Apprendre à raisonner (33) : Les sujets et les prédicats
27 juillet 2022

Cet article est le trente-troisième d’une série consacrée à la logique classique (ou aristotélicienne, c’est-à-dire développée par Aristote). Dans le trente-deuxième, j’ai montré pourquoi les propositions sont si importantes. Dans cet article, j’expliquerai ce que sont les sujets et les prédicats : les deux ingrédients dont on a besoin pour construire des propositions, les résultats du jugement (la deuxième opération de l’intelligence). Comme d’habitude, je reprendrai énormément le contenu du livre Socratic Logic de Peter Kreeft (pp. 140 à 141).


I. Définition       

Pour rappel, nous avons vu avant que nous pouvions avec notre intelligence comprendre ce que sont les choses, leur essence ou nature à travers l’utilisation de concepts et donc les définir. C’est la première opération de l’intelligence appelée l’appréhension simple.

Mais la logique ne s’arrête pas, il y a une seconde opération qui suit et dépend de la première : le jugement. Le jugement a pour but de formuler des propositions. Dans cette étape, on reprend les concepts (obtenus lors de l’étape précédente) et on les combine/relie : ce qui donne des propositions.

Plus précisément, pour construire une proposition, nous avons besoin de deux (types de) concepts :
1) Le sujet : ce dont on parle (comme le sujet en grammaire, je, tu, il, elle, etc.).
2) Le prédicat : ce qu’on va dire du sujet (une qualité qu’on va lui attribuer).

II. Exemple

Par exemple, en disant Laurent est chinois, je relie Laurent (le sujet) à est chinois (le prédicat). Cet exemple nous montre bien que le jugement est la suite de l’appréhension : pour dire Laurent est chinois, nous devons supposer que nous savons avant ce que Laurent et chinois seuls veulent dire.

III. Attention : sujet et prédicat ne sont pas interchangeables !

Il faut faire attention : le sujet et le prédicat d’une proposition ne sont pas interchangeables contrairement aux membres (de gauche et de droite) d’une équation (mathématique). En effet, cela peut soit donner :

1) Une proposition absurde qui n’a pas de sens.
Par exemple, on a le droit de réécrire l’équation 2+3 = 5 dans l’autre sens 5 = 2+3 alors que si je change la proposition Laurent est chinois en Chinois est Laurent, il n’y a plus aucun sens.

2) Une proposition qui a un sens complètement différent de l’originale.
Par exemple, Dieu est amour et L’amour est Dieu, on a deux propositions qui ne veulent pas du tout dire la même chose. La première affirme que Dieu désire le bien de ses créatures tandis que la deuxième « divinise » l’amour humain, fait de lui la réalité ultime de notre monde (c’est donc une forme d’humanisme1).


Illustration : Éducation d’Alexandre par Aristote, gravure de Charles Laplante, publiée dans le livre de Louis Figuier, Vie des savants illustres – Savants de l’antiquité (tome 1), Paris, 1866, pages 134-135.

  1. Au sens de courant qui place la réalité ultime de l’univers en l’homme.[]

Laurent Dv

Informaticien, époux et passionné par la théologie biblique (pour la beauté de l'histoire de la Bible), la philosophie analytique (pour son style rigoureux) et la philosophie thomiste (ou classique, plus généralement) pour ses riches apports en apologétique (théisme, Trinité, Incarnation...) et pour la vie de tous les jours (famille, travail, sexualité, politique...).

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