Mémoricide — Philippe de Villiers — Recension
5 mars 2025

Mémoricide est le dernier livre de Philippe de Villiers paru en octobre 2024 aux Editions Fayard. Dedans, il raconte le déclin de la France, ses nombreuses causes et aspects. On y trouve de nombreux sujets : sujets politiques (patriotisme, l’Union européenne, immigration, histoire de France, culture française), sujets éthiques (avortement, euthanasie), religion (le christianisme, le catholicisme plus exactement et son déclin en France, l’islam, le wokisme, etc.). Chaque chapitre se concentre sur un ou plusieurs de ces sujets.

Philippe de Villiers est une figure politique qu’on connaît souvent au moins sous une de ces nombreuses casquettes : fondateur du Puy du Fou (un parc d’attractions centré sur l’histoire de France et de la civilisation européenne), ancien ministre de la culture sous Chirac, chef et fondateur du parti politique Mouvement pour la France et ex-mentor de Bruno Retailleau, l’actuel ministre de l’Intérieur. C’est un catholique pratiquant assumé aux convictions fermes, comme on le verra notamment en ce qui concerne l’avortement. Ainsi, c’est un conservateur qui défend courageusement les valeurs chrétiennes et traditionnelles. Dans son livre, il montre qu’il a une grande culture (histoire, littérature et culture françaises, et plus généralement judéo-chrétiennes) et connaissance du christianisme, du catholicisme, et de la philosophie classique et thomiste ! Le livre est très agréable à lire sur la forme et se lit rapidement : de Villiers manie la plume avec finesse.

Notre blog étant un blog chrétien et pas sur la politique à proprement parler, ce qui nous intéressera ici sera surtout tous les sujets qui tournent autour du christianisme et des valeurs chrétiennes, les éclairages qu’ils peuvent apporter, etc. C’est pourquoi il y aura dans cet article trois sections dédiées à des sujets spécifiques, puis une section un peu fourre-tout avec le reste.

On peut découper le livre en deux grosses sections. La première regroupe les deux premières parties et contient en gros un diagnostic de l’état actuel du pays et des critiques envers diverses idéologies. Dans la seconde, de Villiers raconte des moments émouvants et des souvenirs du passé où la France s’est relève alors qu’elle était au bord du gouffre. Par exemple, le sacre et la conversion inattendue de Clovis, pourtant le souverain des envahisseurs de l’Empire romain, au christianisme. Ou encore Jeanne d’Arc et la libération de l’occupation nazie par les Alliés.

Sur la culture et l’identité nationale

Au niveau de la culture et l’identité nationale de la France, de Villiers se concentre sur la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques d’été de Paris 2024. Durant celle-ci, les organisateurs ont ignoré et rejeté les valeurs (bien souvent conservatrices et chrétiennes) et les épisodes clés de la France, comme si (quasiment tout) son passé ne comptait pas pour privilégier le multiculturalisme et des éléments LGBTQ+ de minorités sexuelles.

On le voit par exemple quand ils ont présenté une image positive de la Terreur et de la Révolution française avec la reine Marie-Antoinette tenant sa tête coupée. Omettant ainsi le massacre macabre et gigantesque de la Terreur, en particulier le génocide vendéen. On le voit aussi avec la Cène du Christ interprétée par des drag queens, désormais transformée en une orgie. Ou encore avec l’interprétation d’une musique d’Aya Nakamura par la garde républicaine. Il faut faire la distinction entre multiethnisme (présence de plusieurs origines ethniques dans un peuple) et multiculturalisme (présence de plusieurs cultures dans un peuple sans qu’une d’entre elles soit prépondérante). Ce sont plus généralement les élites, dernièrement Emmanuel Macron bien connu pour avoir qu’il n’y avait pas de culture française qui rejettent l’existence d’un passif national officiel.

