Une défense du vote des chrétiens “déplorables”
13 novembre 2020

La fièvre électorale américaine a touché aussi beaucoup en France. Sur les réseaux sociaux, il n’est pas rare que nous ayons soutenu Trump ou le contraire, et souvent avec plus d’assurance que ne le méritait cette question. C’est indirectement dans ce contexte que Pep’s cafe a publié cet article : « Comment gérer une “gueule de bois” post-électorale ou quand mieux vaut perdre un vote que son âme ». Dans cet article que je recommande et qui est digne de lecture, il expose de façon très claire et synthétique pourquoi un chrétien devrait avoir de la distance quant au vote pour Trump. Il a rassemblé en un article les arguments des « chrétiens de gauche » (je n’aime pas ce terme, mais il a au moins l’avantage d’être à peu près compris de tous) au sujet du vote et de la foi. Il porte de façon juste plusieurs critiques du vote chrétien « de droite ». J’aimerais dans cet article interagir avec plusieurs d’entre elles.

Mais commençons par dire ce que je partage avec mon frère, pour que l’on se rende compte que ce qui nous unit est plus grand que notre variation :

  • Les prophéties qui annonçaient la victoire de Trump n’ont pas à être prises au sérieux. J’en viendrais presque à souhaiter la défaite de Trump rien que pour humilier cette adultère de Paula White.
  • Nous manquons de recul et chaque cycle électoral expose notre superficialité et notre stupidité quant à la question de savoir si un chrétien doit voter pour « candidat de droite » ou « candidat de gauche ». Il y a une vraie question intéressante et profonde qu’il faut fouiller avant 2022 !
  • Les élections américaines ne nous concernent en fin de compte pas (si nous n’habitons pas aux États-Unis), et peu m’importe personnellement si c’est Trump ou Biden qui gagne. En revanche, la question du vote chrétien va bientôt venir en France, et cette élection américaine est l’occasion idéale d’y répondre et de la traiter. En effet, parce que justement elle ne nous concerne pas directement, nous pouvons plus paisiblement traiter le sujet.
  • Enfin, aucune de ces positions « vote à gauche » ou « vote à droite » n’attaque directement nos positions confessionnelles, et il n’y a pas lieu de juger l’orthodoxie de la foi sur la base de la couleur du vote.

Sur ce, il est temps pour moi d’exposer mon biais en toute clarté : je fais partie de ces déplorables qui préfèreraient Trump à Biden. Cette position n’engage pas le blog en tant que tel, et cet article n’est pas une tribune pour défendre Trump. Je ne sais déjà pas ce qu’il se passe en France, comment pourrais-je avoir un jugement définitif pour les États-Unis ? Mon objectif dans cet article est simplement d’expliquer comment on peut être chrétien et voter « déplorable ». Et encore : je ne cherche pas tellement à défendre ce vote. Je souhaiterais plutôt l’expliquer.

Pourquoi voter pour un triple adultère défenseur des « valeurs chrétiennes » ?

L’argument est facile, souvent repris, et tout à fait défendable : Beaucoup d’évangéliques américains votaient Trump pour la défense des « valeurs chrétiennes », alors que l’homme en question est un gros matou vulgaire et trois fois adultère. Selon les mots de Pep’s :

La question que peut se poser toute personne de bon sens est celle-ci : comment un chrétien peut-il soutenir un candidat dont la personnalité et le discours sont à ce point diamétralement opposés, en paroles et en actes, aux valeurs chrétiennes ?

C’est parce qu’il y a une ambiguïté sur le mot « valeurs chrétiennes ». D’un côté, il désigne les normes de comportement individuel qui nous viennent de l’Évangile. De l’autre il désigne des principes d’éthique collective qui sont la toile de fond des lois votées, le but dont l’administration de Trump est un moyen.

