Réflexions sur les Cieux et leur symbolique
5 février 2019

Il existe des réflexions qui ne peuvent naître dans l’esprit d’une personne que d’une manière, pour ainsi dire, providentielle. Ces moments où le livre que l’on est en train de lire semble avoir le même fil rouge que le dernier film que l’on a regardé et la dernière conversation avec tel ami. Comme si un élément unificateur de toutes ces choses commençait à se découvrir discrètement, pour celui qui sait regarder.

Une horloge céleste

Il y a quelques années, un ami ingénieur géologue et passionné de paléoastronomie (science qui étudie comment les hommes voyaient le ciel dans le passé) me faisait remarquer que, bien que la science ait prouvé que le géocentrisme est faux, cela ne devait pas nous faire passer à côté d’une réalité importante : le ciel est fait pour être observé de la terre.

Notre connaissance de « l’espace » grandissant est comparable à l’étude que l’on peut faire d’une horloge en découvrant tous ses rouages et engrenages. Le mécanisme se précise, le mouvement des aiguilles s’explique d’une « manière tout-à-fait rationnelle ». Mais il serait terrible que notre croissance dans la compréhension des rouages nous empêche de lire l’heure ou nous fasse croire qu’au final ce n’est qu’un hasard si telle aiguille semble pointer vers telle heure et se déplacer régulièrement. Celui qui connaîtrait parfaitement les rouages d’une horloge pour oublier d’en lire l’heure serait finalement plus ignorant que l’homme simple qui sait la lire.

Et s’il en était de même pour notre connaissance du ciel ? Nous en découvrons les rouages, mais nous perdons toute lecture du ciel. Est-ce un hasard si des astres d’une grandeur si différente (le Soleil et la Lune) paraissent de la même taille pour un observateur terrestre ? La relation entre leur taille et leur distance à la terre serait paramétrée si précisément par hasard ? Est-ce un hasard si les planètes ont été dans des dizaines de cultures associées à des divinités-symboles illustrant les grands principes de notre vie ? Est-ce un hasard si la paléoastronomie semble être la clé unificatrice des mythologies du monde ? Et pourquoi ces regroupements de 7 étoiles, les constellations ? Et si, au delà des engrenages, le ciel était fait pour délivrer une information comme l’horloge nous donne l’heure ? Il ne s’agit bien évidemment pas de proposer une superstition astrologique mais une exégèse symbolique du ciel.

Voilà vers où se dirigeait notre conversation il y a quelques années, je restais sans réponse à ces questions. Mais je gardais en tête l’analogie de l’horloge.

C.S. Lewis et les Cieux

Lewis n’est pas seulement l’auteur des Chroniques de Narnia mais aussi de la Trilogie Cosmique, une oeuvre de science fiction. Dans le premier volet de la série, Ransom se rend sur la planète Mars (Malacandra) et passe donc par « l’espace ». En chemin, il se rend compte que cette appellation « espace » est trompeuse en ce qu’elle évoque un vide, comme si la vie était enfermée sur les planètes et qu’entre deux il n’y aurait rien. Il explique qu’il ne s’est jamais senti autant entouré de vie que dans l’espace et qu’il faudrait peut être revenir à l’appellation « Cieux ». Il découvrira plus tard que cette sensation était fondée car les cieux sont le lieu de vie des eldila, les anges du monde de la Triologie.

Mais Lewis était aussi un érudit, professeur à Oxford, spécialisé dans la littérature médiévale et de la Renaissance. Son livre The Discarded Image traite de la littérature médiévale et en particulier de leur conception des Cieux. Ce sujet le passionnait.

