16 avril 2018

Récemment, j’ai assisté à un culte en dehors de mon église. Le premier chant qui était proposé avait pour paroles, répétées en boucle, “La présence de Dieu est ici, je la sens dans l’atmosphère” et “Je peux sentir la présence du Seigneur et je vais recevoir mes bénédictions maintenant” (il s’agit d’un chant de Byron Cage). En dehors d’autres paroles que je trouvais contraires à l’enseignement biblique, cette phrase sur la présence de Dieu a attiré mon attention. Je vous propose ici de considérer ce que la Bible dit sur la présence de Dieu pour revenir ensuite aux paroles de ce chant.

La Présence de Dieu en théologie biblique

La théologie biblique est une discipline qui s’intéresse à la façon dont les thèmes bibliques sont développés, aux fils rouges de la Bible, aux liens entre ses différentes parties, à l’unité et aux discontinuités.

Quand nous considérons la façon dont la Bible développe le thème de la présence de Dieu, nous la voyons manifestée premièrement à la création par l’Esprit planant sur les eaux. Puis, c’est en passant dans un “souffle” (même mot qu’esprit en hébreu) en Eden que le Seigneur se manifeste.

Par opposition, après la chute, le jugement des pécheurs est soit d’être éloigné de la face de Dieu comme Caïn (Genèse 4:14), soit de rencontrer sa présence terrifiante qui vient pour juger le péché comme à Babel (Genèse 11). Un pécheur dans la présence de Dieu est une impossibilité, il ne peut pas rester intact.

La présence de Dieu se manifeste ensuite quand Dieu commence à se former un peuple. Il choisit les patriarches et leur accorde des expériences particulières dans sa grâce où ils peuvent voir sa face, comme l’épisode de Mamré (Genèse 19) ou de Péniel (Genèse 32). Quand la nation d’Israël est formée, c’est par une colonne de feu et de nuée, au dessus du tabernacle puis dans le Temple que Dieu se manifeste.

Finalement, la présence de Dieu atteint son point d’orgue dans la venue de Dieu le Fils lui-même sur terre, en chair et en os. Le Christ, sur la croix, connait le jugement que mérite le péché : la présence de Dieu semble ne plus se manifester et un cri s’élève “Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?”

Alors que le Christ remonte au ciel, après la résurrection, il nous promet qu’il ne nous abandonnera pas mais qu’il enverra sur sa nouvelle création, l’Église, le même Esprit qui était là lors de la première création.

L’espérance des chrétiens c’est qu’un jour, sur une terre renouvelée et unie aux cieux, la présence de Dieu sera absolue, il sera tout et en tous. Comme le dit Apocalypse 21, il “habitera aux milieux des hommes, il sera lui-même avec eux”.

La Présence de Dieu en théologie systématique

La théologie systématique ne cherche pas à voir le développement des thèmes comme nous l’avons fait dans la section précédente mais à organiser les vérités bibliques en doctrines cohérentes entre elles.

Omniprésence

Dieu, en raison de sa nature parfaite, est présent en tout lieu et en tout temps. En fait, il dépasse même l’espace et le temps. “Omni” dans omniprésence ne fait pas seulement référence au fait que Dieu soit présent partout mais au fait qu’il soit entièrement présent partout. Dieu n’est pas un corps dont une partie serait présente ici, une autre là. Il est Esprit. Il est présent tout entier partout. Les Écritures enseignent cela en de nombreux endroits (Jean 4:24, Ps 139:5,7-12, 1 Rois 8:27).

Présence spéciale

Mais nous l’avons vu dans la section sur la théologie biblique, la présence de Dieu se manifeste parfois d’une façon particulière, par une nuée, un buisson ardent, un vent, etc. Ces manifestations de l’action de Dieu dans le monde peuvent être appelées “présence spéciale de Dieu” car elles permettent à son peuple d’être conscient avec plus de force de sa présence.

Présence sacramentelle

La présence sacramentelle fait référence à la façon dont Dieu approche son Église pour la bénir (Exode 20:24), en particulier dans la prédication de la Parole et dans les sacrements (Saint-Baptême et Sainte-Cène). Puisque nous avons déjà développé ces sujets dans d’autres articles, nous ne nous y arrêterons pas ici.