Or on peut être un bon chrétien individuellement et soutenir une politique satanique (comme ce que proposaient Biden–Harris sur l’avortement, tout bons chrétiens qu’ils soient individuellement). Et inversement, on peut être un gros matou vulgaire et soutenir une politique qui garde l’héritage chrétien de la nation à sa place. Or dans cette élection américaine, on ne pouvait pas avoir à la fois un président bon chrétien individuellement et qui défendît l’héritage de la chrétienté. En conséquence, les évangéliques américains ont fait en majorité un choix qui est très raisonnable : le gros matou qui défend la chrétienté.

Ce n’est pas contraire à la tradition chrétienne : Martin Luther affirmait que s’il fallait choisir entre un homme prudent (qui sait gouverner) et un homme vertueux (une bonne personne), et qu’on ne pouvait pas avoir les deux, alors il fallait préférer le prudent vicieux au vertueux incompétent. Voici ce qu’il dit :

Une juste question a été posée pour savoir s’il vaut mieux qu’un prince soit bon et imprudent [=ne sait pas prendre les bonnes décisions] ou bien prudent et méchant. Ici Moïse assurément demande les deux qualités. Néanmoins si l’on ne peut pas avoir les deux qualités à la fois, il vaut mieux celui qui est prudent et mauvais plutôt que le bon imprudent ; Car l’homme bon ne régnerait pas en réalité et serait dirigé par d’autres, et seulement les pires personnes.

Pour avoir plus de contexte sur cette déclaration, je vous renvoie vers cet article du Journal of Lutheran Ethics. Notez d’ailleurs la pertinence de cet argument, alors que l’on pose ouvertement la question de qui pourrait diriger l’Amérique après la mort de Biden, avant même qu’il n’ait commencé son mandat !

Ainsi donc, on peut ajouter les unes aux autres toutes les failles de caractère de Trump que l’on peut trouver, cela ne pèse rien en face du projet anti-chrétien des démocrates.

La question du « témoignage prophétique de l’Église »

Pep’s relaie aussi Alex Deschênes dans Le Verbe :

Le danger ultimement est l’idolâtrie : transformer des politiciens en idoles. Quand un influenceur catholique prête allégeance à un candidat ou à un parti sans aucune retenue critique, quand un prêtre se fait photographier bien en vue avec son col romain dans un rassemblement partisan ou prêche en chaire en faveur d’un candidat, ou lorsqu’une religieuse délivre un discours dans un congrès officiel de parti, l’Église sacrifie sa voix de prophète et devient le valet d’un parti politique. Et les partis aiment ces blocs d’électeurs faciles à gagner et qui viennent à eux sans trop d’engagements de leur part.

Or, le prix à payer n’est pas le moindre, il s’agit de la crédibilité même de l’Église, de son autorité morale et de sa vocation prophétique [sinon, elle ne sera plus qu’un instrument à des fins idéologiques et partisanes].

J’ai ici plusieurs remarques à faire :

  • Il y a un double standard : on critique le prêtre visible dans un meeting de Trump, mais on oublie les évêques qui ont appelé à soutenir Biden.
  • Parler de bloc électoral facile à gagner revient à oublier l’histoire de la droite religieuse américaine. Les « chrétiens de droite » ont facilement trouvé dans le parti républicain un contexte accueillant et des contacts fructueux. Les « chrétiens de gauche » n’ont jamais été intégrés par le parti démocrate, qui est trop sécularisé pour admettre une variante croyante de ses convictions politiques. Si les démocrates voulaient eux aussi un bloc électoral facile à gagner chez les chrétiens, il fallait le chercher aussi.
  • Ce n’est pas que les « chrétiens de droite » sont des prostituées à pas cher : c’est surtout que les démocrates ont adopté depuis Obama un discours anti-chrétien de plus en plus net, et que même si les élus démocrates restent modérés, leurs alliés détestent et haïssent les chrétiens avec une intensité rare. Reprocheriez-vous aux juifs d’aimer les soviétiques face aux nazis ? Même si les soviétiques étaient eux aussi antisémites, eux au moins n’avaient pas de solution finale. Cela est comparable pour les chrétiens : même si les républicains déçoivent et agacent les chrétiens, ils ne peuvent tout simplement pas ne pas les soutenir. La survie de leur communauté en dépend.
  • Quant à la « crédibilité », « l’autorité morale » et la « vocation prophétique » de l’Église, c’est de la théologie de la libération tout juste bonne à réenchanter des eunuques papistes et déchristianisés. La réalité c’est que l’Église n’est pas l’avant-garde du processus de libération, mais la cible du mouvement progressiste. Les alliés des démocrates haïssent déjà l’Église américaine : ce n’est pas le vote de Trump qui va changer ça.

