Voici la seconde partie d’un nouveau sermon sur l’épître de Jacques. Ce sermon suivra le plan suivant :
1/3 : La nécessité de notre régénération
2/3 : La beauté de l’origine de notre régénération
3/3 : La beauté du but de notre régénération
La beauté de l’origine de notre régénération
Dieu s’est fait notre Père
Maintenant que nous avons établit la nécessité de la nouvelle naissance, nous allons considérer sa beauté, car en effet elle n’est pas seulement un acte nécessaire pour notre salut, elle est un acte d’une grande beauté qui mérite notre contemplation. Et pour comprendre et apprécier cette beauté, nous devons comprendre comment cette nouvelle naissance d’un homme s’opère. Comment peut-on naître de nouveau ? Après ce que nous venons de voir, cela devrait être la question la plus importante, la plus cruciale de notre vie. Comment puis-je naître une nouvelle fois et obtenir cette nouvelle nature compatible avec la sainteté de Dieu ?
Cette question, nous ne sommes pas les premiers à nous la poser. Un éminent docteur de la loi, Nicodème, l’a posée à Jésus, dans la discrétion d’une nuit à Jérusalem, en ces termes :
Comment un homme peut-il naître quand il est vieux ? Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et naître ?
Jean 3,4.
Question à la fois logique pour un homme, mais aussi naïve venant d’un docteur d’Israël, comme le lui reprochera Jésus un peu plus loin dans leur discussion. Ce dernier lui répond ainsi :
En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît d’eau et d’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l’Esprit est esprit. Ne t’étonne pas que je t’aie dit : Il faut que vous naissiez de nouveau. Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit ; mais tu ne sais d’où il vient, ni où il va. Il en est ainsi de tout homme qui est né de l’Esprit.
Jean 3,5-8.
Jésus nous donne ici des informations très claires et importantes sur cette nouvelle naissance. Premièrement, contrairement à notre première naissance, qui est physique (né de la chair), cette seconde naissance est spirituelle (né de l’Esprit). Deuxièmement, cette nouvelle naissance est nécessaire pour entrer au paradis. Et troisièmement, et c’est un point tout à fait important, de la même manière qu’aucun nouveau-né n’a décidé et joué un rôle dans sa propre conception et mise au monde, aucun être humain n’a décidé et joué un rôle dans sa propre nouvelle naissance. La nouvelle naissance, ou régénération (recréation, renaissance), est un acte monergiste du Dieu trinitaire, c’est à dire un acte qui dépend uniquement de Dieu et de personne d’autre. Seul Dieu est à l’œuvre dans notre régénération.
Nous devons avoir conscience qu’aucune métaphore n’est utilisée au hasard par Dieu dans sa Parole. Si Dieu qualifie le seul processus qui peut nous permettre d’être à nouveau en communion avec lui de « nouvelle naissance », c’est bien que nous devons devenir quelqu’un de substantiellement nouveau, et que nous ne pouvons pas accomplir ce changement nous même. Nous devons être engendré par quelqu’un d’autre, tout comme un enfant est conçu et engendré par ses parents.
C’est exactement ce que dit Jacques au verset 18 : Il nous a engendrés de sa pure volonté.
Arrêtons-nous un instant sur ces mots, et revenons un peu en arrière. Nous avons vu que Dieu est parfaitement pur, trois fois saint, et que de lui ne sortent que grâces excellentes et dons parfaits. Nous avons vu que nous sommes entièrement corrompus dans notre chair, vendus au péché dès notre naissance, et justement séparés de Dieu et condamnés à la mort éternelle à cause de ce péché que nous aimons. Dieu est lumière, nous sommes ténèbres, nous sommes substantiellement opposés, mutuellement exclusifs, essentiellement incompatibles. Dieu ne peut supporter notre présence et nous ne pouvons survivre en la sienne. Nous sommes donc justement condamnés à vivre hors de sa maison, hors des murs de sa cité céleste, dans le chaos et la mort éternels.
Et c’est alors qu’interviennent les deux mots les plus beaux de la Bible : mais Dieu… Mais Dieu, considérant notre état, de sa pure volonté nous dit Jacques, c’est-à-dire sans aucune, absolument aucune sollicitation ou motivation extérieure à lui-même, a décidé qu’au lieu de nous détruire éternellement, il nous ferait vivre éternellement. Et pour que cela soit possible, il a décidé, encore une fois, par le seul élan de son amour et de sa miséricorde, de faire de nous ses propres enfants, en devenant notre Père. Parmi toutes les grâces excellentes et tous les dons parfaits dont Dieu nous comble chaque jour, le don de la régénération les surpasse tous en gloire et en beauté. Nous étions livrés à nous-mêmes et nous courrions de toutes nos forces vers les profondeurs de l’enfer dans lequel nous sommes nés et auquel nous appartenions. Mais Dieu, notre créateur, plutôt que de nous laisser là, a décidé, selon sa pure volonté, de nous recréer une seconde fois en nous donnant une nouvelle nature compatible avec la sienne, afin que nous puissions à nouveau jouir de la joie profonde et éternelle que seule sa présence favorable peut apporter à notre âme et à notre être entier.
