De nombreux textes nous présentent Dieu annonçant un jugement puis regrettant ce jugement et ne l’accomplissant pas face à la repentance des hommes. Ces textes peuvent être compris de deux façons. Ou bien nous comprenons que Dieu regrette de la même manière qu’un homme le ferai, c’est à dire en rejetant une décision antérieure face à de nouvelles informations inattendues ou une réévaluation de la situation. Ou bien nous disons que les repentances de Dieu désignent des changement d’action, de façon d’agir de Dieu sans que cela implique une ignorance de Dieu ou un changement des plans de Celui-ci.
La philosophie chrétienne et la tradition chrétienne appuient toutes deux la deuxième option : Dieu sait tout et ses plans sont comme Lui, c’est-à-dire infaillibles et immuables. Toutefois, la plupart de ceux qui rejettent cette option rejettent aussi la philosophie et la tradition. C’est donc à partir des Écritures que nous nous proposerons de leur répondre, bien que nous croyons que Dieu nous a donné une raison et a organisé le monde avec ordre et logique (d’où la légitimité de la philosophie) et qu’il garde son Église à travers les âges (d’où la légitimité de la tradition).
Nous ne défendrons pas en détail le fait que Dieu sache tout (Psaumes 147:5), ni que celui-ci ait tout déterminé (Lam 3:37,38) ou encore qu’il ne regrette pas comme un homme (Nb 23:19). Cela, nous aurons bien le temps de le faire dans d’autres articles. Nous présenterons simplement un cas biblique de repentance de Dieu où, cette fois-ci, le texte nous précise si Dieu agissait par ignorance, en changeant ses plans, ou si sa repentance faisait partie de son plan. Si elle faisait partie de son plan, elle doit être comprise comme un changement d’action, prévu et décrit en terme humain, accessible à nos oreilles (ce processus d’adaptation est appelé accommodation de la Révélation, l’accommodation suprême étant l’incarnation du Fils).
Abraham partit de là pour la contrée du midi; il s’établit entre Kadès et Schur, et fit un séjour à Guérar. Abraham disait de Sara, sa femme: C’est ma soeur. Abimélec, roi de Guérar, fit enlever Sara. Alors Dieu apparut en songe à Abimélec pendant la nuit, et lui dit: Voici, tu vas mourir à cause de la femme que tu as enlevée, car elle a un mari. Abimélec, qui ne s’était point approché d’elle, répondit: Seigneur, ferais-tu périr même une nation juste? Ne m’a-t-il pas dit: C’est ma soeur? et elle-même n’a-t-elle pas dit: C’est mon frère? J’ai agi avec un coeur pur et avec des mains innocentes. Dieu lui dit en songe: Je sais bien, moi aussi, que tu as agi avec un coeur pur; aussi t’ai-je empêché de pécher contre moi. C’est pourquoi je n’ai pas permis que tu la toucheS. Maintenant, rends la femme de cet homme; car il est prophète, il priera pour toi, et tu vivras. Mais, si tu ne la rends pas, sache que tu mourras, toi et tout ce qui t’appartient.
(Genèse 20:1-7)
Ici, nous voyons Dieu annoncer sans aucun doute un jugement : « Voici, tu vas mourir à cause de la femme que tu as enlevée, car elle a un mari. » Toutefois, face à la repentance d’Abimélek, Dieu n’exécute pas son jugement. Pourquoi ? Car celui-ci était conditionnel : si Abimélek se repentait, le jugement ne serait pas exécuté, « Mais, si tu ne la rends pas, sache que tu mourras, toi et tout ce qui t’appartient. »
Mais ce qui nous intéresse surtout, c’est la réponse que Dieu donne à Abimélek : « Je sais bien, moi aussi, que tu as agi avec un coeur pur; aussi t’ai-je empêché de pécher contre moi. » Dieu n’a pas agit dans l’ignorance, il « sait bien ». Mais il a agi pour empêcher Abimélek de pécher. Dieu a agi avec pédagogie, un peu comme un parent qui menace un enfant d’une punition : son but n’est pas que l’enfant fasse le mal et soit puni, mais qu’il craigne la punition et s’abstienne de la désobéissance. Ainsi, si Dieu « change d’avis » et ne punit pas Abimélek, ne pensons pas pour autant que Dieu change d’avis au même sens que nous le faisons. La prière d’Abimélek et la réponse de Dieu faisaient partie de son plan et avaient pour but d’empêcher Abimélek de pécher. Il en est de même quand Dieu demande à Adam « où es-tu ? » : Il savait bien où il était, mais il avait un but pédagogique qui a permis à Adam de dire « j’ai eu honte et je me suis caché » et d’entamer un dialogue sur le péché.
Quand donc vous tombez sur un passage qui parle d’un changement dans les actions ne Dieu, ne pensez pas que Dieu ait changé son plan éternel ou qu’il soit une girouette affectée par nos petits imprévus, mais comprenez qu’il a un but, souvent pédagogique, parfois mystérieux. C’est pour une raison qu’il a choisit, dans son plan, de changer de manière d’agir à des moments opportuns et souvent nous ne comprenons pas pourquoi il le fait sur le moment. Mais sachons reconnaître que la main de notre Père dirige.
Merci Maxime! L’immuabilité divine est très bien expliquée ainsi que l’antropopathisme de ses repentances…
J’ai évité l’expression anthropopathisme car souvent ceux qui contestent l’immuabilité trouve que cette expression compliquée est une excuse pour ne pas accepter ce que le texte dit. Comme si c’était un import arbitraire. Du coup je préfère parler de pédagogie, d’accommodation, etc. Mais oui, mon article pourrait se résumer en une phrase : ses repentances sont anthropopathiques pour enseigner l’homme.