L’Onction des chrétiens : un signe du Christ
Quant à vous, vous avez l’onction donnée par celui qui est saint et vous avez toute connaissance. Si je vous ai écrit, ce n’est pas parce que vous ignorez la vérité, mais parce que vous la connaissez et qu’aucun mensonge ne provient de la vérité. Qui est menteur? N’est-ce pas celui qui nie que Jésus est le Messie? Tel est l’Antichrist, celui qui nie le Père et le Fils. Si quelqu’un nie le Fils, il n’a pas non plus le Père; [celui qui se déclare publiquement pour le Fils a aussi le Père.
Pour votre part, retenez [donc] ce que vous avez entendu dès le commencement. Si ce que vous avez entendu depuis le début demeure en vous, vous demeurerez vous aussi dans le Fils et dans le Père. Et voici ce qu’il nous a lui-même promis: c’est la vie éternelle.
Je vous ai écrit cela par rapport à ceux qui vous égarent. Quant à vous, l’onction que vous avez reçue de Christ demeure en vous et vous n’avez pas besoin qu’on vous enseigne. Au contraire, puisque la même onction vous enseigne sur toute chose, qu’elle est véridique et dépourvue de mensonge, vous demeurerez en lui comme elle vous l’a appris.
Et maintenant, petits enfants, demeurez en lui. Ainsi, nous aurons de l’assurance lorsqu’il apparaîtra, nous n’aurons pas la honte d’être loin de lui lors de son retour. 1 Jean 2.20-28
À la sortie du baptême, il était de coutume d’oindre les chrétiens. Cyrille de Jérusalem explique que cette onction vise à identifier le croyant au Christ lors de son baptême : tout comme le Christ a reçu le Saint-Esprit en sortant de l’eau, le croyant antique recevait une onction en sortant du baptistère.
Cyrille prend soin, toutefois, de distinguer entre le signe et la réalité qu’il représente. Pour expliquer ce lien, il adopte une position suprasubstantialiste, en accord avec la compréhension historique réformée des sacrements :
Et comme le Christ a été réellement crucifié, enseveli et ressuscité, et que vous, par le baptême, êtes jugés dignes d’être crucifiés, ensevelis et ressuscités avec Lui dans une ressemblance, il en va de même pour l’onction. Comme Il fut oint d’une huile idéale de joie, c’est-à-dire du Saint-Esprit, appelé huile de joie parce qu’Il est l’auteur de la joie spirituelle, de même vous avez été oints d’un onguent, étant devenus participants et compagnons du Christ. Mais prenez garde de ne pas considérer cela comme un simple onguent. Car, de même que le pain de l’Eucharistie, après l’invocation du Saint-Esprit, n’est plus du simple pain, mais le Corps du Christ, de même cet onguent saint n’est plus un simple onguent, ni (pour ainsi dire) ordinaire, après l’invocation, mais il est le don de la grâce du Christ, et, par la venue du Saint-Esprit, il est rendu apte à transmettre Sa Nature Divine. Cet onguent est appliqué symboliquement sur ton front et tes autres sens ; et tandis que ton corps est oint avec l’onguent visible, ton âme est sanctifiée par l’Esprit Saint et vivifiant. (p.384-385)
Cyrille conclut en évoquant brièvement les onctions de l’Ancien Testament, avant d’exhorter les chrétiens à la fidélité : qu’ils gardent leur chrisme, ce sceau spirituel.
La Cène : une participation au Corps et au Sang du Christ
En effet, j’ai reçu du Seigneur ce que je vous ai transmis. Le Seigneur Jésus, la nuit où il a été arrêté, a pris du pain. – 1 Corinthiens 11.23
Dans sa réflexion sur la Cène, Cyrille de Jérusalem développe une conception qui pourrait surprendre les évangéliques, tout en restant en harmonie avec les confessions de foi réformées :
C’est pourquoi, avec une pleine assurance, participons comme du Corps et du Sang du Christ : car dans la figure du pain, Son Corps t’est donné, et dans la figure du vin, Son Sang ; afin que, en participant au Corps et au Sang du Christ, tu deviennes du même corps et du même sang que Lui. Car ainsi nous portons le Christ en nous, parce que Son Corps et Son Sang sont distribués à travers nos membres ; ainsi, selon le bienheureux Pierre, nous devenons participants de la nature divine.
Il propose également une autre formule suprasubstantialiste, où le Corps du Christ est par-dessus le pain :
Dans le Nouveau Testament, il y a le Pain du ciel et une Coupe de salut, qui sanctifient l’âme et le corps ; car comme le pain correspond à notre corps, de même la Parole est appropriée à notre âme.
Pour Cyrille, la table eucharistique est cette « table dressée en face de mes adversaires » dont parle David dans le Psaume 23.5, une protection contre les forces du mal. La coupe, quant à elle, est celle par laquelle le Christ a promis la rémission des péchés (Matthieu 26.28). Cyrille voit aussi une allusion à la Cène dans l’invitation de l’Ecclésiaste au bonheur simple (Ecclésiaste 9.7-8).
La liturgie eucharistique et le Notre Père
Débarrassez-vous donc de toute méchanceté et toute ruse, de l’hypocrisie, l’envie et toute médisance, – 1 Pierre 2.1
Cyrille de Jérusalem détaille la liturgie eucharistique du IVe siècle, avant de commenter le Notre Père qui la suit :
Ensuite, après ces choses, nous disons la prière que le Sauveur a transmise à Ses propres disciples, avec une conscience pure, appelant Dieu notre Père, et disant : Notre Père, qui es aux cieux. Ô bonté surpassante de Dieu ! À ceux qui se sont révoltés contre Lui et qui étaient dans l’extrême misère, Il a accordé un pardon si complet des mauvaises actions et une si grande participation à la grâce qu’ils peuvent même L’appeler Père. Notre Père, qui es aux cieux ; et ils sont aussi un ciel, ceux qui portent l’image du céleste, en qui Dieu habite et marche.
