« Jusqu’à maintenant, nous avons parlé d’alliances théologiques (Alliance de Rédemption, Alliance des oeuvres et Alliance de Grâce). C’est-à-dire de concepts qui traversent l’Écriture et que les théologiens ont désigné par alliance. Toutefois, ces trois alliances théologiques ne sont pas des alliances historiques, à l’exception de l’Alliance de Création (Alliance des oeuvres) qui n’est pas seulement un concept qui sert de base au principe des œuvres partout dans l’Ecriture mais qui a aussi été historiquement conclue avec Adam. L’Alliance de Grâce, comme nous l’avons dit, a aussi une expression historique en ce qu’elle a été « administrée » par des alliances historiques, vers lesquelles nous nous tournons maintenant.
Alliance Abrahamique
L’alliance avec Abraham est « conclue » (littéralement « coupée ») en Genèse chapitre 15. Elle est « établie » ou « confirmée » en Genèse 17. Cette alliance est gracieuse, elle administre l’alliance de grâce car, avant même qu’Abraham n’ait rien fait, Dieu l’appelle, lui fait une promesse et lui donne la circoncision. En Genèse, Dieu apparait à Abraham alors qu’il dort profondément. Il coupe des animaux en deux et passe au milieu, symbolisant le fait que s’il ne respectait pas les termes de l’alliance il serait lui aussi coupé en deux. Qui se douterait qu’un jour c’est effectivement lui qui serait brisé pour que l’alliance nouvelle soit établie…
Le Nouveau Testament ne cesse de souligner que nous sommes enfants d’Abraham. Il est notre père, il a été justifié par la foi, il a vu le jour de Jésus-Christ, nous héritons des promesses qui lui ont été faite. Bref, la nouvelle alliance est l’accomplissement des promesses faites à Abraham. Pour ces raisons et d’autres encore que je ne détaille pas ici car ce livre n’est pas un traité sur les alliances, l’alliance abrahamique est considérée comme une alliance de grâce. Autrement dit, cette alliance est le moyen que Dieu utilise pour administrer sa grâce aux hommes. En fait, cette alliance est même la plus importante, celle sur laquelle toute l’histoire biblique est fondée.
Alliance Mosaïque
L’alliance mosaïque est plus complexe que l’abrahamique. En effet, d’un côté l’Écriture nous dit très clairement que celle-ci est un prolongement en quelque sorte de l’alliance avec Abraham (Ex 32 :13) et que les Juifs par ses dispositions, ses sacrifices, etc. ont été guidés vers le Christ. Les cérémonies prescrites avaient pour but, non pas d’être une fin en soi mais de pointer vers le sanctuaire céleste et vers le Christ. Pour ces raisons, et d’autres que nous verrons plus tard, cette alliance sert donc aussi à administrer la grâce aux croyants de l’Ancien Testament. Toutefois, si nous nous arrêtions ici, nous ne dirions pas toute la vérité. Dieu a choisi d’administrer sa grâce d’une façon très particulière, en donnant la Loi.
Paul nous dit en Romains 5 que, depuis Adam jusqu’à Moïse, la mort a régné alors que personne n’a péché par une transgression pareille à celle d’Adam. Pourquoi dit-il « d’Adam à Moïse » et non pas d’Adam à Abraham ou d’Adam à Christ ? Il cherche en effet à établir un parallèle entre Adam et Christ dans ce chapitre. Mais il nomme Moïse car justement, en Moïse, a été conclue une alliance similaire à celle qu’Adam connaissait, une alliance des œuvres, basée sur le principe « fais ceci et tu vivras ».
Ce principe des œuvres n’a pas été donné comme pour Adam comme un moyen d’atteindre la béatitude, puisque le péché rendait impossible cela. Dieu n’a pas redonné une alliance des œuvres similaire à celle d’Adam, cela aurait contribué à éloigner les Israélites du Christ et à leur faire penser qu’ils pouvaient établir leur propre justice en dehors de la foi. Non, Dieu a réaffirmé le principe des œuvres de manière typologique, imagée, temporaire et nationale.
Typologique et imagée car Israël, en revivant l’exil hors de Canaan, allait connaître à son niveau l’expulsion d’Eden qu’Adam a connu. Temporaire car une fois la sentence d’exil exécutée et la venue du Messie promis, cette alliance n’avait plus lieu d’être, d’où le fait qu’elle soit « près de disparaître ». Nationale car cette réaffirmation du principe des œuvres n’avait pas pour but, encore une fois, de sauver des individus par leurs œuvres mais de conserver la nation d’Israël dans le pays promis, symbole de la nouvelle terre que nous hériterons.
