Cet article est le quarante-et-unième d’une série consacrée à la logique classique (ou aristotélicienne, c’est-à-dire développée par Aristote). Dans le quarantième, j’ai présenté la distinction entre termes distribués et termes non distribués. Dans cet article, j’expliquerai celle entre inférences immédiates et inférences médiates. Comme d’habitude, je reprendrai énormément le contenu du livre Socratic Logic de Peter Kreeft, des pages 166 à 167.
Quelques rappels sur les raisonnements
Je rappelle tout d’abord que le raisonnement est la troisième opération de l’esprit. Il est aussi appelé inférence (un synonyme). Il vient après
- L’appréhension simple : première opération par laquelle nous créons des concepts ;
- Le jugement : deuxième opération par laquelle nous formons des propositions
Nous les avons tous deux étudiés tout deux avant.
On a vu dans plusieurs articles précédents ce qu’était le raisonnement :
Le raisonnement, c’est relier non plus juste des mots, mais plusieurs propositions : plusieurs qu’on regroupe dans les prémisses et une autre qui est la conclusion. Cette connexion de propositions ne se fait pas au hasard, mais dans un ordre : la conclusion est la conséquence logique des prémisses. D’abord les prémisses, puis la conclusion. Comme avant avec le jugement et la proposition, on distingue entre le raisonnement qui est l’action (de l’intelligence) et l’argument.
Apprendre à raisonner (4) : Les trois opérations de l’intelligence
Le raisonnement se définit encore comme suit : c’est une opération par laquelle l’esprit humain d’une connaissance donnée déduit une connaissance nouvelle.
Abbé Arthur Robert, Leçons de logique, op. cit., p. 35.
Inférences immédiates et inférences médiates
Parmi les raisonnements, on trouve deux types fondamentaux : les inférences immédiates et les inférences médiates. La différence porte sur :
- Le nombre des prémisses,
- Le nombre de termes (dans le raisonnement entier),
- Et donc implicitement l’information apportée (nouvelle ou non).
Inférences immédiates
Dans le cas des inférences immédiates, il n’y a qu’une seule prémisse, que deux termes et donc pas vraiment de nouvelle information. Une bonne explication déjà existante vaut mieux que mes propres mots :
Cela dit, ce genre d’inférence n’aboutit à rien de nouveau. On ne fait au fond qu’exprimer autrement la même vérité ou exprimer une fausseté immédiatement impliquée par la phrase de départ. C’est comme si l’intelligence se retournait sur elle-même : sans rien ajouter, elle reformule autrement ce qu’elle sait vrai ou faux. Il est vrai, se dit-elle, que « tous les chiens ont quatre pattes » ; donc il est vrai aussi que « certains chiens ont quatre pattes », que « certains êtres qui ont quatre pattes sont des chiens », mais il est faux qu’« aucun chien n’a quatre pattes », etc. Ce sont là de bonnes inférences, mais elles ne conduisent à rien de véritablement nouveau.
Victor Thibaudeau, Principes de logique. Définition, énonciation, raisonnement, presses de l’université Laval, 2006, p. 658.
Certaines inférences ne comportent cependant aucun véritable mouvement de l’intelligence ; elles n’aboutissent par le fait même à rien de nouveau par rapport au point de départ. On parle alors d’inférence immédiate.
Op. cit., p. 666.
Un exemple d’inférence immédiate : « Les chats sont malins. Donc ils sont vraiment malins. » On voit qu’il n’y a pas d’erreur : la conclusion suit bien la prémisse (même si c’est évident). Par contre, on n’obtient aucune nouvelle connaissance. Et on a effectivement une seule prémisse (« Les chats sont malins. ») et deux termes (le sujet chat et le prédicat malin). On verra dans les trois prochains articles différents types : la conversion, l’obversion puis enfin la contraposition et l’inversion (qu’on appelle formes combinées).
Inférences médiates
Dans celui des inférences médiates il y a plusieurs prémisses (au moins deux), plusieurs termes (au moins trois) et alors une nouvelle information.
D’autres inférences mettent en jeu un cheminement de l’intelligence, qui raisonne à partir de ce qu’elle admet préalablement de façon à découvrir ou comprendre des choses jusqu’alors non évidentes
Ibid.
Un exemple d’inférence médiate : « Tous les hommes sont mortels, or Socrate est un homme, donc Socrate est mortel. ». On voit qu’on a une nouvelle information qu’on n’avait pas avant (que Socrate est mortel), plus de deux termes (« Socrate », « homme » et « mortel ») et bien plusieurs prémisses (deux) :
- « Tous les hommes sont mortels. »
- « Or Socrate est un homme. »
- « Donc Socrate est mortel. »
Plan général
Pour finir, voici une petite feuille de route qui résume les notions que nous avons vues avant et celles que nous verrons dans le reste de la série.
Illustration : Éducation d’Alexandre par Aristote, gravure de Charles Laplante, publiée dans le livre de Louis Figuier, Vie des savants illustres – Savants de l’antiquité (tome 1), Paris, 1866, pages 134-135.
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