L’Écriture ne suffit pas
29 janvier 2023

Cette prédication a été rédigée pour un devoir d’homilétique à rendre dans le cadre des cours que je suis à la faculté Jean Calvin (et que je recommande).


Si jamais vous deviez avoir un conflit avec votre employeur, sur quelle base vous accuserait-il ? Il prendrait certainement à témoin votre contrat de travail, et le poserait devant vous en disant que vous ne l’avez pas respecté ici ou là. Il pourrait aussi prendre appui sur quelque chose qui a été dit devant tous en réunion : « mais bien sûr qu’il fallait faire cette procédure, on l’a dit à telle date ! » À chaque fois, il pourrait prendre appui non sur sa fantaisie, mais sur une sorte de témoin de l’accord qui vous lie. Ce témoin peut être un contrat de travail écrit, ou une déclaration orale devant témoins. Imaginez maintenant que vous séchiez toutes vos réunions et les ignoriez délibérément. Il y a de grandes chances que cette conduite vous fasse conduire de grands risques dans votre relation à votre employeur.

Or, ce que nous faisons instinctivement avec notre employeur, à savoir assister avec assiduité aux réunions pour entendre ses instructions orales, nous le faisons moins avec notre Seigneur. Or, nous allons le voir avec le texte d’aujourd’hui : pour connaître et obéir à Dieu, il nous faut aussi une instruction orale de sa volonté.

Cela peut surprendre, parce que si nous insistons beaucoup sur la nécessité de la Bible pour connaître la volonté de Dieu, nous négligeons souvent l’apport des instructions plus orales. Mais nous allons voir qu’il y a un endroit dans la Bible où Dieu lui-même a insisté pour qu’il existe ce genre de choses.

Avant de voir ce que nous pouvons faire, il faut déjà voir tel que Dieu voit. Et pour cela, il faut se tourner vers les Saintes Écritures, qui nous révèlent son point de vue. Nous allons nous tourner vers Deutéronome 31, les versets 14 à 22.

14Le Seigneur dit à Moïse : Le moment de ta mort approche. Appelle Josué, et tenez-vous debout dans la tente de la Rencontre. Je lui donnerai mes ordres. Moïse et Josué allèrent se tenir debout dans la tente de la Rencontre. 15Le Seigneur apparut dans la tente, dans une colonne de nuée ; la colonne de nuée s’arrêta à l’entrée de la tente.

16Le Seigneur dit à Moïse : Tu vas te coucher avec tes pères. Quant à ce peuple, il se prostituera avec des dieux étrangers, ceux du pays dans lequel il entre. Il m’abandonnera et rompra mon alliance, celle que j’ai conclue avec lui. 17En ce jour-là, je me mettrai en colère contre lui. Je les abandonnerai et je me détournerai d’eux. Il sera dévoré ; de nombreux malheurs et des détresses l’atteindront ; il dira : « N’est-ce pas parce que mon Dieu n’est pas en mon sein que ces malheurs m’ont atteint ? » 18Et moi, je me détournerai en ce jour-là, à cause de tout le mal qu’il aura fait en se tournant vers d’autres dieux.

19Maintenant, écrivez ce chant. Apprends-le aux Israélites, mets-le dans leur bouche, et ce chant sera pour moi un témoin contre les Israélites. 20Car je ferai entrer ce peuple sur la terre que j’ai promise par serment à ses pères, une terre qui ruisselle de lait et de miel ; il mangera, il sera rassasié, il engraissera ; puis il se tournera vers d’autres dieux et les servira, il me bafouera et rompra mon alliance. 21Quand de nombreux malheurs et des détresses l’atteindront, ce chant répondra devant lui en témoin, car il ne sera pas oublié de sa descendance. Je connais, en effet, ses dispositions, qui déjà se manifestent aujourd’hui, avant même que je l’aie fait entrer dans le pays que j’ai promis par serment. 22En ce jour-là, Moïse écrivit ce chant et l’apprit aux Israélites.

Deutéronome 31,14-22.

