La raison est pour Dieu – résumé (11/12) : La réalité de la résurrection
8 septembre 2021

Cette série d’articles propose un résumé des arguments donnés par Tim Keller en faveur du christianisme et contre les objections courantes contre la foi chrétienne dans son livre La raison est pour Dieu. C’est un très bon livre, assez généraliste dans ses réponses, dans le sens où n’entre pas dans les détails philosophiques et ne se base pas sur une tradition philosophique particulière (thomiste par exemple).

Il est très bon comme première lecture d’apologétique et ouvrage de référence accessible à tous (croyants et non-croyants). Keller sait attirer l’attention du lecteur, présenter des arguments tout en restant toujours humble et sympathique. Il est agréable à lire et très bien traduit.

Le but de cet article est résumer, regrouper les arguments de Keller mais aussi de les rendre plus compréhensibles. C’est pour ça que je les complèterai ou les expliquerai parfois un peu plus en détails. Bien sûr aussi de rendre accessible gratuitement ce que présente Keller mais aussi de vous donner envie de le lire quand vous en aurez les moyens.


Souvent, on demande aux croyants de prouver la résurrection du Christ. Mais dans un sens, c’est aux sceptiques de proposer une explication plus probable que celle d’un miracle. Le problème, c’est qu’aucune de ces explications n’est sérieuse et plausible.

Une des principales explications de la résurrection (qui exclut le miracle), c’est que comme les gens de l’époque ne connaissaient pas encore la science, ils étaient bien plus crédules et naïfs face aux miracles. De plus, les disciples de Jésus, le voyant crucifié auraient imaginé qu’il était toujours présent d’eux spirituellement (d’une manière invisible) pour se consoler. C’est ensuite que les légendes d’une résurrection physique du Christ auraient commencé à circuler dans les Evangiles.

I. Le tombeau vide et les témoins

Cette interprétation se trompe d’abord parce que les Evangiles n’ont pas été écrits longtemps après ces événements. En fait, on retrouve le premier récit de la résurrection dans les lettres de l’apôtre Paul, dans 1 Corinthiens 15,3-6, seulement 15 ou 20 ans après la mort de Jésus. Il nous apprend plusieurs choses.

  1. Le message de la résurrection était un message public et non pas un secret caché. Les lettres de Paul étaient publiques, circulaient d’une Eglise à une autre. N’importe qui pouvait les lire, apprendre la nouvelle et obtenir le nom des témoins auxquels il pouvait poser de questions.
  2. Très clairement, selon Paul, il s’agit d’un véritable fait historique et non pas d’un symbole (« le troisième jour »). Il mentionne des témoins qui ont vu ce Jésus ressuscité. Il suffisait donc juste à l’époque d’aller les rencontrer et de leur poser des questions pour vérifier les faits. Ce qui pouvait facilement se faire dans un Empire Romain unifié sous la Pax Romana. 
  3. Paul fait référence à un enseignement qu’il a reçu d’autres personnes1 (ce qu’on appelle une tradition). Beaucoup de spécialistes auparavant accusaient les premiers chrétiens d’avoir déformé l’enseignement original du Christ lors de sa transmission. Un peu comme on le fait quand on joue un « téléphone arabe » (dans mon Eglise, c’est plutôt le mime arabe !). Mais d’après des études récentes, on sait maintenant qu’à l’époque, les gens savaient très bien faire la différence entre les légendes et les récits historiques. De la même façon qu’aujourd’hui personne ne confondrait un film de science-fiction avec un film d’histoire (par exemple Star Wars avec La liste de Schindler). De plus il était interdit de modifier les faits historiques lors d’une transmission. C’était une règle que les gens devaient absolument respecter.
  4. La résurrection du Christ était un message annoncé très tôt par les chrétiens. Par conséquent, on en déduit que le tombeau de Jésus devait forcément être vide. Pourquoi ? Parce que s’il n’était pas vide, n’importe qui aurait pu montrer son corps pour prouver qu’il n’est pas ressuscité et que les chrétiens sont tous des menteurs. Et cela, personne ne l’a fait.

Mais ça se trouve le corps de Jésus aurait été volé ou décomposé, brûlé par exemple ? Il ne peut pas avoir été volé, comme tous les tombeaux, le tombeau de Jésus était surveillé par toute une cohorte de soldats romains (pas juste 2). Impossible pour les disciples de Jésus de les vaincre. En plus ils n’étaient plus du tout nombreux comme la majorité avait trahi Jésus en voulant le crucifier. Il ne peut pas non plus avoir été brûlé comme c’est une pratique inconnue (la crémation) à l’époque chez les Juifs. En plus, pouvoir brûler le corps suppose réussir à le voler et donc avoir battu les Romains, ce qu’on a vu être impossible.

