Cet article est le trentième d’une série consacrée à la logique classique (ou aristotélicienne, c’est-à-dire développée par Aristote). Dans le vingt-neuvième, j’ai présenté les différents types de définition. Dans cet article, je présenterai les différentes choses impossibles à définir. Comme d’habitude, je reprendrai énormément le contenu du livre Socratic Logic de Peter Kreeft des pages 129 à 130.
Comme nous l’avons vu avant, les définitions sont essentielles pour lever toute ambiguïté dans les mots que nous employons tous les jours et pour avoir au final des arguments valides. Mais elles des limites : il y existe des notions qui ne peuvent pas être définies.
L’infini
L’infini, pour prendre une définition simple1, c’est l’absence de limites. Or pouvoir définir une chose suppose que celle-ci a des limites. Donc l’infini ne peut pas être défini.
C’est le cas par exemple de l’éternité qui est l’absence de limites dans le temps. On ne peut donc avoir qu’une définition négative (ce qui brise une des règles à respecter pour avoir une bonne définition) : « ne pas être dans le temps ».
De même pour Dieu qui est l’être infini. En effet, nous ne pouvons pas le définir (savoir vraiment ce qu’est Dieu en lui-même) mais nous pouvons :
- Dire ce qu’il n’est pas (définition négative), comme : « Dieu n’est pas matériel, pas dans le temps, ne change pas. ». Ce type de phrases ne décrit pas vraiment ce que Dieu est comme il n’est pas une privation, un manque de quelque chose comme la mort (l’absence de vie) ou le mal (l’absence de bien).
- Dire ce à quoi il ressemble (définition métaphorique), comme : « Dieu est un Père, un Roi, amour ». J’insiste sur le mot ressembler parce que Dieu n’est pas littéralement un père biologique, un homme politique puissant ni un sentiment éphémère (une passion). Quand on lui attribue une qualité positive, il faut la « purifier » de ses défauts avant de les appliquer à Dieu.
Par conséquent, notre « définition » (à la fois négative et métaphorique) de Dieu ne respecte pas deux règles (pas de définition négative ni de définition métaphorique). Donc Dieu ne peut pas être défini.
Les individus
Les individus (Laurent, Maxime, Coco le chien) ne peuvent pas non plus être définis car une définition d’une chose suppose que celle-ci a une différence spécifique. Or ce ne sont que les espèces qui en ont, les individus n’en ont pas. En effet, la différence spécifique est l’élément qui différencie les espèces entre elles, et non pas les individus.
Cependant, on peut quand même donner une description d’un individu, mais ce n’est pas une définition : « Sherlock Holmes est un anglais, de taille moyenne, avec les cheveux bruns noirs, un détective très compétent… ».
Les catégories
Elles sont aussi appelées summa genera (les genres les plus généraux). On ne peut leur donner de définition parce qu’elles n’existe pas de genres au-dessus d’elles dans lesquels on pourrait les classer.
L’être
L’être (esse en latin), synonyme de l’existence, dépasse tout concept et ne peut pas enfermé dedans. Il n’appartient à aucune catégorie (les genres les plus généraux), les dépasse toutes (car chaque catégorie existe).
Les transcendantaux
Les transcendantaux (l’un, le vrai, le bien, la beauté, l’ens commun) sont des propriétés universelles de l’être, en d’autres mots de tout ce qui existe. Tout ce qui existe est un (ses parties forment un tout unifié et non pas un désordre), vrai (connaissable2 par l’intelligence humaine), bon (désirable, a de la valeur), beau (procure du plaisir à ceux qui le contemplent).
Ils sont encore plus généraux que les catégories et sont équivalents. Par exemple, si quelque chose est bon, c’est aussi beau, vrai, un. Les transcendantaux n’ont donc pas de définition.
Illustration : Éducation d’Alexandre par Aristote, gravure de Charles Laplante, publiée dans le livre de Louis Figuier, Vie des savants illustres – Savants de l’Antiquité (tome 1), Paris, 1866, pages 134-135.
0 commentaires