Le besoin d’une instruction orale

Où sommes nous dans la Bible ? Après la chute, Dieu a prophétisé qu’il allait « faire quelque chose ». Après Abraham, il a annoncé qu’il allait faire quelque chose de monumental à travers Abraham. Cette promesse est devenue une alliance formelle avec Moïse. Dieu a séparé Israël du reste du monde par la Loi qu’il lui a donnée, et les promesses qui vont avec. Et là, enfin, pour la première fois dans toute l’histoire humaine, la réalité du salut de Dieu s’apprête à débarquer parmi les nations, alors qu’Israël va conquérir Canaan. Dieu donne ses ultimes préconisations à Moïse, alors qu’il a déjà transmis sa charge à Josué : ces préconisations consistent à instituer deux “témoins” de son alliance : la Loi écrite, et un chant. Ce que nous allons étudier ce matin, c’est l’institution de ce catéchisme pour les israélites.

Ce sont les adieux de Moïse : il a déjà désigné Josué comme successeur, et mis la Loi par écrit. C’est alors que Dieu convoque Moïse et Josué au tabernacle : l’un parce qu’il est l’ami de Dieu et le prophète de référence, et l’autre parce qu’il est le chef du peuple. Il y a une colonne de nuée à l’entrée de la tente : ce que Dieu s’apprête à donner est une loi du même niveau d’autorité que celles qu’il a données sur le Sinaï, où il était déjà entouré par la nuée.

Jésus [dans la nuée] expose le problème suivant : Israël va trahir l’alliance. Ce n’est même pas envisagé comme une possibilité, mais comme un fait. Alors que Moïse a consacré quarante ans à les enseigner, que la Loi est écrite, que les israélites ont vu quantité de miracles, c’est un fait : Israël va désobéir à Dieu et abandonner l’alliance. Bien sûr, pour nous qui savons la suite, c’est évident, mais ce n’était pas encore accompli, et encore moins écrit dans la Bible à l’époque.

Il y a là une leçon pour nous : l’Alliance que Dieu a passée avec nous n’est pas fondée sur notre fidélité et notre force morale, mais sur la seule fidélité et la seule bienveillance de Dieu. Dieu a passé alliance avec Israël en sachant très bien qu’elle n’obéirait pas parfaitement. Et nous savons par la venue de Jésus-Christ que Dieu n’a pas renoncé pour autant à son alliance, mais qu’il a tenu sa promesse. En revanche, cela ne veut pas dire que chaque Israélite visible a été sauvé, puisque l’apôtre Paul lui-même dit que tout Israël n’est pas l’Israël de Dieu (Romains 9,6). C’est cette réalité qui est sobrement décrite par Dieu dans le tabernacle : Israël va désobéir.

Ce problème est aussi le nôtre : l’histoire de l’Église fournit assez d’exemples de chrétiens qui se refroidissent, ou bien qui, sans renoncer formellement à invoquer Jésus-Christ, se mettent à vivre selon une autre volonté que la sienne, comme s’il n’existait pas, ou qu’il n’avait pas d’importance. Ils ont le signe de l’alliance qui est le baptême, mais ils ne vivent pas conformément à celle-ci. Le problème est le même, au bord du Jourdain comme chez nous.

Quelle est la conséquence de notre refroidissement ? Le thème est très développé ailleurs dans le Deutéronome, et il est rappelé tout au long de la Bible. Verset 17 : Je me mettrai en colère contre lui. Je les abandonnerai et je me détournerai d’eux. Il sera dévoré ; de nombreux malheurs et des détresses l’atteindront. Je n’ai pas l’intention de m’étendre trop là-dessus, car ce n’est pas le sujet d’aujourd’hui. Je me contenterai de rappeler ce qui est écrit dans le passage que nous lisons. Verset 18 : Et moi, je me détournerai en ce jour-là, à cause de tout le mal qu’il aura fait en se tournant vers d’autres dieux. Ce qui traduit ici par “détourner” est plus souvent traduit par “cacher”. L’idée est que Dieu ne se met pas hors de portée, mais qu’il se rend inaccessible. Il n’y a pas là de puérilité ou d’arbitraire de sa part : c’est nous qui avons commencé par arrêter de regarder Dieu. Le Seigneur applique une conduite symétrique à la nôtre : si le peuple abandonne l’alliance, Dieu abandonne les bénéfices de son alliance ; si le peuple se contente de se souvenir des malédictions liées à l’alliance, Dieu se contentera de donner les malédictions.