Sur la manière chrétienne de faire la politique

Ensuite mon ami de Pep’s cafe revient sur les « valeurs chrétiennes » qui doivent accompagner un dirigeant chrétien. On retrouve la distinction que j’ai faite plus haut.

  • D’un côté, un président chrétien peut être compris comme un président individuellement chrétien, sans se prononcer sur l’orientation de sa politique.
  • De l’autre, un président chrétien peut être compris comme un président qui établit et défend une chrétienté, c’est-à-dire un ordre légal et social chrétien, sans se prononcer sur sa morale individuelle.

Pep’s semble ne retenir que le premier sens. Je retiens le second : quand je vote pour des valeurs chrétiennes, en réalité je devrais dire que je vote pour une chrétienté ! Cela ne veut pas dire que j’approuve qu’il défende cette chrétienté par le mensonge et la tromperie. Mais cela veut dire que la défense souillée d’une chrétienté est préférable à une défense vertueuse d’un ordre social satanique. L’idéal étant bien sûr la défense vertueuse d’un ordre vertueux.

Autrement dit : il est aussi possible qu’un seul parti politique ait le monopole de la foi chrétienne, si l’autre parti est ouvertement séculier et anti-chrétien. C’est le cas en 2020, surtout avec un bipartisme.

Sur la hiérarchie des valeurs

Parmi les valeurs chrétiennes, il y a bien sûr la défense de la vie, qui justifie l’opposition politique à l’avortement, souvent portée par la droite (« souvent » est ici relatif à la gauche. Parce que dans l’absolu…). Mais il y a aussi l’accueil de l’étranger, qui est souvent porté par la gauche. Pourquoi ces chrétiens déplorables se permettent de faire le tri dans ce qui les arrange ? Pourquoi ne voter qu’en fonction de l’avortement et pas des autres valeurs chrétiennes ?

  • Parce que selon les mots même de féministes radicales comme Mary Daly, l’avortement n’est pas un sujet comme les autres : c’est la mère de toutes les batailles culturelles. C’est la ligne de front aussi bien du projet chrétien que du projet progressiste. Même si sur le papier, ils n’ont aucune raison de l’être, la situation actuelle fait que défendre la vie défend le modèle de chrétienté américaine, qui contient aussi le droit de porter les armes, la peine de mort, etc. De même, dans le climat actuel, accueillir l’étranger c’est aussi défendre le projet politique qui le soutient, qui contient l’avortement jusqu’à 9 mois et la pédophilie dépénalisée. Il n’y a en 2020 pas de compromis possible entre accueillir l’étranger et défendre la vie.
  • Il n’y a rien de plus cohérent que de défendre la vie et d’être pour la peine de mort. En effet, si la Bible exige de tuer les tueurs (Genèse 9:6) c’est justement parce que la vie est sacrée. Lorsque vous renoncez à la peine de mort, alors seule la vie des assassins est sacrée. Les victimes, elles, ne valent pas la peine d’être défendues ou punies.
  • Pour ce qui est des armes, je n’ai pas à me prononcer sur cette coutume américaine. Je rappelle simplement que le cœur de l’argument est la capacité pour un peuple de résister à son propre gouvernement s’il devenait vicieux. Autrement, il n’y a plus de freins possibles pour les « méchants princes ». Ce n’est pas forcément ma position, mais elle mérite un meilleur traitement que « les armes tuent et tuer c’est pas bien ».