Déjà là et pas encore là

Dans la période transitoire dans laquelle nous sommes, les théologiens parlent souvent du “Déjà” et du “Pas encore”. Déjà, Dieu habite dans son Église par son Esprit. Mais Dieu n’a pas encore fait visiblement sa demeure avec nous. Déjà, Christ est avec nous jusqu’à la fondation du monde, mais nous recevons cela par la foi, non pas par la vue, ni par les sens, ni par les sentiments.

Bref, la présence de Dieu est encore une promesse dont nous attendons le plein accomplissement. Elle se manifeste dans la vie des hommes par des vies transformées, une mort à soi même, une humilité, le fruit de l’Esprit dans l’Église. La présence de Dieu se voit par son oeuvre de sanctification et de régénération.

Sentir Dieu dans la Bible

Mais nous rencontrons dans la Bible des personnes qui ont eu un avant gout du ciel. Des personnes qui ont pu ressentir la présence de Dieu, le voir face à face, littéralement. Nous pensons à Ésaie (Ésaie 6), à Jean (Apocalypse 1), à Ézéchiel (Ez 1) et à Daniel (Dan 10).

Le point commun de toutes ces personnes ? Elles étaient des envoyés de Dieu pour une mission particulière. Le point commun de leur expérience ? Ils ont subi un profond traumatisme. Ils tombent tous comme morts, terrifiés, Esaie a tout juste la force de se maudire en réalisant son impureté. Et c’est ce qui se passe quand un pécheur sent la présence de Dieu. Ce n’est du tout un sentiment agréable, c’est terrifiant, mortel même si Dieu ne leur venait pas en aide.

Nous sommes pécheurs, nous sommes infiniment impurs devant le Dieu infiniment pur et saint. Lors de la résurrection, nous serons rendu parfaits et glorifiés et parfaitement sanctifiés, nous pourrons alors grâce à Jésus-Christ nous tenir devant Dieu. Mais en attendant, la présence de Dieu est quelque chose de terrifiant pour un pécheur, c’est un feu dévorant (Hébreux 12:29, Dt 4:24).

Dieu est là, même si nous ne le sentons pas

Dans sa divine alliance de grâce, notre Seigneur nous promet de nous accompagner comme un Berger, d’être avec nous dans nos difficultés, de prendre soin de nous. Ces promesses ne doivent pas être reçues par un sentiment mais par la foi. Même si vous ne sentez pas Dieu, même si nous ne pouvons ni le voir, ni le toucher, ni le sentir, il est là. Sa présence n’est pas palpable dans l’atmosphère, mais elle est réelle. Si vous ne sentez pas Dieu, rassurez-vous, il est là. Si des chants comme celui dont je vous ai parlé de suscite pas en vous un quelconque sentiment, ce n’est pas un problème : la présence de Dieu n’est pas un sentiment.

>>> Lisez : Qu’est-ce que la foi ?

Conclusion

Jamais la Bible ne nous dit que nous devons sentir la présence de Dieu. Parmi tous les conseils que nous donnent les apôtres pour vivre en chrétiens dans ce monde, parmi toutes les exhortations sur la façon dont nous devons adorer Dieu, jamais il ne nous est dit que nous devons sentir Dieu. Bien plus, nous voyons que les quelques individus qui ont senti Dieu avaient une mission particulière et en sont ressortis traumatisés.

Je pense qu’un chant comme celui dont je vous ai parlé ne tient pas compte de la gravité de notre péché face à Dieu, de ce que la Bible nous dit sur la présence de Dieu, qui n’est pas un sentiment et qu’il peut conduire à une spiritualité néfaste pour le chrétien. Pensez-y, si vous croyez que Dieu est là le dimanche matin parce que vous vous sentez bien et que vous assimilez ce sentiment à la présence de Dieu, que faites-vous le lundi quand vous vous sentez mal, que le péché vient vous enlacer et que vos sentiments vous poussent à douter ?