Certes, mais le mieux qui puisse arriver dans cette situation, c’est que nous nous arrêtions un instant pour dire : N’est-ce pas parce que mon Dieu n’est pas en mon sein que ces malheurs m’ont atteint ? (verset 17). Notez déjà que ce n’est pas la réaction de tout le monde qui rencontre des difficultés, mais ce que l’on peut attendre du peuple élu. Il y a d’autres exemples dans la Bible où les malédictions envoyées par Dieu contre les non-croyants n’ont rien provoqué d’autre que de l’endurcissement. Du temps de Moïse ce fut le cas de Pharaon. Dans notre temps c’est selon ce qui est écrit dans Apocalypse 6,16 : lls disaient aux montagnes et aux rochers :Tombez sur nous, cachez-nous de celui qui est assis sur le trône et de la colère de l’agneau. Les non-croyants préfèreront s’appuyer sur leurs princes et leurs institutions (les montagnes) et voudront prolonger leur refus de Dieu. Mais le peuple de Dieu, lui, se posera au moins la question : « Et si c’était parce que Dieu n’est plus là ? »

Notez bien à quel point cependant, même en faisant partie du peuple de l’alliance, notre volonté ne suffit pas : le mieux que nous puissions faire est simplement de nous demander s’il n’y aurait pas un problème. Il nous faut le Saint-Esprit pour nous convaincre de péché, et il nous faut une intervention de Dieu pour transformer cette question en conviction.

Et justement, quelle est l’intervention de Dieu dans cette situation ? Va-t-il abandonner l’homme dans son jugement ? Va-t-il passer l’éponge de façon arbitraire ? Va-t-il déchirer le ciel pour paraître à nouveau au sommet d’une montagne et rappeler sa loi et l’alliance ? Rien de tout cela.

Il institue deux “témoins” de cette alliance, c’est à dire deux copies du “contrat” qui nous lie à Dieu, et qui sont accessibles par des moyens ordinaires et faciles : précédemment, il est écrit que Moïse a mis par écrit le début de la Bible, mais dans le texte que nous lisons, Dieu en institue un autre. L’idée de ces “témoins”, c’est de servir de traces facilement accessibles, si bien qu’à tout moment, nous pouvons consulter ce que Dieu a écrit ou dit pour avoir nos réponses. Par exemples, le moment où nous cherchons la réponse à la question “n’y aurait-il pas un problème entre nous et Dieu ?”

Nous sommes habitués à l’usage de l’Écriture et dans cette société, elle nous est même assez naturelle. Lorsque nous avons un conflit avec quelqu’un, nous avons l’habitude que ce soit une loi écrite qui définisse les droits et limites de chacun, une loi consultable assez facilement. Au sein de nos Églises protestantes, c’est encore plus intégré dans nos mœurs : nous avons un conflit sur nos compréhensions de la volonté de Dieu ? Que l’on consulte l’Écriture !

Mais ici, ce qui est remarquable, c’est que Dieu ne s’en contente pas : il crée un chant, que chaque maman et chaque papa doivent apprendre à leurs enfants, que tous les enfants d’Israël doivent connaître. Ainsi, pendant que la Loi est stockée quelque part sur une étagère gardée par les prêtres, le peuple de Dieu connaît par cœur, sur son cœur, les paroles de ce chant qui sont un résumé de l’alliance et de son histoire.

