La façon dont le Réformateur allemand et son collègue Mélanchthon répondent aux anabaptistes est intéressante. De manière singulière, ils ne concèdent pas à ceux-ci que les enfants ne puissent croire. Peter Leithart, que nous avons traduit à ce sujet, explique en effet qu’il ne faut pas intellectualiser la foi et que nous parlons aux nourrissons non pas parce qu’ils comprennent, mais afin qu’ils comprennent. Ce n’est toutefois pas cet aspect de la théologie de Luther que j’aimerais relever, mais plutôt cet extrait du Grand catéchisme où Luther explique que le baptême ne tire pas sa validité de la foi de celui qui le reçoit, mais du commandement de Dieu. La foi, explique-t-il, ne fait pas le baptême mais le reçoit :
De plus, nous ajoutons que le plus important à nos yeux, ce n’est pas que celui que nous baptisons possède ou non la foi ; car le Baptême ne dépend pas de notre foi, mais de la Parole et du commandement de Dieu. Cette opinion scandalisera peut-être quelques-uns, mais elle résulte naturellement de ce que nous venons de voir, le Baptême n’étant pas autre chose que de l’eau unie à la Parole de Dieu. Si donc la Parole est jointe à l’eau, le Baptême est réel, quand même la foi n’y est pas ; car la foi ne fait pas le Baptême, mais elle le reçoit.
Martin Luther, Grand Catéchisme, Traduit et annoté par Frédéric Guillaume Horning (1809-1882).
Cela ne revient pas à dire que la foi n’est rien : c’est par elle seule que nous recevons les bénéfices scellés dans le baptême. Il n’en était pas autrement de la circoncision : sans la foi, elle ne servait de rien mais en tant que sceau des promesses divines reçue par la foi, elle avait une grande valeur. Un Israélite qui restait incrédule aux promesses de Dieu n’était pas incirconcis pour autant, mais il était circoncis pour son jugement et à sa perte. De même, celui qui prend la Cène d’un cœur mauvais ne prend pas un vulgaire repas mais boit un jugement contre lui-même. L’incrédulité, donc, ne détruit pas la validité d’un sacrement mais appelle le jugement. Lorsqu’il s’agit de sacrements qui ont valeur de promesses, c’est donc la façon dont nous répondrons aux promesses qu’ils scellent qui détermine, non pas leur validité, mais le bénéfice que nous en aurons.
Illustration en couverture : Lucas Cranach l’Ancien et Lucas Cranach le Jeune, Baptême, 1547-1548.
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