Sur le climat de tension dont les déplorables seraient responsables

L’avant dernier argument de Pep’s — et il est très populaire ailleurs — est que Trump aurait amené à lui seul un climat de tension rhétorique et de méfiance réciproque qui a mis le pays au bord de la guerre civile. À ceci je réponds:

  • C’est quasiment de la malhonnêteté : les causes de tensions dans la société américaine datent de bien avant Trump, et le pire qu’on puisse lui reprocher est d’avoir permis à soixante-dix millions d’électeurs d’avoir leur point de vue défendu en public.
  • D’autres pays occidentaux, qui sont dirigés par des gens très polis et très bien sur eux, expérimentent eux aussi des tensions gigantesques. Un exemple au hasard : la France. Là aussi c’est la faute de Trump?
  • Parler de police du langage est d’une superficialité folle, quand on considère les causes profondes du trumpisme. D’autres que moi les ont exposées, je ne perdrai pas de temps dessus.

Faut-il préférer perdre les élections plutôt que perdre son âme ?

Enfin, il y a l’envoi de l’article de Pep’s :

C’est ainsi que notre fidélité à Jésus-Christ [et non à un messie politique], notre seul Seigneur, peut nous exposer à être marginalisés, voire persécutés dans certains pays, quand nous refusons les compromis, les mensonges, les injustices auxquels ces pouvoirs cherchent à nous entraîner. Mais nous n’avons rien à craindre, puisque le dernier livre de la Bible, l’Apocalypse, proclame la victoire du Christ crucifié et ressuscité, à laquelle nous sommes associés. C’est en cela que nous devons mettre notre confiance et notre espérance, et non dans le résultat d’une élection, que celui-ci annonce la victoire ou la défaite d’un candidat. Mieux vaut perdre un vote que perdre son âme.

À ceci je fais plusieurs remarques :

  • L’exemple du Bruderhof : c’est une communauté anabaptiste de l’Allemagne des années 30. Au milieu d’une époque troublée, ils ont tâché de témoigner des vraies valeurs évangéliques à travers une vie communautaire simple et remplie d’hospitalité, digne du sermon sur la Montagne, etc. En 1937, quatre cents policiers nazis encerclèrent leur communauté, la pillèrent et leur apprirent qu’ils avaient quarante-huit heures pour quitter le pays. Le « témoignage chrétien » n’est possible que sous un gouvernement de chrétienté. La pureté électorale est une stupidité si elle aboutit à l’interdiction de la piété chrétienne.
  • Nous n’avons aucune garantie que nous supporterons bien la persécution : parfois une Église est comme régénérée sur les décombres de la violence, mais il y aussi et souvent eu des cas de persécution qui ont abouti à la destruction des Églises nationales. Où sont les chrétiens d’Irak ? En plein réveil ? Au moment de décider pour qui voter, entre des vertueux persécuteurs et des chrétiens pervers, il faut nous rappeler que notre souci n’est pas la fin des temps, mais la prochaine génération : aurai-je le droit de transmettre l’Évangile à mon fils ? C’est de cela dont je suis responsable.
  • En conséquence, soutenir fortement un candidat qui a fortement démontré son attachement à une chrétienté n’est pas de l’idolâtrie : c’est du simple bon sens. N’appelez pas prostitution ce qui est instinct de survie.

Alors un chrétien doit-il voter à droite ?

Pourtant, ma position n’est pas vraiment de voter à droite. Ce qui m’intéresse ultimement, ce n’est pas de voter à droite ou à gauche : c’est de vivre une vie conforme aux valeurs de l’Évangile, et de pouvoir la transmettre à mes enfants. Pour cela, je souhaite et aspire après un état de chrétienté, et actuellement ce projet est (très mal) porté par la droite, tandis que la gauche veut au contraire le détruire complètement.