La présence de cette instruction orale venant compléter l’Écriture doit, je le pense, nous amener à réformer notre conduite et établir de nouvelles habitudes dans notre vie chrétienne. Je sais que j’ai négligé cet aspect dans ma vie familiale, et que je dois m’en repentir. Je me suis contenté de garder l’Écriture sur une étagère, mais je ne l’ai pas sortie de là, je ne l’ai pas mis sur le cœur de mes enfants. Or, si Dieu a ordonné aux enfants d’Israël d’apprendre le cantique de Moïse, les enfants de Dieu d’aujourd’hui n’en ont-ils pas besoin eux aussi ?

Instruction orale : sa nature et son usage

Il nous reste à voir la nature de ce cantique, et l’usage qu’il en est fait.

Le chant ne remplace pas l’Écriture. Au contraire, il est intégré à elle. Il ne s’oppose pas à l’Écriture. Au contraire, il la résume. Ce qui change le plus en fin de compte, c’est que c’est un chant et non un texte écrit. Pourquoi un chant ? Parce qu’il est de nature orale, qu’il est donc appris par le plus grand nombre, ainsi qu’il est écrit au verset 22 : En ce jour-là, Moïse écrivit ce chant et l’apprit aux Israélites. En sens inverse, la Loi est stockée au Temple, gardée par une caste de prêtre. Les deux témoins, loi écrite et cantique oral sont complémentaires :

  • La loi est écrite et gardée par une caste spéciale. C’est un témoignage de nature plus institutionnelle et “centralisé”.
  • Le chant est oral et gardé par la transmission orale dans tout le peuple: C’est un témoignage de nature plus organique et “décentralisé”.

Ainsi, chaque témoin a les forces que l’autre n’a pas :

  • L’écrit est immuable ; l’oral se transmet bien mieux.
  • L’écrit est objectif ; l’oral est présent à tout moment sur le cœur de chacun, accessible en une seule pensée, et ne disparaît pas dans un autodafé.

Certes, me dira-t-on, mais as-t-on encore besoin d’un chant à apprendre ? Pourquoi faire cet effort, quand à présent d’énormes efforts ont été faits pour mettre la parole de Dieu par écrit, et la rendre le plus accessible possible ? Toutes ces traductions, ces livres à si peu cher, ces applications qui nous la mettent dans la main à tout moment… C’est comme si l’on avait déjà ce chant non ? Après tout, pourquoi se fatiguer à apprendre un résumé de l’alliance quand le document original est si facile d’accès ?

Je réponds que nous avons toujours besoin de ce genre d’instruction orale, quoique de façon différente. J’évoquerai les détails précis de l’application dans un second temps ; avant cela, je voudrais que nous prenions un instant pour nous souvenir en quoi cela nous concerne, et concerne notre relation au Christ.

Rappelez-vous notre lecture : le cantique de Moïse a été composé pour les moments de tourments qui frapperont Israël, lorsque le pays sera désorganisé et que le peuple oubliera Dieu. Dans ces moments, l’Écriture n’est pas forcément le meilleur moyen, celui qui est le plus facilement accessible. En tout cas, c’est ce qu’a jugé Dieu, et nous ne pouvons pas être plus sages que lui. Lorsque nous chuterons, et que nous serons attaqués de toutes parts par le doute, le découragement, la fatigue et la frustration, nous ne serons pas d’humeur à entamer une étude biblique. Et même si le Saint-Esprit peut faire des révélations surnaturelles, il est important de comprendre que seul ce qui est dans la mémoire peut travailler notre cœur. Sans efforts, le Saint-Esprit peut ramener à la surface de notre conscience cette instruction orale que nous avons reçue, et elle peut faire effet pour ensuite nous ramener à l’Écriture, et recevoir encore plus de la grâce dont nous aurons besoin.

Lorsque nous chuterons, et que nous serons attaqués de toutes parts par le doute, le découragement, la fatigue et la frustration, nous ne serons pas d’humeur à entamer une étude biblique.