Je n’ai jamais senti la présence de Dieu. J’ai déjà ressenti de la joie, de la paix en communiant avec Lui par la prière, les sacrements, les chants ou la lecture. Mais je n’ai jamais ressenti sa présence. Je m’associé à John MacArthur lorsqu’il dit :

A titre personnel, je n’ai jamais ressenti la présence de Dieu, je ne sais même pas ce que cela signifie. Je n’ai pas le moindre indice de ce que cela signifie.

Mais si, par toutes sortes de lumières et d’arrangements, vous conduisez les gens dans l’expérience musicale qui convient, puis vous leur dites qu’ils sont en train d’expérimenter la présence de Dieu, alors ils croiront que ce qu’ils expérimentent est la présence de Dieu.

Si vraiment vous ressentiez la présence de Dieu, vous tomberiez sur votre face et vous supplieriez sa miséricorde, comme Esaïe l’a fait (Es. 6:5).

Ou bien vous tomberiez à terre tel un homme mort, comme Jean (Ap. 1:17) ou comme les apôtres à de la montagne de la transfiguration (Matt. 17:6).

Oui, nous pouvons (et devons !) venir avec joie au culte, reconnaissant l’immense privilège que nous avons en Jésus-Christ de nous approcher d’un Dieu qui nous consumerai s’il ne nous environnait pas de sa grâce. Oui nous devons ressentir des choses face à Dieu; la crainte, le respect, la joie, l’amour. Mais ne confondons pas ces sentiments avec la présence de Dieu, car nous courrons un double risque : marcher par les sentiments et non par la foi quand Dieu nous promet sa présence et oublier que, devant Dieu, nous sommes de la paille dans une fournaise.

Téléchargez gratuitement notre livre sur les dons de l’Esprit en cliquant ICI

Image Cessation
 
Ressources liées : Peut-on sentir la “présence” de Dieu ? – Le Bon Combat

Maxime Georgel

Maxime est interne en médecine générale à Lille. Fondateur du site Parlafoi.fr, il se passionne pour la théologie systématique, l'histoire du dogme et la philosophie réaliste. Il affirme être marié à la meilleure épouse du monde. Ils vivent ensemble sur Lille avec leurs trois enfants, sont membres de l'Église de la Trinité (trinitelille.fr) et sont moniteurs de la méthode Billings.

7 Commentaires

  1. Alain Coligny

    Excellent commentaire. Beaucoup de chants chez les Evangéliques sont anti-bibliques.Je pense aux recueils JEM. Quant on pense que nous avons un merveilleux Psautier français !

    Réponse
    • Maxime Georgel

      Oui, dans les recueils JEM il y a de tout. De temps en temps des bonnes surprises et des reprises de bons chants, des adaptations de psaumes… mélangés à d’autres chants bof.

      Réponse
  2. Mélanie P

    Bon discernement Maxime, on aurait plutôt dû craindre de chanter ces paroles

    Réponse
    • Maxime Georgel

      Je pense qu’il y a une différence entre “vivre dans la présence de Dieu”, “être dans la joie face à Dieu” et “sentir la présence de Dieu”.

      Réponse
    • Maxime Georgel

      Plus généralement, Piper parle des manifestations de la présence spéciale de Dieu.

      Réponse
  3. plazbovo

    Je suis tout à fait d’accord avec ton analyse.
    “Jamais la Bible ne nous dit que nous devons sentir la présence de Dieu. ”
    C’est vrai que les chants de joie associés à la présence de Dieu ne sont pas conformes à l’Evangile pour celui qui pèche.
    Par contre on peut la sentir. Et à titre personnel je l’ai senti ! Et ce n’était pas agréable du tout !
    Quand j’avais ressenti la présence de l’Esprit, j’ai ressenti une grande peur, je me sentais terriblement mal. La raison de mon malaise venait de la conscience que j’avais de ma misère spirituelle.
    Et donc je ne peux qu’abonder dans ton sens : sentir la présence du Seigneur ici-bas, c’est redoutable !

    Réponse

Trackbacks/Pingbacks

  1. Les 20 articles les plus lus sur Par la foi – PAR LA FOI - […] chrétien : réponse aux objections et aux questions. 6. Paul Washer sur le RAP chrétien. 7. Sentir la présence de Dieu…

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *