Apprendre à raisonner (50) : Comment détecter la présence d’un raisonnement
30 décembre 2022

Cet article est le cinquantième d’une série consacrée à la logique classique (ou aristotélicienne, c’est-à-dire développée par Aristote). Dans le quaranteneuvième, j’ai présenté les tautologies. Dans cet article, j’expliquerai comment détecter la présence d’un raisonnement. Comme d’habitude, je reprendrai énormément le contenu du livre Socratic Logic de Peter Kreeft, pp. 190-193.


Nous avons vu précédemment qu’il était important de vérifier si 1) les termes étaient clairs, 2) les propositions vraies et 3) l’argument valide pour en déduire que la conclusion d’un raisonnement était vraie.

Mais avant de faire tout cela, il est d’abord nécessaire de trouver des arguments dans un texte et de savoir quels paragraphes sont vraiment des arguments. Cela de la même manière qu’il faut d’abord repérer et attraper des crabes pour ensuite vérifier s’ils sont vraiment des crabes.

Tous les paragraphes ne sont pas des raisonnements

Par exemple, ce paragraphe, bien qu’il regroupe plusieurs phrases n’est pas un raisonnement : « Les gens adoptent souvent des chiens ou des chats comme animal de compagnie. Les chiens sont obéissants, fidèles et peuvent faire beaucoup de bruit en aboyant. Les chats sont plus indépendants, ils font souvent moins attention à vous et sont plus petits. Il y a plusieurs races de chiens et de chats. ».

C’est un paragraphe purement descriptif dans lequel on n’arrive pas à une nouvelle information. Il n’y a pas de prémisses ni de conclusion. Il n’y a donc pas d’arguments, de justification à toutes ces affirmations. Par conséquent, on nous demande ici de faire confiance au texte sans aucun argument.

Les indices pour détecter un raisonnement

Mais y a-t-il des indices concrets qui nous indiquent si un paragraphe contient un argument ou pas ? Oui, nous allons en voir quelques-uns. Nous verrons plus tard qu’il y a des moyens de vérifier de manière automatique si un argument est valide ou non. Mais il n’y a pas de recette magique pour détecter des arguments : il faut un minimum d’intuition (bien qu’il y ait quelques indices).

Nous avons vu que chaque argument est composé de plusieurs propositions ou phrases : 1) les prémisses et 2) la conclusion. Les indices qui révèlent la présence d’un argument sont donc des mots (appelons-les « mots-liens ») ou expressions qui relient une conclusion à des prémisses. Pour faire court, il y en a deux types :

  1. Les indicateurs d’une conclusion :
    Par exemple donc, par conséquent, c’est pourquoi, ainsi, par suiteil s’ensuit que, on en déduit que.
  2. Les indicateurs de prémisses :
    Par exemple parce que, car, en effet, étant donné que… On a aussi étant, par exemple dans : « Les chats, étant plus malins que les chiens, sont plus intelligents qu’eux. ». Parfois aussi qui dans une proposition relative explicative comme dans « Mon cheval, qui a une patte cassée, doit être abattu »1.
  3. Les indicateurs à la fois de conclusion ou de prémisses :
    Par exemple les deux points comme dans « Le chien court : il est en forme. ». On peut interpréter cette phrase de deux façons. Soit le chien court parce qu’il est en forme : la prémisse serait « Il est en forme » et la conclusion « Le chien court ». Soit on peut dire que comme le chien court, on apprend qu’il est en forme : la prémisse serait « Le chien court » et la conclusion « Il est en forme ». Pour savoir quelle interprétation est la bonne, on a besoin du contexte.

Illustration : Éducation d’Alexandre par Aristote, gravure de Charles Laplante, publiée dans le livre de Louis Figuier, Vie des savants illustres – Savants de l’antiquité (tome 1), Paris, 1866, pages 134-135.

  1. Victor Thibaudeau, Principes de logique. Définition, énonciation, raisonnement, PU Laval, 2006, p. 689.[]

Laurent Dv

Informaticien, époux et passionné par la théologie biblique (pour la beauté de l'histoire de la Bible), la philosophie analytique (pour son style rigoureux) et la philosophie thomiste (ou classique, plus généralement) pour ses riches apports en apologétique (théisme, Trinité, Incarnation...) et pour la vie de tous les jours (famille, travail, sexualité, politique...).

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