Celui qui est la Parole ou la Pensée de Dieu sait bien que nous n’avons pas seulement besoin d’une révélation écrite et extérieure, mais encore que cette révélation soit inscrite en nous, gravée dans notre coeur. Il faut que sa Parole devienne notre pensée. Plus nous aurons ce résumé de l’alliance inscrit dans notre cœur à l’oral, et plus la parole de Dieu nous sera intime, plus elle demeurera en nous.

C’est ce que dira Moïse après avoir appris son cantique à Israël. Deutéronome 32, verset 47 : Ce n’est pas pour vous une parole vide : c’est votre vie ; c’est par cette parole que vous prolongerez vos jours sur la terre dont vous allez prendre possession après avoir passé le Jourdain. Ce verset répond d’ailleurs parfaitement à l’objection suivante : “Oui, mais c’est trop religieux d’apprendre par cœur des choses de Dieu. Il faut que ça reste spontané et vivant.” Moïse lui-même répond, en Deutéronome 32,47, que ces paroles apprises par cœur ne sont pas des paroles vides, mais une question de vie ou de mort !

Et ce catéchisme, loin d’être oublié, sera rappelé et utilisé même par les apôtres. En effet, dans la lettre aux Hébreux, chapitre 10, versets 28 à 30, l’auteur utilise ce cantique par deux fois. Je lis :

Si quelqu’un a violé la loi de Moïse, il est mis à mort sans pitié, sur la déposition de deux ou trois témoins. Combien pire, ne le pensez-vous pas, sera le châtiment mérité par celui qui aura piétiné le Fils de Dieu, qui aura tenu pour profane le sang de l’alliance par lequel il a été consacré, qui aura outragé l’Esprit de la grâce ! Car nous connaissons celui qui a dit : C’est moi qui fais justice ! C’est moi qui paierai de retour ! [Première citation du cantique de Moïse] Et encore : Le Seigneur jugera son peuple. [Deuxième citation].

Comme vous le voyez, les apôtres aussi connaissaient par cœur ce catéchisme, et le trouvaient toujours pertinent. Il doit donc en être de même pour nous.

En tout cas, c’est un moyen que Dieu a jugé essentiel pour maintenir le peuple dans son Alliance et ses promesses de salut. Alors ne soyons pas plus sages que lui.

Comment accomplir cette instruction

Voici pour le principe de l’instruction orale. Maintenant voyons son application.

Tout d’abord, devons nous faire apprendre par cœur le cantique de Moïse à nos enfants ? Je pense que si le principe reste, il est néanmoins préférable d’avoir recours à des catéchismes plus contemporains, même s’ils ne sont pas dictés par Dieu comme le cantique de Moïse. En effet, il faut tenir compte des révélations ultérieures de la Bible, et notamment de tout ce qui a été enseigné dans le Nouveau Testament.

Pour ce qui est de la forme de l’instruction orale, je pense que la forme de questions et de réponses des catéchisme en usage dans l’Église depuis les temps anciens est un modèle sûr : il est complet, accessible et adaptable. À titre personnel, je recommande le catéchisme de Heidelberg, qui est succint, complet, très beau et a un pedigree biblique et historique impeccable. J’ai utilisé aussi le catéchisme pour enfants de Drelincourt, qui est beaucoup plus facile à transmettre et tout aussi complet. Mais d’autres sont possibles, depuis le catéchisme de Genève à celui de la Nouvelle cité aux éditions BLF.

Le plus compliqué dans l’apprentissage du catéchisme, c’est de mettre à part un temps pour apprendre et réviser ces questions. Le moment le plus adapté reste les cultes familiaux, quand ils existent. Sinon, tout temps où vous êtes disponibles avec vos enfants est un bon moment pour le faire. N’en faites pas trop, et ne vous fixez pas d’objectifs trop exigeants : mieux vaut apprendre tout petit à petit, et aller au bout, que d’abandonner trop vite parce que l’objectif était trop ambitieux.