Mais si vous voulez savoir, je me fiche des partis : longue vie au Roi !


Illustration : Alfred-Henri Bramtot, Le Suffrage universel masculin, huile sur toile, 1891 (mairie des Lilas).

Étienne Omnès

Mari, père, appartient à Christ. Les marques de mon salut sont ma confession de foi et les sacrements que je reçois.

1 Commentaire

  1. Anthon

    Bonsoir
    Merci Etienne et aussi Pep’s pour ces échanges et ce débat super intéressant.
    Tout d’abord, je suis assez surpris que l’on évoque un clivage droite/gauche. Ces termes n’ont aucune réalité aux U.S. Conservons les dénominations traditionnelles : démocrates/républicains.
    Si on était en France, ce serait quelque chose comme LREM/LR, heu … quoique non, … disons P.S/LREM …. Ha zut …. Ou plutôt …. P.S/LR …… fichtre, pas évident ! Bref, vous m’avez compris
    Si l’on s’affranchit des poncifs et autres clichés, il faut bien avouer que tout çà c’est bonnet blanc/blanc bonnet. C’est ainsi que Caroline Galactéros, Présidente de Geopragma écrit (au sujet du conflit au Haut-Karabagh) :
    « Trump ou pas Trump, le problème est bien plus grave. Il tient à l’incapacité structurelle de la puissance de tête occidentale à tolérer l’altérité, la coopération, le dialogue et l’équilibre. L’Amérique ne partage pas. Elle ordonne, elle soumet, elle désigne, elle punit, elle choisit, elle élit. Elle ne sait que lever et baisser les pouces. Donc elle fédère et cristallise l’hostilité et les alliances contre elle ».
    http://geopragma.fr/conflit-du-haut-karabakh-comprendre-pourquoi/
    Concernant Trump, il faut bien reconnaître qu’il s’est fait allègrement dézingué par la presse mainstream (surtout en France) avant même ses débuts.
    A cet effet, il est intéressant de revenir un peu en arrière. Par exemple en consultant l’excellent article de Chady Hage-Ali (auteur que tu connais bien Pep’s) en date du 13/01/2017 :
    « Depuis l’accession de Donald Trump à la présidence des États-Unis, une vigoureuse levée de plumes, des plus modérément alarmistes aux plus catastrophistes, s’est manifestée dans la presse internationale. Même chez les moins acerbes d’entre elles, le ton n’est pas à l’optimisme et à l’assurance lorsqu’il s’agit d’imaginer les prochains actes que posera l’administration Trump dans le domaine de la politique étrangère. Déjà nostalgiques du président sortant Barack Obama, les médias américains mainstream, l’élite intellectuelle, le gratin hollywoodien et leurs collègues de la gauche libérale européenne brossent en général de son successeur le portrait d’un populiste fruste, ignare, xénophobe, irrationnel, impulsif et imprévisible, apparaissant, par contraste, encore plus répulsif. Les qualificatifs d’imprévisible et de dangereux dont est fréquemment affublé Donald Trump sont généralement tenus pour synonymes sous le point de vue des relations internationales et de la stabilité mondiale ».
    Avec le recul, c’est d’autant plus « amusant », que Trump n’a commencé ni accentué aucun guerre (en dépit de quelques fanfaronnades anti Nord-Coréennes ou Chinoises). Et cela contrairement à son prédécesseur, qui lui, pourtant, passait pour un ange :
    « Il convient également de souligner que les guerres de Barack Obama, récipiendaire du prix Nobel de la paix 2009 prématurément décerné sur la seule foi de ses discours, n’ont pas toutes été plus « morales » ni moins meurtrières pour les civils que celles de son prédécesseur. Elles ont surtout été plus discrètes (ou moins visibles) et plus nombreuses, impliquant directement l’Amérique dans au moins huit théâtres, parmi plus de 160 pays où les forces américaines sont présentes, et jetant – ou du moins affinant – les bases de la « guerre permanente » (permanent war), à la fois préventive, multinationale à grande échelle et à l’empreinte plus légère (light footprint operations). »