La France a été et est bien sûr multiethnique, mais n’est, ou au moins n’a jamais été multiculturelle : il y a toujours eu une culture française commune et dominante qui réunissait et transcendait des citoyens de diverses origines ethniques. Culture commune et dominante essentielle pour tout peuple et tout pays : la Chine a sa culture chinoise, le Sénégal sa culture sénégalaise, les Etats-Unis leur culture états-unienne, etc.

Sur la bioéthique : avortement, euthanasie, etc.

Philippe de Villiers revient sur l’inscription de l’avortement dans la Constitution en 2024. Il est un défenseur farouche et courageux de la cause pro-vie contre l’avortement. Il est l’un des rares et seuls hommes politiques à se prononcer explicitement sur le sujet dans le débat public. Il était notamment le seul présent avec Jean-Frédéric Poisson à la Marche pour la vie au Trocadéro cette année où il y a même donné un discours d’encouragement. Il rappelle que l’avortement est bien sûr le fait de tuer un être humain qui n’est pas encore né et innocent car qui a droit à la vie. Il raconte que la loi de Simone Veil était censée encadrer l’avortement avec des garde-fous et que selon Veil, il devait rester l’exception et rare. Inutile de faire remarquer qu’aujourd’hui tous ces garde-fous ont sauté et qu’on persécute et censure désormais allègrement tous ceux qui s’y opposent.

Il aborde aussi le sujet polémique de l’euthanasie qui selon lui viole très clairement le serment d’Hippocrate qui stipule très clairement que la mission du médecin se résume aux soins et à maintenir en vie, qu’elle ne s’étend donc pas à tuer. L’avortement et l’euthanasie montrent très clairement que nous n’avons maintenant que faire du Décalogue (les dix commandements).

Il s’attaque aussi frontalement au wokisme qui cherche à défendre des minorités, que ce soit au niveau des origines ethniques, ou au niveau des orientations sexuelles. Il critique bien évidemment la théorie du genre ou transgenre qui nie l’existence d’uniquement deux genres, homme et femme, et surtout l’enseignement de cette théorie à l’école de nos jours.

Il traite aussi de la chute drastique de la natalité et résume la situation ainsi : les Français ne veulent plus faire d’enfants (ou juste très peu) et utilisent l’immigration (en particulier d’origine extra-européenne) pour combler ce manque. Ce qui donne tout naturellement lieu au grand remplacement.

Sur la religion : déchristianisation de la France et progression de l’Islam

On assiste à la déchristianisation de la France, c’est-à-dire la disparition du christianisme en France et une opposition virulente face à celui-ci. Par exemple, on constate de plus en plus d’actes de vandalisme contre les Eglises, de violences et d’attentats contre les Chrétiens, et le silence assourdissant de l’Etat et des médias sur ce sujet. Ou avec le rejet et mépris du christianisme par l’Etat au nom de la laïcité (en dépit de l’héritage chrétien de la France) comme on le voit avec les moqueries lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024 avec la Cène des drag queens, les programmes d’éducation sexuelle complètement incompatibles avec la morale sexuelle traditionnelle défendue âprement par les Chrétiens, des interdictions de crèches dans les mairies, de fèves à « trop grande connotation religieuse » dans les galettes de rois à Toulouse dernièrement, etc. A l’inverse, la France se « wokise » de plus en plus, en prônant la page blanche, la décadence sexuelle et la liberté sans limites. En somme, il devient de plus en plus dur d’être chrétien en France en 2025, non seulement au niveau sécuritaire, mais aussi tout simplement sur le plan moral.

Une autre chose qui n’aide pas : le pape François a apporté un jugement simpliste et partial lors de sa dernière visite à Marseille en exhortant la France à continuer à accueillir toujours autant de migrants sans prendre en compte l’état actuel économique, sécuritaire et identitaire du pays qui ne rend plus cela aussi facile qu’auparavant. Il ne parle pas par exemple des narcotrafiquants qui florissent à Marseille, ni des trafics d’êtres humains dont les migrants sont victimes. En cela il contredit la Tradition catholique pourtant bien plus mesurée en distinguant charité individuelle et charité collective.

Si l’on couple cette déchristianisation et cette wokisation du pays à la chute drastique de la natalité, il devient difficile de nier que l’islam y devient de plus en plus influent. De Villiers lance bien sûr une alerte au niveau d’organisations qui œuvrent explicitement ou implicitement à cela. Mais il insiste beaucoup (voire surtout) sur le fait que l’islam (une véritable religion avec une véritable transcendance) ne fait que remplir le gros vide spirituel laissé par la disparition du christianisme puis par l’arrivée du wokisme. Wokisme qui en soi est un vide spirituel total incapable de satisfaire nos besoins existentiels. En gros, ce n’est pas tant la faute des Musulmans, que la nôtre non seulement pour nous être suicidé démographiquement par la décadence ou révolution sexuelle1 depuis mai 68 et pour avoir renié notre religion, la vraie. On pourrait parler comme Edward Feser d’apostasie nationale.

Au final, la France ne se retrouvera sa grandeur que si elle renoue pleinement et sans honte avec son héritage chrétien.

Sur les autres sujets

Philippe de Villiers aborde aussi beaucoup le sujet de l’Union européenne et sur la perte de la souveraineté de ses Etats-membres dont les élites ont transféré les pouvoirs décisionnels. En gros, l’Union européenne a choisit de ne plus produire mais seulement de consommer. Comme elle réduit l’homme à de simples consommateurs interchangeables, rien ne lui empêche de faire venir des gens à l’infini sur son sol. D’où sa politique très favorable à l’immigration. Il refuse l’idée selon laquelle l’Union européenne est la cause de la paix en Europe : en réalité, elle en est l’effet, juste après la fin de la Seconde Guerre mondiale. De plus (thèse certes polémique, voire complotiste pour certains sur laquelle nous laisserons les historiens trancher), selon lui, on dépeint souvent trois de ses fondateurs, Robert Schuman, Jean Monnet et Walter Hallstein comme des héros alors qu’ils n’étaient pas si irréprochables. Schuman était un agent de la CIA au service des intérêts des Etats-Unis, Monnet a voté les pleins pouvoirs à Pétain et a été un collaborateur de Vichy, et Hallstein un nazi.

Il expose aussi ses craintes et sa tristesse face à l’abandon des campagnes et des villages. En particulier des agriculteurs.

Il parle également de la propriété privée et du travail où il critique le socialisme, même avec de la philosophie thomiste (bien que très brièvement, son père était aristotélicien et thomiste nous raconte t-il).

Enfin, il rapporte longuement l’augmentation drastique de « l’insécurité » liée entre autres au narcotrafic et aux narco-Etats au sein de l’Etat et des attaques armées contre des représentants officiels de l’Etat. Par exemple l’attentat d’Incarville d’un fourgon pénitentiaire par des hommes armés avec des armes de guerre dans l’impunité la plus totale. Il y a aussi une crise importante où le peuple a perdu son pouvoir, désormais principalement entre les mains de juges et de représentants non élus démocratiquement (le Conseil Constitutionnel, le Conseil d’Etat) qui ont le mot définitif.


Illustration : Eugène Delacroix, La Liberté guidant le peuple, peinture à l’huile, 1830 (Paris, musée du Louvre).

  1. Ce suicide comprend par exemple une vision dorénavant plutôt négative de la maternité et de la femme au foyer (le rôle pourtant traditionnel de la mère), l’antinatalisme, la contraception (artificielle) comme la pilule, l’avortement, la pédophilie, la disparition de la pudeur (généralisation des vêtements très courts et même de la nudité), la pornographie, une nouvelle vision du mariage et de l’amour (basé avant tout sur les émotions), le divorce (généralisé, même sans violences ou fautes).[]

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