En ce qui concerne la pédagogie, ce n’est malheureusement pas ma meilleure compétence. Mais voici les conseils que j’ai trouvé utiles :

  • En dehors d’un catéchisme formel, il y a bien sûr toute une culture chrétienne à créer dans votre foyer, de manière à ce que cette “coloration” soit transmise à vos enfants, et que lorsqu’ils auront à affronter leurs propres tentations, ils aient un “témoin” dans leur coeur déjà tout prêt, qu’ils lisent la Bible ou non. Cela comprend les lectures, les rituels familiaux (autour de Noël et Pâques notamment)… On reproche aux fondamentalistes d’avoir été trop rigides dans leur rejet de la culture mondaine, et certains parmi vous ont peut être souffert de ces excès de rejet. Néanmoins, si je n’approuve pas leur application, je pense que les fondamentalistes avaient raison sur le principe : une sous-culture chrétienne est en fait très importante pour que la Bible continue de résonner efficacement en nous, une culture qui n’est pas seulement présente sur l’étagère, mais dans notre cœur aussi.
  • Au lieu de “sous-traiter” le catéchisme et la production de cette culture orale aux éditeurs chrétiens, les anciens et pasteurs de l’Église pourraient s’intégrer davantage dans le choix des livres chrétiens familiaux, en proposant des recommandations, voire des achats groupés si nécessaire, ou en engageant le dialogue avec les éditeurs.
  • Il doit exister une “mémoire collective” chrétienne, des références culturelles communes à tous les chrétiens qui leur permettent ensuite d’avoir des éléments de vision commune. Je ne parle pas ici d’œcuménisme, ou de démarche proprement religieuse. Je parle ici d’unité culturelle, c’est à dire s’entendre pour avoir des éléments culturels communs en dehors de la Bible qui nous serviront aussi de “sentinelles”. C’est le rôle joué par les confessions de foi et le psautier autrefois. En entendant les psaumes de Marot, on savait sans voir encore que l’on était dans une assemblée chrétienne, et même protestante. Cela s’oppose aux tendances individualistes de la sous-culture chrétienne actuelle.
  • Pour générer cette mémoire collective, il va falloir agir non au niveau ecclésial, mais familial. Donner des conseils sur le culte familial, et prendre pour base un catéchisme (Heidelberg par exemple), des chants communs (le psautier est idéal) et aider les familles dans ce sens.
  • Le sujet de cette mémoire collective ne doit pas être un éloge de l’Église, ou des individus qui la composent, mais un sobre rappel de notre nature pécheresse, et de notre besoin de rédemption, selon le modèle laissé par le cantique de Moïse. Le but de l’instruction orale est d’être un résumé de l’Alliance du salut, il ne faut pas l’oublier.

Voilà pour les points pratiques de cette instruction orale instituée par Dieu, mais dont la mise en œuvre requerra beaucoup de prudence de notre part.

Conclusion

Il est temps de récapituler :

Il viendra un temps où nous serons tentés, tentés par le doute, tentés par la frustration, tentés par l’effroi. Il viendra un temps de peur et d’angoisse, un temps où le chemin que Dieu veut nous faire prendre ne sera plus clair. Il viendra un temps d’oubli où nous n’abandonnerons pas Dieu, mais nous le perdrons de vue pourtant parce que nous mettrons certaines choses avant lui. Il viendra un temps de difficultés et de douleurs qui nous éreinterons, qui nous feront perdre une grande partie de notre énergie. En ce temps-là, nous ne serons pas joyeux et plein de force, prêt à résister et prendre l’initiative même de lire l’Écriture.

En ces temps où les étoiles paraîtront s’éteindre, il restera un témoin qui vous parlera à l’oreille, qui vous remettra au cœur les paroles de vie dont vous avez besoin : c’est le Saint-Esprit qui utilisera toute forme d’instruction orale que vous avez retenue par le passé.

Au jour où vous aurez besoin de connaître la volonté de Dieu, vous serez alors reconnaissants d’avoir mis en place et appris ces paroles en plus de l’Écriture.

Amen.

Étienne Omnès

Mari, père, appartient à Christ. Les marques de mon salut sont ma confession de foi et les sacrements que je reçois.

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