des œuvres du diable. Sachez ceci : tout ce que vous dites, surtout à cette heure solennelle, est inscrit dans les livres de Dieu ; et si ensuite vous agissez contre ces promesses, vous serez jugés comme transgresseurs. Vous reniez donc les œuvres de Satan, c’est-à-dire toutes les pensées et actions contraires à la raison.
6. Puis vous dites : « et toute sa pompe. » La pompe du diable, c’est la folie des théâtres, des courses de chevaux, de la chasse, et toutes ces vanités ; d’où le saint homme, priant pour en être délivré, dit à Dieu : « Détourne mes yeux de la vanité. » Ne t’intéresse pas à la folie des théâtres, où tu verras les gestes impudiques des acteurs, accompagnés de moqueries et d’indécence, et la danse effrénée d’hommes efféminés ; ni à la folie de ceux qui, dans les chasses, s’exposent aux bêtes sauvages pour satisfaire leur appétit misérable – qui, pour nourrir leur ventre, deviennent eux-mêmes nourriture des bêtes. Évite aussi les courses de chevaux, ce spectacle délirant et destructeur de l’âme. Car tout cela fait partie de la pompe du diable.
7. De plus, les choses suspendues lors des fêtes idolâtres – viandes, pains ou autres aliments – sont profanées par l’invocation des esprits impurs et font partie de la pompe du diable. Car, tout comme le Pain et le Vin de l’Eucharistie, avant l’invocation de la Sainte Trinité, ne sont que du pain et du vin, mais deviennent ensuite Corps et Sang du Christ, de même, les aliments de la pompe de Satan, bien que naturellement simples, sont rendus impurs par l’invocation du mauvais esprit.
8. Ensuite, vous dites : « et tout son service. » Le service du diable, c’est la prière dans les temples d’idoles, les actes en l’honneur des idoles mortes, l’allumage de lampes ou l’encens près des fontaines ou rivières – pratiques adoptées par certains, trompés par des rêves ou des esprits mauvais, espérant y trouver guérison même pour leurs maux corporels. Ne t’y adonne pas. L’observation des oiseaux, les divinations, présages, amulettes, charmes écrits sur des feuilles, sorcelleries et autres arts maléfiques sont tous des services du diable ; évite-les. Car si, après avoir renié Satan et t’être uni au Christ, tu retombes sous leur influence, tu retrouveras un tyran plus cruel, car il t’avait autrefois comme serviteur et t’a perdu ; maintenant il est irrité contre toi. Ainsi tu perdras le Christ et feras l’expérience de l’autre. N’as-tu pas entendu l’histoire de Loth et de ses filles ? Lui fut sauvé avec ses filles en atteignant la montagne, tandis que sa femme, se retournant, devint une colonne de sel, souvenir éternel de sa volonté corrompue. Prends donc garde à toi-même : ne regarde pas en arrière, toi qui as mis la main à la charrue ; ne retourne pas au goût salé des choses de cette vie, mais fuis vers la montagne, vers Jésus-Christ, la pierre taillée sans main, qui a rempli le monde.
9. Quand donc tu renies Satan, rompant tout pacte avec lui, cette antique alliance avec l’enfer, le paradis de Dieu t’est ouvert, celui qu’il a planté à l’Orient, d’où notre premier père fut banni pour sa transgression ; et ton retournement de l’Ouest vers l’Est en est le symbole, vers le lieu de la lumière. Ensuite, il t’a été ordonné de dire : « Je crois au Père, au Fils et au Saint-Esprit, et en un seul baptême de pénitence. » Nous vous avons parlé de tout cela dans les catéchèses précédentes, autant que la grâce de Dieu nous l’a permis.
10. Fortifiés par ces discours, soyez donc sobres. Car notre adversaire, le diable, comme nous venons de le lire, rôde comme un lion rugissant, cherchant qui dévorer. Mais autrefois, la mort dominait et dévorait ; maintenant, au saint Bain de la régénération, Dieu a essuyé toute larme de tous les visages. Tu ne pleureras plus, ayant dépouillé le vieil homme ; mais tu célébreras une fête, revêtu du vêtement du salut, Jésus-Christ lui-même.
11. Et cela s’est accompli dans l’antichambre. Mais, si Dieu le veut, lorsque dans les catéchèses suivantes sur les Mystères nous entrerons dans le Saint des Saints, nous comprendrons alors le sens symbolique de ce qui y est accompli. À Dieu le Père, avec le Fils et le Saint-Esprit, soient gloire, puissance et majesté, pour les siècles des siècles. Amen.
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