Un deuxième élément prouve que les témoins étaient des vrais témoins. Dans les Évangiles, les tous premiers témoins de la résurrection étaient des femmes. Or, à l’époque, c’est malheureux, mais quand une femme disait quelque chose, personne ne voulait la croire. Il n’y avait donc aucune raison de présenter les femmes comme premiers témoins dans les Évangiles. Cela ne pouvait qu’affaiblir leur crédibilité auprès des gens qu’ils cherchaient à convaincre. La seule ou au moins la meilleure explication (c’est-à-dire la plus probable), c’est que les disciples ont tout simplement dit la vérité. Rappelons-nous, les faits étaient déjà trop connus à l’époque pour qu’on réussisse à les déformer. Donc les femmes étaient vraiment les premiers témoins de la résurrection.

Enfin, en reprenant l’étude de N. T. Wright, Keller conclut que ces deux éléments ensemble, 1) le tombeau vide et 2) la présence de témoins oculaires nous forcent à accepter la résurrection comme un événement historique. Si le tombeau était vide et qu’il n’y avait aucun témoin, n’importe qui aurait pu affirmer que le corps de Jésus avait juste été volé. Si à l’inverse, il y avait des témoins mais un tombeau qui n’était pas vide, n’importe qui aurait pu chercher le corps de Jésus et le montrer à tout le monde. Ce qui aurait révélé que ces témoins étaient des menteurs. Or les deux éléments sont vrais et se complètent donc l’un l’autre. Au final, la résurrection a bien eu lieu.

II. Résurrection et immortalité

Pour échapper à l’argument précédent qui combine le tombeau vide et les témoignages (surtout celui des femmes), une autre hypothèse a été proposée. Selon elle, les disciples ne seraient pas des menteurs mais des gens sincèrement dans l’erreur qui auraient halluciné. Comment auraient-ils cru à une hallucination, celle d’un homme revenu à la vie ? Ils l’auraient accepté car comme tous les gens de l’époque, ils auraient été crédules et naïfs, prêts à croire tout et n’importe quoi comme la science n’existait pas pour vérifier. Ils seraient semblables à des hommes « primitifs », inférieurs à l’homme moderne qui, avec son bon sens, a raison de douter de telles superstitions. En résumé, l’hypothèse d’une hallucination suppose que la résurrection ait été un événement possible et plausible pour les gens de l’époque.

Or comme l’a montré N. T. Wright, cette supposition est fausse. En réalité, la résurrection semblait aussi absurde aux gens de l’époque de Jésus que pour nous aujourd’hui, bien que ce soit pour des raisons différentes. La résurrection est inconcevable à la fois pour les non-Juifs (les Grecs, les Romains) et pour les Juifs.

A. La résurrection : un événement absurde pour les non-Juifs

Pour les Grecs et les Romains, il y avait l’esprit et la matière, ce qui est immatériel et ce qui est matériel, l’âme et le corps. Pour la plupart des Grecs à l’époque du Nouveau Testament (à part Aristote et ses disciples), l’esprit est bon mais la matière est mauvaise. Le corps est comme une prison dans laquelle l’âme est emprisonnée. Le but était donc de se libérer de cette prison après la mort. Or, le christianisme pense tout l’inverse : après la mort, l’âme retourne dans un corps. Ce qui est absurde pour la majorité des Grecs de l’époque : pourquoi retourner en prison alors qu’on vient d’en être libéré ?

B. La résurrection : un événement absurde pour les Juifs

Pour les Juifs, la résurrection était aussi absurde. Je parle ici de la résurrection d’un seul individu au milieu de l’histoire avant la fin du monde, le jugement dernier et l’arrivée du paradis. Pour eux, il y a bien une résurrection de tous les hommes. Mais elle a lieu seulement après que Dieu ait « réparé » l’univers en supprimant le mal, la souffrance et la mort. Après être ressuscité, chaque homme vivra soit loin de Dieu dans le malheur éternel (l’enfer), soit dans sa présence dans un nouvel univers parfait pour toujours (le paradis). C’est pour ça qu’une résurrection d’un seul homme en plein milieu de l’histoire où le mal et la souffrance existent encore n’avait aucun sens. En gros, alors que le judaïsme affirmait cet ordre-là : 1) jugement dernier => 2) résurrection, le christianisme osait dire : 1) résurrection => 2) jugement dernier !

C. Conclusion

Par conséquent, ces deux hypothèses, celle qui dit que les disciples ont cru à cause d’hallucinations et celle qui dit qu’ils ont volé le corps de Jésus pour prétendre qu’il est vivant sont impossibles. Pour qu’elles soient possibles, il faut absolument à la fois 1) que les disciples aient été prêt à croire en une résurrection d’un individu et 2) qu’ils pensent que d’autres Juifs soient aussi prêt à y croire. Deux choses impossibles à cause de leur conception du monde. 

Enfin, à l’époque de Jésus, beaucoup d’hommes juifs (des douzaines) ont proclamé être le Messie. Or quand chacun d’eux était exécuté, leurs disciples ou bien arrêtaient leur révolution, ou bien essayaient de trouver un nouveau leader. Mais jamais ils ne prétendaient que leur chef était ressuscité car c’était complètement impensable. Non seulement déjà stupide pour eux, mais aussi pour tous les êtres-humains de leur époque. Pourquoi les choses seraient-elles différentes avec Jésus ? Pourquoi ses disciples ont prêché sa résurrection ? La meilleure explication est : parce qu’il est réellement ressuscité.

