Apprendre à raisonner (49) : Les tautologies
20 décembre 2022

Cet article est le quarante-neuvième d’une série consacrée à la logique classique (ou aristotélicienne, c’est-à-dire développée par Aristote). Dans le quarantehuitième, j’ai présenté les premiers principes, fondements ultimes du syllogisme et en réalité de tout raisonnement. Dans cet article, j’expliquerai ce que sont les tautologies. Comme d’habitude, je reprendrai énormément le contenu du livre Socratic Logic de Peter Kreeft, pp. 189-190.


Définition

Une tautologie est une proposition qui n’a pas besoin d’être prouvée parce qu’elle est évidente : si on la nie, on se contredit. On en trouve trois types (ou trois définitions) :

  1. Une proposition vraie par la nature même de sa forme répétitive (peu importe son contenu).
    Exemple : « Les chiens sont des chiens ».
  2. Une proposition qu’on ne peut pas nier sans tomber dans une contradiction (dans ce sens, les premiers principes sont des tautologies).
    Exemple : « Une chose est ce qu’elle est. » (le principe d’identité vu ici)
  3. Une proposition dont le prédicat est nécessairement inclus dans son sujet.
    Exemple : « La démocratie est le pouvoir par le peuple. »

Propriétés des tautologies

Elles peuvent ne pas être subjectives

Par exemple, « Les anges sont immatériels » est bien une tautologie car immatériel est bien un prédicat contenu dans le sujet ange. Mais comme ce n’est pas évident pour tout le monde, on dit qu’elles sont des évidences objectives mais non subjectives.

Elles n’apportent aucune nouvelle information

Pour reprendre les exemples précédents, cela est clair pour « Les chiens sont des chiens » et « Une chose est ce qu’elle est. » Pour « La démocratie est le pouvoir par le peuple », c’est aussi le cas car on a seulement reformulé démocratie par pouvoir par le peuple, qui sont en soi équivalents.

Elles sont vraies de manière nécessaire

Les tautologies sont nécessairement vraies et leurs contradictions nécessairement fausses. Dire qu’une proposition est nécessaire signifie qu’on ne peut pas concevoir son contraire sans contradiction car elle ne dépend d’aucune autre vérité pour être vraie. En philosophie analytique, on dira qu’elle est vraie dans tous les mondes possibles1.

Par exemple, 2 + 2 = 4 est une vérité nécessaire car il est impossible d’imaginer un monde où elle serait fausse. Alors que « Les lions sont oranges » est contingente car on peut imaginer sans contradiction un autre monde (un monde possible) où les lions seraient verts (comme les grenouilles, les mantes religieuses, etc.).


Illustration : Éducation d’Alexandre par Aristote, gravure de Charles Laplante, publiée dans le livre de Louis Figuier, Vie des savants illustres – Savants de l’antiquité (tome 1), Paris, 1866, pp. 134-135.

  1. Bien que cette expression semble suspecte pour les thomistes ou d’autres courants traditionnels (car venant de Leibniz, un moderne), il n’y a rien à craindre. Elle n’est qu’une expression pratique pour s’exprimer à propos du possible et du nécessaire.[]

Laurent Dv

Informaticien, époux et passionné par la théologie biblique (pour la beauté de l'histoire de la Bible), la philosophie analytique (pour son style rigoureux) et la philosophie thomiste (ou classique, plus généralement) pour ses riches apports en apologétique (théisme, Trinité, Incarnation...) et pour la vie de tous les jours (famille, travail, sexualité, politique...).

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