Mais, étonnamment, c’est encore le ciel qui est la clé de l’unité des 7 Narnia. Chaque volet représente un des 7 cieux médiévaux et en particulier la « planète » de chaque ciel (le Soleil et la Lune étant considéré comme des planètes dans la cosmologie médiévale). Mars était associé au dieu de la guerre en raison de sa couleur rouge, et Lewis l’a représenté dans le Prince Caspian. La Lune était associée à l’eau et la nuit et Lewis l’a associé au Fauteuil d’Argent où l’eau est constamment présente, même dans des jeux de mots, et où la plupart des principales scènes se déroulent la nuit. Jupiter, la planète du Roi et de la Joie (Jupiter se prononçait aussi Jove et a donné notre mot « jovial ») est celle du Lion, la Sorcière Blanche et l’Armoire Magique où le Roi Aslan revient à Narnia, les enfants d’Adam et d’Eve sont faits rois de Narnia et la joie de Noël revient (symbolisée par le retour du Père Noël après 100 ans d’hivers sans Noel). Roi et Joie était associé dans l’imaginaire médiévale car un bon Roi est une grande joie pour un peuple et que c’est lui qui offre au peuple ses fêtes et cérémonies et il en est ainsi pour les autres planètes médiévales.

Lewis se plaint que nous ayons perdu, par notre science, la symbolique des Cieux qui était omniprésente dans toutes les cultures par le passé. Comme si nous comprenions mieux les rouages mais ne savions plus lire l’heure.

Au commencement…

La Bible n’enseigne pas le géocentrisme, elle ne nous indique pas que la terre est le point fixe de l’univers. Néanmoins, elle nous explique la création du Soleil, de la Lune et des étoiles en la plaçant après la création de la terre et nous explique que Lune, Soleil et étoiles sont créé pour la terre, pour marquer ses époques. Elle ne nous dit pas qu’il n’y a que les aiguilles de l’horloge, mais elle nous dit néanmoins qu’au-delà des rouages l’horloge indique l’heure. Autrement dit, le Ciel existe pour la Terre et est fait pour être « lu » ou considéré depuis elle. Autrement, il n’a pas de sens, pas plus qu’une horloge regardée du côté des engrenages : il n’est que rouages, vide et la Terre semble un heureux hasard inexplicable.

Conclusion

L’article s’intitule « Réflexions » et non pas « Conclusions » car je ne suis pas arrivé à une réponse à toutes ces questions, mais il me semble qu’il y a ici quelque chose à étudier. Il faudrait connaître les cosmologies anciennes, étudier la façon dont la Bible parle du ciel (je pense notamment au fait que les anges sont appelés « armées célestes » et identifiés plusieurs fois aux étoiles), étudier la tradition chrétienne à ce sujet (par exemple la façon dont Augustin parle des astres dans les Confessions et se questionne sur leur personnalité) et analyser par des outils mathématiques si la répartitions des constellations dans le ciel est organisée de telle façon que des signes d' »Intelligent Design » s’y trouvent en utilisant des critères de complexité similaires à ceux utilisés en biologie. Aussi, je serai intéressé d’avoir des suggestions de lecture à ce sujet ou des commentaires.

Pour en savoir plus sur la paléoastronomie et la façon dont elle éclaire les mythologies du monde entier, voyez la chaîne Youtube Archéodoxa et le site Archéodoxa.com. Ce site décrit ainsi sa vision :

Archeodoxa aborde l’étude des anciens mythes sous un angle nouveau. Nos ancêtres semblent avoir construit leurs mythes sur des principes astronomiques. Ils y auraient puisé un enseignement moral et spirituel pour éviter, disent-ils, de sombrer dans le chaos. Nos découvertes soutiennent la thèse que le langage des anciens était une sorte de guide pour mémoriser cet enseignement ancestral. 
À notre avis beaucoup d’historiens avaient négligé cette approche par manque de formation en astronomie. Pour apprécier la pertinence de cette hypothèse nous avons entrepris de produire des vidéos dont les animations permettraient en un clin d’œil de comprendre les mouvements de la voûte céleste. Les animations 3D se devaient d’être conformes aux attentes des astronomes tout en ayant une pédagogie innovante et accessible au grand public.

Maxime Georgel

Maxime est interne en médecine générale à Lille. Fondateur du site Parlafoi.fr, il se passionne pour la théologie systématique, l'histoire du dogme et la philosophie réaliste. Il affirme être marié à la meilleure épouse du monde. Ils vivent ensemble sur Lille avec leurs trois enfants, sont membres de l'Église de la Trinité (trinitelille.fr) et sont moniteurs de la méthode Billings.

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