La naissance explosive d’une nouvelle vision du monde

Toute explication de la résurrection qui nie qu’elle a vraiment eu lieu se heurte à trois difficultés considérables. Trois faits qu’elle n’arrive pas à expliquer de manière satisfaisante :
1) Les gens de l’époque ont été convaincus juste par les témoignages des témoins oculaires.
2) Les Juifs ont accepté d’adorer un être-humain.
3) Les disciples de Jésus ont accepté d’être condamnés à mort pour leurs convictions.

  1. D’abord, comment expliquer les gens de l’époque aient été convaincus simplement par des témoignages et rien d’autre ? Pour que les gens acceptent de changer d’avis concernant un sujet important, il faut souvent une longue période de débat à l’issue de laquelle des personnes peuvent changer de position sur un sujet. Mais il n’y a rien eu de tel concernant la résurrection. Aucun long débat, juste des faits rapportés par des témoins oculaires. Si cela a suffi pour convaincre des foules, c’est que ces témoignages étaient dignes de confiance et facilement vérifiables. Encore une fois, les Juifs n’auraient pas accepté « bêtement » la résurrection sans réfléchir. C’est de base pour eux une croyance complètement absurde comme expliqué plus haut en détails.
  2. Ensuite, comment expliquer que des Juifs qui adoraient seulement Dieu aient tout d’un coup commencé à adorer un être humain ? Pour eux, adorer un homme était un blasphème, une grave insulte contre Dieu. Le Dieu des Juifs était un Dieu personnel, transcendant et unique différent de la force impersonnelle des religions orientales et des dieux des polythéismes classiques qui avaient des corps semblables à ceux des humains. Il aurait fallu un événement incroyable pour convaincre les Juifs.
  3. Enfin, comment expliquer que des hommes aient accepté d’aller jusqu’à la mort pour leur croyance ? Imaginons d’abord que cette croyance n’ait été qu’un mensonge. Il n’y aurait eu aucun intérêt de leur part : personne ne meurt pour un mensonge, et encore moins quand il est révélé auprès de tous. Imaginons maintenant que cette croyance n’était qu’une hallucination. Nous avons vu avant que c’est impossible, même des hallucinations n’auraient pas convaincu des gens pour qui la résurrection était par définition impossible. La meilleure explication encore une fois, c’est que les disciples savaient que c’était la vérité et qu’ils étaient prêt à mourir pour en témoigner.

Le défi de la résurrection

Pour conclure son étude sur la résurrection, Keller conclut finalement avec trois remarques.

  1. Très souvent, les sceptiques ne cherchent même pas à proposer des hypothèses rivales pour éviter cette résurrection. Ils se contentent de dire que comme la résurrection est un miracle et que les miracles sont impossibles, elle aussi est alors impossible. Premièrement, c’est un présupposé qu’il faut justifier, et c’est très difficile. Si Dieu existe, en quoi les miracles sont-ils impossibles ? Deuxièmement, il ne suffit pas juste de balayer d’un revers de main les nombreux indices que nous venons de voir. Ils demeurent véridiques et demandent à être expliqués.
  2. Il est normal que nous soyons réticents à accepter la résurrection. Même les gens de l’époque de Jésus avaient du mal. La résurrection n’avait de sens pour personne. Et pourtant, en examinant les preuves et les faits réels, ils ont fini par y croire. Ne pourrions-nous donc pas en faire de même ?
  3. Ce n’est pas vraiment un argument, mais la résurrection est en soi si belle qu’elle nous donne au moins l’envie de croire qu’elle est vraie. Beaucoup de gens aujourd’hui sont très impliqués dans des causes comme l’écologie, l’humanitaire et la justice sociale. Pourtant, en même temps, ils croient qu’il n’y a rien au-delà de la matière, que nous sommes issus d’une évolution sans finalité, qu’après la mort il n’y a plus rien, qu’un jour le soleil brûlera notre planète et qu’il n’y aura plus de vie sur terre. Si c’est le cas, pourquoi s’efforcer à travailler autant alors qu’au final tout disparaîtra ?

Au contraire, la résurrection nous offre une espérance. Il y a un futur après la mort, un nouvel univers sans mal ni souffrance ni mort dans lequel nous pourrons vivre pour l’éternité dans le bonheur dans la présence de notre Créateur.

  1. Je vous ai enseigné avant tout, comme je l’avais aussi reçu, que Christ est mort pour nos péchés, selon les Écritures; qu’il a été enseveli, et qu’il est ressuscité le troisième jour, selon les Écritures; 5 et qu’il est apparu à Céphas, puis aux douze. Ensuite, il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois, dont la plupart sont encore vivants, et dont quelques-uns sont morts. (1 Corinthiens 15,3-6)[]

Laurent Dv

Informaticien, époux et passionné par la théologie biblique (pour la beauté de l'histoire de la Bible), la philosophie analytique (pour son style rigoureux) et la philosophie thomiste (ou classique, plus généralement) pour ses riches apports en apologétique (théisme, Trinité, Incarnation...) et pour la vie de tous les jours (famille, travail, sexualité, politique...).

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