Que Ton Nom soit sanctifié. Le Nom de Dieu est saint par nature, que nous le disions ou non ; mais comme il est parfois profané parmi les pécheurs, selon les paroles : Par vous, Mon Nom est continuellement blasphémé parmi les nations, nous prions pour que, en nous, le Nom de Dieu soit sanctifié ; non pas qu’il devienne saint alors qu’il ne l’était pas, mais parce qu’il devient saint en nous, lorsque nous sommes sanctifiés et faisons des choses dignes de la sainteté.
Que Ton règne vienne. Une âme pure peut dire avec audace : Que Ton règne vienne ; car celui qui a entendu Paul dire : Que le péché ne règne donc pas dans votre corps mortel, et qui s’est purifié dans ses actes, ses pensées et ses paroles, dira à Dieu : Que Ton règne vienne.
Que Ta volonté soit fait, comme au ciel, ainsi sur la terre. Les anges divins et bienheureux de Dieu font la volonté de Dieu, comme David l’a dit dans le Psaume : Bénissez le Seigneur, vous tous, Ses anges, puissants en force, qui exécutez Son plaisir. Ainsi, en effet, par ta prière, tu veux dire : « Comme Ta volonté est faite chez les anges, qu’elle soit faite sur la terre en moi, ô Seigneur. »
Donne-nous aujourd’hui notre pain substantiel. Ce pain commun n’est pas un pain substantiel, mais ce Pain Saint est substantiel, c’est-à-dire destiné à la substance de l’âme. Car ce Pain ne va pas dans l’estomac pour être rejeté dans le courant, mais il est distribué dans tout ton système pour le bénéfice du corps et de l’âme. Et par aujourd’hui, il entend : « chaque jour », comme Paul l’a dit : Pendant qu’il est appelé aujourd’hui.
Pardonne-nous nos dettes, comme nous pardonnons à nos débiteurs. Car nous avons beaucoup de péchés. Nous péchons en paroles et en pensées, et nous faisons beaucoup de choses dignes de condamnation ; et si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous mentons, comme le dit Jean. Et nous faisons un pacte avec Dieu, Le suppliant de nous pardonner nos péchés, comme nous pardonnons aussi à nos voisins leurs dettes. Considérant donc ce que nous recevons et en échange de quoi, ne retardons pas ni ne différons de pardonner les uns aux autres. Les offenses commises contre nous sont légères et insignifiantes, et facilement réglées ; mais celles que nous avons commises contre Dieu sont grandes et nécessitent une miséricorde qui n’appartient qu’à Lui. Pr takes garde donc, de peur que, pour les péchés légers et insignifiants contre toi, tu ne t’exclues toi-même du pardon de Dieu pour tes péchés très graves.
Ne nous soumets pas à la tentation, ô Seigneur. Est-ce donc ce que le Seigneur nous enseigne de prier, que nous ne soyons pas du tout tentés ? Comment alors est-il dit ailleurs : « Un homme non tenté est un homme non éprouvé » ; et encore : Mes frères, considérez comme une joie complète lorsque vous tombez dans diverses tentations ? Mais peut-être que pénétrer dans la tentation signifie être submergé par la tentation ? Car la tentation est, pour ainsi dire, comme un torrent d’hiver difficile à traverser. Ceux qui ne sont pas submergés par les tentations passent à travers, se montrant d’excellents nageurs, sans être emportés du tout ; tandis que ceux qui ne le sont pas, entrent dans les tentations et sont submergés. Par exemple, Judas, étant entré dans la tentation de l’amour de l’argent, n’a pas nagé à travers, mais a été submergé et a été étouffé, tant dans son corps que dans son esprit. Pierre est entré dans la tentation du reniement ; mais, y étant entré, il n’a pas été submergé, mais a nagé courageusement à travers et a été délivré de la tentation. Écoute encore, dans un autre passage, une compagnie de saints intacts, rendant grâce pour leur délivrance de la tentation : Tu nous as éprouvés, ô Dieu ; Tu nous as éprouvés par le feu, comme l’argent est éprouvé. Tu nous as conduits dans le filet ; Tu as posé des afflictions sur nos reins. Tu as fait passer des hommes sur nos têtes ; nous sommes passés par le feu et l’eau ; et Tu nous as conduits dans un lieu de repos. Tu les vois parler avec audace de leur passage sans être percés. Mais Tu nous as conduits dans un lieu de repos ; leur arrivée dans un lieu de repos est leur délivrance de la tentation.
Mais délivre-nous du mal. Si Ne nous soumets pas à la tentation impliquait de ne pas être tenté du tout, Il n’aurait pas dit : Mais délivre-nous du mal. Le mal est notre adversaire, le diable, dont nous prions d’être délivrés. Ensuite, après avoir complété la prière, tu dis : Amen ; par cet Amen, qui signifie « Ainsi soit-il », tu scelles les pétitions de la prière divinement enseignée.
Enfin, un détail pratique : la communion se recevait à la main, et non sur la langue, comme le soutiennent les catholiques traditionalistes :
En t’approchant donc, ne viens pas avec tes poignets étendus ou tes doigts écartés ; mais fais de ta main gauche un trône pour la droite, comme pour celle qui doit recevoir un Roi. Et ayant creusé ta paume, reçois le Corps du Christ, en disant dessus : Amen. (Cyrille de Jérusalem, Lecture catéchétique 23, §21)
Fin des lectures catéchétiques





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