Voilà un premier point qui nous aide à considérer la beauté de la régénération : Dieu, et lui seul, a décidé de se faire notre Père, de nous engendrer spirituellement afin de nous rendre participant de sa propre nature divine comme le dit l’apôtre Pierre1, afin que nous puissions à nouveau nous asseoir à ses côtés dans l’intimité de sa maison. Le Père des lumières a décidé de transformer nos ténèbres en sa lumière, en la faisant habiter en nous, afin que nous participions à l’éclat de sa gloire pour les siècles des siècles.
N’est-ce pas glorieux ? Est-ce que cela ne nous pousse pas naturellement à l’adoration ? Et permettez moi cette courte parenthèse mais, comment, en lisant ce texte, et bien d’autres dans les Écritures, pouvons-nous considérer que nous participions d’une quelconque manière à notre nouvelle naissance, lorsque la Bible nous décrit comme morts spirituellement, sans vie, et dans le besoin de naître de nouveau. Sauf à ne pas tenir compte de ces termes et donc à accuser par là le Saint-Esprit de négligence dans le choix de ses mots, comment pouvons-nous ne pas reconnaître que notre régénération est un acte entièrement décidé et accompli par Dieu selon sa pure volonté, par amour, par miséricorde, par grâce ? Seul un fou affirmera qu’il a participé à sa naissance, et seul un fou, j’ose le dire, affirmera qu’il a participé à sa régénération.
La Bible dit que nous sommes morts spirituellement dès notre naissance. Qui a déjà vu un mort participer à sa résurrection ? Mais la réalité de l’être humain est encore pire que la passivité d’un nouveau-né ou d’un mort, car nous ne sommes pas immobiles en attendant simplement qu’on vienne nous sauver. Nous sommes encore moins comme ces illustrations où l’on peut voir une main qui sort de l’eau et qui cherche à attraper celle que Jésus lui tend. Non, chers lecteurs, la mort spirituelle de l’être humain n’est pas passive, elle est terriblement active, mais dans le mauvais sens. Avant que Dieu ne nous régénérât, nous n’étions pas inertes, et nous cherchions encore moins l’aide de Dieu : Nous nagions de toutes nos forces dans les sombres profondeurs afin d’être recouverts par ces ténèbres que nous aimions tant. Dans sa mort spirituelle, l’être humain naturel fait tout pour fuir Dieu, pour fuir la vérité, pour fuir la lumière qui met en évidence son péché en préférant se cacher dans les ténèbres qui le camoufle.
C’est pourquoi il est aberrant de penser que l’homme participe à son salut en choisissant de suivre Jésus ; aucun de nous ne peut devenir disciple du Christ si le Père des lumières ne le fait pas d’abord naître de nouveau selon sa pure volonté, ainsi que l’enseigne aussi le Christ en ces termes : Nul ne peut venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire ; et je le ressusciterai au dernier jour. (Jean 6,44) Pourtant, malgré toutes ces évidences bibliques, beaucoup de chrétiens, en disant que ce sont eux qui ont choisi de suivre Jésus-Christ, affirment qu’ils sont à l’origine ou au moins, qu’ils ont participé à leur propre nouvelle naissance. C’est non seulement une aberration selon la nature, selon les Écritures, mais c’est aussi se priver d’une grande et belle source d’adoration envers notre Père céleste.
Comme le dit Flavel dans son livre sur le deuil, lorsque Dieu nous reprend ce qu’il nous a donné, nous devrions plutôt être étonnés, émus, et poussés à la reconnaissance face à toutes les grâces qu’il nous conserve. Et si cette perspective est vraie pour tous les dons de Dieu, elle l’est aussi pour la grâce excellente, le don parfait de la régénération. Nous ne devrions pas nous étonner, voire nous énerver devant le fait que Dieu ne sauve pas tous les êtres humains. Nous devrions être étonnés, émerveillés, et reconnaissants que Dieu décide d’en sauver ne serait-ce qu’un seul, car il ne doit rien à l’être humain, mis à part son juste jugement.
Gloire soit rendue à Dieu qui accorde la grâce excellente de notre régénération.
Dieu s’est fait notre frère
Mais la beauté de notre régénération ne réside pas uniquement dans la volonté de Dieu, qui est son origine ; elle se trouve aussi dans le moyen que Dieu utilise pour nous faire naître de nouveau. Jusqu’ici nous avons contemplé le principe de notre nouvelle naissance ; nous comprenons que notre nature doit changer pour être conforme à celle de Dieu afin de ne pas être consumé en sa présence. Mais Dieu utilise un moyen précis pour que nous naissions de nouveau spirituellement :
La suite du verset 18 dit : Il nous a engendré de sa pure volonté par la parole de la vérité.
Qu’est ce que la parole de vérité ? Dieu a créé le monde par sa Parole. La parole de Dieu est créatrice, elle est la seule a pouvoir créer quelque chose à partir de rien : Dieu a crée le monde ex nihilo (à partir de rien) et il nous a engendrés spirituellement ex nihilo puisque nous étions morts, sans vie. C’est la parole de Dieu qui fait surgir l’ordre du chaos, l’existence du néant, la vie de la mort. Seul Dieu, par sa Parole, a le pouvoir de donner la vie, de la reprendre, et de la rendre. La Bible fait à de nombreuses reprises le parallèle entre la création du monde et notre nouvelle naissance, tout simplement parce qu’il s’agit de deux actes de création divine de même nature : Dieu parle, et la vie apparaît.
La parole de Dieu, ce sont des mots qui, mis bout à bout, ont fini par former, suivant sa Providence, cet ensemble de livres que nous appelons la Bible. Mais avant d’être la Bible, la Parole, c’est d’abord une personne. Je vous laisserai relire le premier chapitre de l’Évangile de Jean, où il nous dit : Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu. Elle était au commencement avec Dieu. Toutes choses ont été faites par elle, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle. En elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes. La lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue.
Jean poursuit plus loin : Et la parole a été faite chair, et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité ; et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme la gloire du Fils unique venu du Père. […] Personne n’a jamais vu Dieu ; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, est celui qui l’a fait connaître.
Chers lecteurs, ce que je veux vous amener à considérer, c’est que notre nouvelle naissance ne sort pas de nulle part. Certes, comme nous l’avons vu, elle est un acte monergiste de Dieu, mais sans l’incarnation du Fils unique, elle n’aurait pas été possible. Il fallait que Dieu le Fils devînt notre frère en revêtant la même chair que nous, afin que Dieu le Père devînt notre Père. Car qu’est-ce que cette nouvelle nature que nous recevons de Dieu sinon le Christ qui vit en nous par le Saint-Esprit ? Quelle est cette parole qui nous fait naître de nouveau sinon la bonne nouvelle, l’Évangile du Christ, qu’il a résumée en ces mots à Nicodème : Comme Moïse éleva le serpent dans le désert, il faut de même que le Fils de l’homme soit élevé (c’est à dire crucifié, pendu au bois), afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle. Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle.
Voilà pourquoi, lorsque Jacques dit que nous sommes engendrés par la parole de la vérité, cela veut dire à la fois « par l’œuvre parfaite du Fils incarné » et ensuite « par la prédication de l’Évangile, qui proclame cette œuvre parfaite, en laquelle nous avons foi, par le Saint-Esprit. » Que serait l’œuvre du Christ sans prédicateurs pour annoncer cette bonne nouvelle au monde ? Un simple événement historique. Que serait l’Évangile sans l’œuvre historique du Christ ? Un mythe parmi les autres. La nouvelle naissance ne peut avoir lieu que lorsque le Saint Esprit convainc un homme pécheur que l’Évangile du Christ qu’il est en train de lire ou d’entendre est vrai, que le Fils de Dieu, la Parole de vérité, s’est fait homme en la personne de Jésus-Christ, qu’il a vécu une vie de d’obéissance parfaite sur terre à notre place, s’est offert au Père en sacrifice parfait d’expiation de nos péchés sur la croix, et est ressuscité au troisième jour avant de monter à la droite du Père. « Par la parole de vérité » veut donc dire « par Jésus-Christ » qui est la parole de vérité, et « par la proclamation de l’Évangile à notre âme ». Voici les deux facettes du moyen de notre régénération.
Lorsque nous naissons de nouveau par le Saint-Esprit, nous sommes unis au Christ par la foi, il vient faire habitation en nous, et Dieu nous voit désormais à travers sa perfection et nous accepte à nouveau en sa présence.
La beauté de notre régénération réside donc aussi dans le moyen que Dieu utilise pour nous faire naître de nouveau, car nous y voyons chaque personne de la Trinité pleinement à l’œuvre afin que notre naissance spirituelle soit possible. De la même manière que nous sommes émus face à des parents qui désirent un enfant, qui l’attendent avec impatience pendant neuf mois, et qui font tout pour en prendre soin pendant des années ensuite, nous devrions être émus face à Dieu le Père, le Fils et le Saint-Esprit qui a voulu nous engendrer, qui a patienté le temps de mettre en place les conditions nécessaires à cet enfantement, et qui prend soin de nous, ses enfants, chaque jour de notre vie.
Nous avons considéré la beauté de notre régénération dans son origine : la seule volonté de Dieu ; dans son moyen : la proclamation de l’Évangile du Christ incarné, crucifié et ressuscité. Il nous reste à considérer ce qui sera pour nous tous, je l’espère, une grande source d’encouragement à persévérer dans notre foi jusqu’au bout : la beauté du but de notre régénération. Dieu nous a régénéré afin que nous fussions comme les prémices de ses créatures.
Illustration : Hans Dahl (1849-1937), In the middle of the Fiord.
- 2 Pierre 1,4.[↩]
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