Il convenait aussi que le nouvel Adam naisse dans une alliance similaire à celle du premier Adam afin de montrer avec plus de clarté qu’il allait obéir parfaitement là où Adam a échoué. C’est là où il faut être vigilant et où tout prend sens. Tout prend sens en Christ. L’Alliance des œuvres en Eden a échoué. Dieu a établi et administré en Abraham et en Moïse une Alliance de Grâce en vertu de laquelle les pécheurs sont sauvé par la foi. Eternellement, Dieu a établi une Alliance de Rédemption avec le Fils qui est aussi une alliance qui repose sur le principe des œuvres : Christ doit obéir parfaitement pour mériter le salut. Mais ce n’est pas pour lui qu’il mérite le salut, c’est pour les membres de l’Alliance de grâce qui ont cru. Dans l’alliance mosaïque, Dieu accomplit un double but, il administre sa grâce en prolongeant l’alliance abrahamique et il établit un pédagogue, la Loi, qui nous indique quelle est l’exigence de Dieu et ce que le Christ va venir accomplir en naissant sous la Loi. Toutes les alliances sont donc centrées sur le Christ, chacune à leur manière. Voyons maintenant comme l’alliance davidique pointait vers le Christ.
Alliance Davidique
L’alliance davidique est conclue dans le cadre de l’alliance mosaïque. David et ses descendants deviennent les rois légitimes d’Israël. À un certain niveau, elle administre aussi la grâce car en elle est administrée la promesse du Messie qui sera Roi et « Fils de David ». C’est pour cela que la nouvelle alliance peut aussi être prophétisée comme étant en continuité avec l’alliance davidique : « Je conclurai avec vous une alliance éternelle, celle de la bienveillance fidèle envers David » (Esaïe 55 :3).
Mais, puisqu’elle est comme une « modalité » de l’alliance mosaïque, elle contient aussi le principe des œuvres : si les descendants de David désobéissent, ils perdront la faveur de Dieu. En fait, à partir de ce moment, les rois deviennent les « oints » (messies) de l’Éternel qui obéissent pour le peuple et le guide dans l’obéissance… ou la désobéissance. Alors que l’alliance mosaïque nous disait que le peuple devait obéir à Dieu ; depuis l’instauration de la royauté, c’est surtout chez le roi que l’obéissance est exigée. Voilà pourquoi les livres des Rois nous donnent des listes interminables de rois bons et de rois mauvais. Ce sont eux le centre de l’attention. Cette réaffirmation du principe des œuvres est donc précisée par l’alliance davidique : c’est par l’obéissance d’un Roi, Jésus-Christ, que le peuple sera sauvé. Obéissance du roi car l’Alliance de Rédemption comme nous l’avons dit est basée sur le principe des œuvres. Et salut pour le peuple car, en vertu de l’Alliance de Grâce, ce Roi est le représentant de son peuple.
J’espère que toutes ces expressions ne vous perdent pas. En réalité, une fois que les termes sont bien définis, ce n’est pas si compliqué. Ces différents noms d’alliances théologiques ont été donnés par les théologiens pour clarifier les choses, pas pour les rendre plus compliquées. Une fois que l’on est habitué au vocabulaire, les discussions théologiques deviennent beaucoup plus fluides car nous voyons tout de suite de quoi l’autre parle quand il dit « telle alliance est une alliance de grâce ». »
(Extrait d’un futur livre !)
Ce sujet est vraiment important car il a des conséquences sur notre façon de vivre l’Église aujourd’hui comme nous le verrons plus tard. Mais il importe aussi dans notre lecture de l’Ancien Testament. Au lieu de faire une lecture moralisante des Rois, nous comprenons que ceux-ci nous parle du Christ, notre Roi parfait qui a parfaitement obéi et accompli la Loi.
Cher Maxime. En relisant Osée 6.7, il me semble que l’alliance mosaïque est de même nature que l’alliance adamique. Le rapprochement ne se situerait pas seulement entre les hommes (ou en Adam) et les Israélites, mais aussi entre l’alliance adamique et l’alliance mosaïque.
Merci de ta contribution à la réflexion théologique.
Non, si elles étaient de même nature, l’alliance mosaïque proposerait un salut par les oeuvres, ce qui est absurde après la chute. Et les dispositions gracieuses de Moïse seraient inexplicables ainsi que la continuité avec Abraham.
Par ailleurs, le texte de Osée s’explique aisément si l’alliance mosaïque réaffirme le principe des oeuvres à un niveau typologique : Précisément pour que Israël brise l’alliance comme Adam. Comme je l’ai dit, il y a un parallèle fort, non seulement entre Adam et Moïse mais entre les deux alliances, comme vous le dites. Mais ce parallèle est de nature typologique, ce n’est pas une relation d’équivalence mais d’analogie.
Mais, après la chute, Dieu n’a jamais proposé le principe des oeuvres comme moyen de salut ; dire l’inverse serait donner raison aux Juifs qui ont rejeté le Christ !