Non, nous n’offensons ainsi et n’outrageons Dieu en aucune manière, mais, lui rendant grâce de tout notre coeur, nous louons et proclamons l’ineffable grandeur de sa miséricorde : car plus est merveilleuse et incroyable la manière dont il nous a réhabilités en nous arrachant aux maux si grands et si mérités qui étaient devenus les nôtres, pour nous redonner les biens si grands et si immérités que nous avions perdus, plus il nous manifeste d’amour et de bonté. Si en effet les infidèles voulaient considérer quelle haute convenance a réglé ces modalités de la rédemption des hommes, ils ne tourneraient pas en ridicule notre simplicité, mais loueraient Dieu avec nous pour sa libéralité pleine de sagesse. Il fallait en effet que, de même que le péché qui fut la cause de notre condamnation eut son origine dans une femme, pareillement l’auteur de notre justification et de notre salut naquît d’une femme. Il fallait en outre que le diable, qui avait vaincu l’homme en l’engageant à goûter au fruit du bois (de l’arbre du paradis terrestre), fût vaincu par l’homme dans la passion qu’il subit sur le bois (de la croix). Il reste encore bien d’autres détails qui, attentivement examinés, révèlent une indicible beauté dans cette manière d’accomplir notre rédemption.
Anselme, Cur Deus Homo, Livre I, chapitre 3.
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