Le don des langues est secondaire : Le don des langues dans 1 Corinthiens 13.8-14.40 (10/16)
7 mai 2018

Article d’un auteur invité, Calvinyps.


Partie 10 : le don des langues est secondaire parce que les répercussions des langues sont plus émotionnelles qu’intellectuelles – 1 Corinthiens 14.13-19

Nous avons vu la dernière fois que l’importance des langues est secondaire d’abord parce que c’est la prophétie qui édifie l’église et ensuite parce que les langues ne sont pas compréhensibles et qu’elles sont par conséquent d’une utilité limitée, surtout si l’on tient compte du fait que cette utilité limitée n’a eu cours que pendant la période apostolique. La troisième raison pour laquelle les langues sont secondaires, c’est que les répercussions des langues sont plus émotionnelles qu’intellectuelles.

I. L’importance secondaire du parler en langue (v.1-19).

1. La prophétie édifie toute l’assemblée (v.1-5)

2. Les langues ne sont pas compréhensibles (v.6-12).

3. Les répercussions des langues sont plus émotionnelles qu’intellectuelles (v.13-19).

a. La condamnation du langage extatique de prière (v.13-14).

Il nous faut expliquer ce que Paul veut dire lorsqu’il dit au v.13 de prier pour l’interprétation : “C’est pourquoi, que celui qui parle en langue [i.e. en charabia] prie pour avoir le don d’interpréter”. Il s’agit d’un verset difficile. Que veut-il dire en énonçant que celui qui parle en charabia prie pour l’interprétation ?

Comme nous l’avons vu précédemment, les Corinthiens parlaient à un dieu dans une sorte de communication privée et extatique en croyant qu’en faisant cela ils s’adressaient au seul vrai Dieu. Mais la prière en charabia n’est pas le véritable exercice du don des langues ; c’est sa perversion. Paul est donc en train de dire que celui qui prie en charabia devrait aussi prier dans le but de pouvoir interpréter sa propre prière. Autrement dit, je pense que Paul fait ici preuve d’un peu de sarcasme et qu’il reprend les Corinthiens de manière ironique, en leur faisant remarquer que puisqu’ils sont si occupés à prier dans leur charabia, pourquoi ne prient-ils pas plutôt pour dire des paroles qui aient une signification pour quelqu’un…

Si le lecteur pense que c’est un peu trop forcer le texte, je le prierai de placer ces versets dans le contexte de 1 Corinthiens. Dans toute l’épître on trouve des passages où Paul fait preuve de sarcasme et d’ironie. C’est pourquoi nous pensons que ce que Paul dit vraiment ici, c’est que celui qui se préoccupe de prier dans son propre petit langage de prière devrait plutôt prier pour avoir un don qui est intelligible et demander à Dieu quelque chose dont le reste du corps pourra profiter au lieu de chercher à satisfaire son propre égocentrisme.

Si quelqu’un pense encore que cette interprétation est introduite dans le texte, alors je ferais remarquer qu’il n’y a pas d’autre interprétation plus probante. La seule autre alternative, c’est que Paul soit vraiment en train de dire que celui qui parle en langue doit prier pour recevoir le don d’interprétation. Le problème de cette interprétation, c’est que dans ce cas, ce verset indique que l’on peut rechercher certains dons à titre individuel, que si nous voulons le don d’interprétation, ou n’importe quel don, nous n’avons qu’à le demander dans la prière pour l’avoir. Or nous savons de 1 Corinthiens 12.11 que le Saint-Esprit donne ses dons à qui il veut. Et en 1 Corinthiens 12.30, Paul demande rhétoriquement : “Tous parlent-ils en langues ? Tous interprètent-ils ?”, la réponse à cette question étant évidemment “non”. Dieu n’a jamais dit nul part ailleurs que nous devions prier pour avoir un don ou même chercher à obtenir un don que nous désirons. Par conséquent, ce verset ne peut pas dire que nous devons chercher le don d’interprétation – ce serait alors fonder une doctrine sur un seul verset.

Une autre raison pour laquelle le v.13 ne peut vouloir dire qu’il faut rechercher le don d’interprétation, c’est que le v.28 nous dit : “S’il n’y a point d’interprète, qu’on se taise dans l’Église”. Autrement dit, même si quelqu’un possédait le véritable don des langues et qu’un incroyant comprenait cette langue étrangère, il ne devrait pas utiliser son don à moins qu’un interprète soit présent pour en donner la traduction à l’église. Je pense que ce verset indique que dans une assemblée, on savait bien quels étaient ceux qui possédaient le don d’interprétation. Ils ne devaient vraiment pas être très nombreux, parce que si beaucoup possédaient le don d’interprétation, Paul n’aurait pas eu besoin de dire qu’il fallait impérativement qu’une personne possédant ce don soit présente.

On ne doit donc pas se servir de ce verset comme prétexte pour exhorter des individus à rechercher le don d’interprétation, car ce que Paul dit ici, il le dit avec sarcasme. Au lieu de baragouiner leur charabia, les Corinthiens auraient mieux fait de prier quelque chose d’intelligent, comme demander à Dieu quelque chose qui profiterait à toute l’assemblée.

Il nous faut aussi expliquer ce que veut dire Paul lorsqu’il parle au v.14 de prier sans intelligence : “Car si je prie en langue [i.e. en charabia], mon esprit [Grec : pneuma = ’souffle, vent’] est en prière, mais mon intelligence demeure stérile”. Autrement dit, Paul est en train de dire que lorsqu’on prie en charabia, tout ce qu’on fait c’est souffler de l’air dans de l’air. Le mot pneuma peut en effet être aussi bien traduit par “esprit”, que par “souffle” ou “vent”. Dans certains cas, ce mot fait même référence à des sentiments intériorisés. Ce que certains charismatiques pensent, c’est que dans ce verset le mot pneuma fait référence au Saint-Esprit. Bien sûr, ça ne peut pas être ce que dit ce texte puisque Paul dit “mon esprit”. Même si d’une certaine façon il est vrai que le Saint-Esprit est notre esprit, ce n’est pas ce que veut dire ce verset puisque Paul établit un contraste entre l’esprit et l’intelligence. Paul compare ce que se passe dans l’intelligence humaine avec ce que produit le souffle ou l’esprit humain.

Donc Paul est en train de dire que s’il prie en charabia, peut-être que son souffle prie, mais son intelligence demeure stérile. Autrement dit, cela ne sert à rien, car cette activité ne porte aucun fruit. Le charabia de la prière en langue extatique est donc une bêtise. Pour Paul, si l’on prie en langage extatique, on est comme les païens : on souffle de l’air dans de l’air sans que personne ne puisse comprendre ce qui est dit (puisque rien n’est dit !). Ainsi, la contrefaçon du véritable don n’est qu’une expérience émotionnelle qui ne présente aucun bénéfice intellectuel.

Nulle part dans la Parole de Dieu il ne nous est demandé de débrancher notre intelligence. Dieu ne dit jamais nulle part qu’il y a une quelconque vertu à renoncer à l’utilisation de son cerveau. Pas une seule fois Dieu ne nous demande de fonctionner sur le mode de l’émotion pure sans aucune intelligence. C’est pourquoi ce qui se passait à Corinthe était regrettable : ils recherchaient des expériences émotionnelles qui laissaient leur intelligence stérile et qui n’avaient aucun sens. Pourtant, en Matthieu 22.37, Jésus avait déclaré : “Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, et de toute ta pensée”. Prier ou chanter en langue est inutile – aussi bien pour soi que pour les autres – car il s’agit d’une émotion stérile qui ne produit aucun fruit, qui ne contribue pas au renouvellement de notre intelligence.

b. L’obligation d’utiliser son intelligence (v.15).

Il faut prier avec intelligence (v.15a) : “Que faire donc [i.e. ‘Quelle est donc ma conclusion’] ? Je prierai par l’esprit [ou ’souffle, vent, être intérieur’] mais je prierai aussi avec l’intelligence”. Paul ordonne donc que lorsque nous parlons à Dieu il faut que nos paroles proviennent de notre intérieur en les prononçant par notre souffle (ou “vent”), mais ce faisant, nous devons prendre garde d’utiliser aussi notre cerveau.

De même, il faut chanter avec intelligence (v.15b) : “Je chanterai par l’esprit [ou ’souffle, vent, être intérieur’], mais je chanterai aussi avec l’intelligence”. Apparemment, les Corinthiens avaient l’habitude non seulement de prier mais aussi de chanter en langues extatiques. C’est aussi ce qu’on voit dans le mouvement charismatique aujourd’hui. Mais ce que Paul dit ici, c’est que ce n’est pas ce qui devrait être. En effet, cela ne sert à rien si ce n’est à montrer à tous que l’on possède un langage personnel de prière qui permet de se connecter à Dieu d’une manière toute particulière. Paul explique que ce n’est pas ainsi qu’il faut agir, mais que lorsqu’on prie on prie avec le souffle et l’intelligence et que lorsqu’on chante on chante avec le souffle et l’intelligence – et non sans intelligence.

Lorsque nous prions en français, Dieu comprend ce que nous lui disons. Et lorsque nous le chantons en français, Dieu comprend ce que nous chantons. Cela est bien supérieur au fait de parler à Dieu en charabia. Dieu n’a pas besoin que nous nous adressions à lui d’une manière incompréhensible.

c. La limitation de l’usage des langues (v.16-17)

L’usage des langues doit être limité, parce que cela empêche les autres de répondre “Amen !” (v.16) : “Autrement, si tu rends grâces par l’esprit [sans l’intelligence], comment celui qui est dans les rangs de l’homme du peuple répondra-t-il Amen ! à ton action de grâces, puisqu’il ne sait pas ce que tu dis ?”. Notons l’utilisation de l’expression “les rangs de l’homme du peuple”. Le mot grec traduit ainsi est le mot idiotes qui signifie “ignorant” et qui fait simplement référence à quelqu’un qui ne connaît pas le langage qui est parlé. Ainsi, si quelqu’un parle en langue, la personne qui ignore la signification de ce qui est dit ne peut dire “Amen” lorsque cette personne rend grâce en langue. Pourquoi ? Parce qu’elle ne comprend pas ce qui a été dit.

Le mot amen est un mot hébreux qu’on pourrait traduire par : “C’est vrai !”, “Bien dit mon frère !”, “Qu’il soit ainsi !” ou “Je suis d’accord avec toi !”. Ce que Paul dit donc ici, c’est que lorsque quelqu’un entre dans une extase émotionelle aveugle, personne ne peut être d’accord avec lui, parce que personne ne sait ce qui lui arrive. L’idée que met Paul en avant, c’est que lorsque nous nous rassemblons, nous exerçons nos dons spirituels pour le bien commun, et tout ce qu’on peut faire qui ne se préoccupe pas des autres est un acte égocentrique et égoïste.

En effet, la raison pour laquelle l’usage des langues doit être limité, c’est leur incapacité à édifier les autres (v.17) : “Tu rends, il est vrai, d’excellentes actions de grâces, mais l’autre n’est pas édifié”. Cela veut dire que même lorsque ceux qui avaient le véritable don des langues rendaient ainsi grâces à Dieu, cela ne servait absolument à rien parce que personne n’était édifié par ces excellentes actions de grâces. Le problème, c’est que le seul but des dons est d’édifier l’assemblée, et si on utilise un don pour autre chose, alors on a détourné la finalité du don et on a perdu de vue la raison pour laquelle l’église s’assemble.

Certains diront ici que c’est exactement pour cette raison que les charismatiques enseignent qu’il s’agit surtout d’un don qu’on exerce en privée. Le problème de cette théorie, c’est que là aussi on ne comprend pas à quoi sert un don : les dons ne servent jamais à s’édifier soi-même dans son coin. Le don des langues ne devait être utilisé que lorsque quelqu’un parlant la langue en question était présent. A quoi sert-il de parler en privée dans une langue qu’on ne comprend pas ? Ici, au v.17, Paul déclare que lorsqu’on parle en langue, cela ne sert absolument à rien et n’édifie personne sauf si quelqu’un comprend ce qui est dit.

d. La réhabilitation des langues (v.18).

“Je rends grâces à Dieu de ce que je parle en langue plus que vous tous”. Paul agit dans ce verset exactement de la même façon qu’au début du chapitre. L’idée, c’est qu’après avoir été très dur sur la question du parler en langues, il nuance son propos pour que les Corinthiens n’aillent pas dans l’excès inverse en croyant que c’est mal de parler en langues. Paul croyait évidemment qu’il existait un véritable don des langues qui venait de Dieu, et d’ailleurs il le pratiquait plus que tous les Corinthiens réunis. C’est une façon de leur dire que, au cas où les Corinthiens se demandent pourquoi Paul met tellement de réserve à ce qu’ils pratiquent le parler en langue extatique, Paul a probablement exercé le véritable don des langues plus qu’aucun d’entre eux.

Paul possédait en effet le véritable don des langues puisqu’il était Apôtre et qu’il avait donc les dons des apôtres (2 Cor 12.12). Il est certain qu’il eut l’occasion d’exercer ces dons autours de ses voyages. Quel usage faisait-il de ce don ? Ce dont nous pouvons être certains en lisant ce passage c’est que (i) il ne l’utilisait pas comme un langage personnel de prière, (ii) qu’il ne l’utilisait pas lors de réunion chrétienne pour montrer qu’il était spirituel, (iii) qu’il ne l’utilisait pas pour son propre bien-être.

Comment l’utilisa-t-il donc ? Il l’utilisait sans aucun doute au cours de ses voyages lorsqu’il arrivait dans des contrées où il y avait des personnes qui parlaient dans des langues étrangères qu’il ne connaissait pas. C’est dans ce genre de situation que Dieu lui donnait la capacité de parler dans cette langue de sorte qu’il sache que Dieu était présent et qu’un miracle avait lieu. Il commençait alors à parler des merveilles de Dieu afin qu’ils aient l’opportunité d’être convertis. Paul était un missionnaire envoyé auprès des païens, donc il est hautement probable que Paul est eu plusieurs occasions lors de ses voyages d’exercer ce don. Je trouve cependant remarquable que, bien qu’ayant exercé ce don à plusieurs reprises, il accorde une importance si secondaire à ce don. En fait, dans tout ce que Paul a écrit, il ne dit jamais qu’il a utilisé ce don… à part ici en 1 Corinthiens 14.18. Et même ici, il ne veut pas décrire la façon dont il l’utilisait.

5. L’importance secondaire du don des langues (v. 19)

“Mais, dans l’Église, j’aime mieux dire cinq paroles avec mon intelligence, afin d’instruire aussi les autres, que dix mille paroles en langue”. Paul explique ici que le véritable don des langues est utile pour évangéliser les païens dans une langue qu’ils comprennent et pour leur montrer que Dieu est là et qu’il parle. Mais dans l’église, il vaut mieux dire cinq paroles compréhensibles qui enseignent les autres que dix milles paroles en langues.

Arrêtons-nous un instant pour noter que “cinq paroles” contre “dix milles paroles” n’est pas un ratio que donne Paul. Le mot grec traduit par “dix milles” est le mot murioi. Il s’agit du mot grec qui servait à désigner le plus grand nombre pour lequel il y avait un mot en grec. C’est pour cette raison qu’Apocalypse 5.11 nous parle du nombre des anges : “des myriades de myriades et des milliers de milliers”. Dans ce passage, le mot murioi est utilisé de façon répétée tout simplement parce que ce mot est le plus grand nombre exprimable en grec. C’est pourquoi on pourrait traduire en français le v.19 d’une manière encore plus précise si l’on disait : “Mais, dans l’Église, j’aime mieux dire cinq paroles avec mon intelligence que des trilliards de paroles en langue”. Autrement dit, parler de façon claire est infiniment meilleur que parler dans une langue que personne ne comprend. Pourquoi ? Parce que sinon personne ne sera instruit et que ce que nous devons chercher lorsque nous ouvrons la bouche, c’est que les autres soient enseignés.

Conclusion

Ce passage est plus que jamais d’actualité à une époque où les problèmes qui caractérisaient l’église de Corinthe sont reproduits au sein du milieu charismatique.

Ce passage ne nous enseigne pas comment nous devons régir l’usage des langues dans l’église, comme certains le prétendent, car le don des langues a disparu avant la fin de la période des apôtres. Que nous enseigne donc ce passage ? D’abord il nous montre que le mouvement charismatique est simplement en train de reproduire l’antique problème corinthien. J’émets ce jugement avec amour et avec une réelle inquiétude, mais je crois que c’est malheureusement la vérité. Certains de nos frères et soeurs utilisent le parler en langue dans leurs assemblée, parlent en charabia et le font pour leur propre édification personnelle, ils cherchent des expériences émotionnelles plutôt que la compréhension intellectuelle de la parole de Dieu, chantent en langues et sont absorbés par leurs propres expériences, ils se glorifient des communications inintelligibles qu’ils croient avoir dans une communion secrète avec Dieu, ils pratiquent cela entre croyants alors que leurs missionnaires n’ont pas ce véritable don qui pourraient leur permettre de parler de l’évangile à des personnes qui parlent une autre langue. Ce que nous voyons aujourd’hui dans le mouvement charismatique est bel et bien une copie conforme de l’erreur corinthienne.

Quelles applications chrétiennes pouvons-nous faire de ces principes ?

Que nous faut-il retenir de ce passage ?

1. Nous devons exalter la proclamation et l’enseignement de la Parole de Dieu.

2. Nous devons nous réunir pour entendre et comprendre la parole de Dieu.

3. Nous devons utiliser nos dons spirituels pour s’édifier mutuellement.

4. Nous ne devons jamais chercher d’expérience spirituel centrée sur nous.

5. Nous ne devons pas chercher l’émotion mais la connaissance.

6. Nous devons prendre garde aux contrefaçons sataniques.

7. Nous devons agir en toute chose avec un esprit qui est ouvert à la vérité de Dieu.

8. Nous devons rechercher la véritable oeuvre du Saint-Esprit.

Adapté de John MacArthur dans son guide d’étude The Truth about Tongues.

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Maxime Georgel

Maxime est interne en médecine générale à Lille. Fondateur du site Parlafoi.fr, il se passionne pour la théologie systématique, l'histoire du dogme et la philosophie réaliste. Il affirme être marié à la meilleure épouse du monde. Ils vivent ensemble sur Lille avec leurs trois enfants, sont membres de l'Église de la Trinité (trinitelille.fr) et sont moniteurs de la méthode Billings.

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