4 janvier 2018

Pour compléter notre article sur la présence de Christ dans la Cène, nous présenterons ici quelques citations intéressantes du Traité de la Sainte Cène de Jean Calvin. Pensez aussi à consulter l’article sur la Cène selon la Confession de Foi de Westminster.

Importance de la doctrine :

C’est une chose très dangereuse que de n’avoir aucune certitude au sujet de ce mystère, dont la compréhension est si nécessaire à notre salut.

Structure du Traité :

Premièrement donc, nous exposerons dans quel but et pour quelles raisons le Seigneur a institué ce saint sacrement. Deuxièmement, quel fruit et utilité nous en recevons; et nous expliquerons comme le corps de Jésus-Christ nous y est donné, Troisièmement, quel est son usage légitime. Quatrièmement, nous exposerons les erreurs et superstitions par lesquelles il a été contaminé; et nous expliquerons en quoi les serviteurs de Dieu doivent différer d’avec les papistes. Pour le dernier point, nous dirons quelle a été la source de la controverse, tant débattue, même entre ceux qui ont de notre temps remis l’Évangile en lumière et ont oeuvré à édifier avec droiture l’Église par la saine doctrine.

Nature de la nourriture en la Cène :

Mais tout comme la vie en laquelle il nous a régénérés est spirituelle, ainsi faut-il que la viande, pour nous conserver et nous affermir en celle-ci (la vie spirituelle), soit spirituelle.

Comment la Cène complète la prédication :

Or, ce qui est dit de la parole appartient aussi bien au sacrement de la Cène, par le moyen duquel le Seigneur nous mène à la communication de Jésus-Christ. Car puisque nous sommes si stupides, nous ne pouvons pas le recevoir parfaitement (litt : en vraie connaissance de coeur) quand il nous est présenté simplement par la doctrine et la prédication. Ainsi donc, le Père de miséricorde, ne répugnant pas à s’accommoder à notre infirmité, a bien voulu ajouter à sa parole un signe visible, par lequel il représentât la substance de ses promesse, pour nous confirmer et nous fortifier, en nous délivrant du doute et de l’incertitude. Puisque c’est un mystère si haut et incompréhensible, de dire que nous ayons communication au corps et au sang de Jésus-Christ, et que de notre part nous sommes si rudes et simples, que nous ne pouvons comprendre la moindre chose sur Dieu, il était approprié qu’il nous permette ainsi (par le sacrement) de comprendre, selon notre capacité de pouvoir le supporter.

Sur la substance du sacrement :

Pour cette raison, j’ai coutume de dire que la substance et matière des sacrements, c’est le Seigneur Jésus : l’efficacité, ce sont les grâces et bénédictions que nous avons par son moyen. Or, l’efficacité de la Cène est de nous confirmer la réconciliation que nous avons avec Dieu par sa mort et sa passion; la lavement de nos âmes que nous avons dans l’effusion de son sang; la justice que nous avons en son obéissance; bref, l’espérance du salut que nous avons en tout ce qu’il a fait pour nous. Il faut donc que la substance soit conjointe avec (le sacrement), autrement il n’y aurait rien de ferme ni certain. De cela, nous pouvons conclure que deux choses nous sont présentées en la Cène : à savoir, Jésus-Christ, comme source et matière de tout bien; puis après, le fruit et l’efficacité de sa mort et sa passion. (…) De quoi il découle premièrement que nous ne devons pas simplement communiquer à son corps et à son sang, sans aucune autre raison; mais plutôt dans le but de recevoir le fruit qui nous vient de sa mort et sa passion.

Sur le fait de nier la véritable communication du corps et du sang de Christ dans la Cène :

Toute l’utilité que nous devons trouver en la Cène est anéantie si Jésus-Christ ne nous y est pas donné comme substance et fondement de tout. Cela résolu, nous confesserons sans douter que de nier la vraie communication de Jésus-Christ dans la Cène, c’est rendre ce saint sacrement frivole et inutile, ce qui est un blasphème exécrable et indigne d’être écouté. De plus, si la raison de communiquer à Jésus-Christ (ou : de communier avec Jésus-Christ) est afin que nous ayons notre part et notre portion dans toutes les grâces qu’il nous a acquises par sa mort, il n’est pas seulement question que nous soyons participants de sa nature divine (1), mais il nous faut aussi participer à son humanité, en laquelle il a rendu toute obéissance à Dieu son Père pour satisfaire à nos dettes. De plus, à proprement parler, l’un ne peut se faire sans l’autre; car quand il se donne à nous, c’est afin que nous le possédions entièrement. Pour cette raison, comme il est dit que son esprit est notre vie, de même il nous dit de sa bouche que sa chair est vraiment viande, son sang vraiment breuvage (Jean 6:55). Si ces paroles ne sont pas dites en vain, il convient que, pour avoir notre vie en Christ, nos âmes soient nourries (litt : repues) de son corps et de son sang comme de leur propre nourriture. Cela donc nous est véritablement testifié en la Cène, quand il nous est dit du pain que nous le prenions et le mangions, et que c’est son corps; que nous buvions de la coupe, et que c’est son sang.