    L’administration Trump et l’enjeu de la restauration d’une politique étrangère bipartisane | STRATPOLITIX
    En fait, au-delà des candidats en lice, quels qu’ils soient c’est toute une histoire qui est à interroger. Ce qu’a fait E. Todd dans son ouvrage « Où en sommes-nous ? Une esquisse de l’histoire humaine » (Ed. du Seuil, 2017).
    Il y consacre quelques chapitres, dont un nommé : « Homo americanus ». Au travers d’une analyse anthropologique, notamment sociale et religieuse, il y décrit une nation foncièrement raciste et inégalitaire. Plus particulièrement, il dénonce l’« Academia » (l’Université et les grandes écoles notamment) comme une machine à fabriquer l’inégalité, essentiellement économique. Institution où les démocrates sont largement présents.
    Je n’ai pas la place (ni les compétences) pour résumer ici les thèses de Todd, mais il décrit -in fine – le vote en faveur de Trump comme « rationnel » : « Les médias de l’establishment ont représenté Trump comme vulgaire, aberrant, maléfique ou fou ; les électeurs en souffrance mais rationnels, ont manifesté leur volonté d’un retour de l’Amérique à ses fondements ». (p. 413).
    Enfin et en lien avec la religion en forte baisse chez les jeunes, l’anthropologue conclue ainsi : « Ce que nous constatons ici, c’est probablement la sécularisation terminale de la société américaine, qui nous garantit que le néo-conservatisme à base religieuse est bien en train de mourir du côté républicain et qu’une révolution générale est en marche. Cette chute explique la victoire de Trump dans le camp républicain et la montée d’attitudes favorables à l’Etat chez les jeunes. La relative résistance des jeunes générations à Trump rend, quant à elle, raisonnable l’hypothèse optimiste d’un regain démocratique qui, parti d’une matrice xénophobe, atteindrait ensuite, sur un mode accéléré, sa phase II, universaliste. » (p. 447-448).
    Enfin, il me semble utile de récuser la présentation souvent trop binaire qui nous est faite de Trump/Biden. Le méchant contre le gentil. En témoigne l’idée fausse et pourtant largement reçue de Trump à l’origine du mur de séparation USA/Mexique, alors que ce sont ses prédécesseurs qui l’avaient commencé. Par ailleurs, voir également les « casseroles de Biden. Par exemple : » Glenn Greenwald quitte The Intercept après la censure de son article sur Biden (les-crises.fr)) ou encore ceux d’H. Clinton (7 scandales qui traînent comme des boulets aux pieds d’Hillary Clinton | JDM (journaldemontreal.com)).

    Bref, alors pour qui voter (si on avait eu le choix) ?
    Comme l’écrit Etienne : « … je souhaite et aspire après un état de chrétienté, et actuellement ce projet est (très mal) porté par la droite, tandis que la gauche veut au contraire le détruire complètement ». Et force est de constaté, que c’est ce clivage auquel nous sommes confrontés depuis longtemps maintenant en France.
    La question est importante, car on pourrait (même si a priori, c’est improbable) avoir un tel choix en France. Par exemple entre J.L Mélenchon et E. Macron (désolé pour notre Président …).
    Et là, ben j’avoues …. mon vote c’est : blanc !!
    Entre une politique d’injustice sociale chronique et une société farouchement libertaire (liberticide (sic)), ne me demandez pas de choisir.
    Désolé pour la longueur. Merci à vous deux, Etienne et Pep’s pour vos contributions respectives tout au long de l’année.

    Fraternellement en Christ

    Réponse

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