En quel sens les éléments sont-ils appelés corps et sang :

Maintenant, si l’on demande à savoir si le pain est le corps de Christ, et le vin son sang, nous répondrons que le pain et le vin sont signes visibles, lesquels nous représentent le corps et le sang; mais que ce nom et titre de corps et de sang leur est attribué, parce que ce sont des instruments par lesquels le Seigneur Jésus nous les distribue. (2)

Comment le corps et le sang sont voilés et manifestés par les éléments :

Notre Seigneur voulant faire apparaître son Esprit au baptême de Christ, le représenta sous la figure d’une colombe. Saint Jean-Baptiste, rapportant cette histoire, dit qu’il a vu le Saint-Esprit descendre. Si nous enquérons de plus près, nous trouverons qu’il n’a vu que la colombe, vu que le Saint-Esprit en son essence est invisible. Toutefois, sachant que cette vision n’était pas une vaine figure, mais un signe certain de la présence du Saint-Esprit, il ne douta pas et dit qu’il l’a vu (l’Esprit) car il s’est manifesté à lui selon sa capacité. Ainsi en est-il de la communication que nous avons au corps et au sang du Seigneur Jésus. C’est un mystère spirituel, qui ne peut se voir à l’oeil, ni se comprendre par l’intelligence humaine. Il nous est donc représenté par des signes visibles, puisque notre faiblesse le requiert, de telle façon néanmoins que ce n’est pas une figure nue, mais conjointe avec sa vérité et substance. C’est donc à bon droit que le pain est nommé corps, puisque non-seulement il le nous représente, mais aussi nous le présente.

Sur le fait que Dieu doit donner la réalité avec le signe :

Si Dieu ne peut tromper ni mentir, il s’ensuit qu’il accomplit tout ce qu’il signifie. Il faut donc que nous recevions vraiment en la Cène le corps et le sang de Jésus-Christ, puisque le Seigneur nous y représente la communion de l’un et de l’autre.

Sur le bienfait spirituel de la Cène :

C’est pourquoi, quand la puissance du Saint-Esprit est jointe aux signes, et quand on les reçoit dignement, nous pouvons en espérer un bon moyen et une bonne aide pour nous faire croître en sainteté de vie et particulièrement en amour.

Sur ce qu’il faut croire pour recevoir dignement la Cène :

Si nous voulons donc prendre dignement la Cène sacrée du Seigneur, il faut que nous tenions en ferme confiance de coeur le Seigneur Jésus pour notre unique justice, vie et salut recevant avec certitude les promesses données par lui.

Sur le symbole d’unité en la Cène :

Car, comme le pain, qui est sanctifié pour l’usage de nous tous, est constitué de plusieurs grains tellement mêlés ensemble qu’on ne saurait les discerner l’un de l’autre, ainsi devons-nous être unis entre nous d’une amitié indissoluble.

Sur la fréquence avec laquelle nous devons prendre la Cène :

Si nous regardons bien la but auquel le Seigneur nous mène, ne reconnaîtrons que l’usage doit être plus fréquent que ce que beaucoup pratiquent.

Sur le fait de s’abstenir de prendre la Cène :

Ils avoueront qu’il est téméraire d’invoquer Dieu pour notre père, si nous ne sommes membres de Jésus-Christ; ce qui ne peut être à moins que la substance et vérité de la Cène ne soit accomplie en nous. Or, si nous avons la vérité, nous sommes à plus forte raison capables de recevoir le signe : on voit donc que celui qui veut s’exempter de recevoir la Cène doit aussi s’abstenir de prier Dieu !

Sur ceux qui considèrent les autres :

Car saint Paul ne commande pas d’examiner les autres, mais qu’un chacun s’examine soi-même.

Sur les pères et la notion de sacrifice :

Les anciens pères ont appelé la Cène sacrifice et ils ont raison car la mort de Christ y est représentée. Leur parole ne va pas plus loin : ce nom est attribué seulement parce qu’elle est mémoire de ce sacrifice unique, qui doit pleinement nous suffire.

Sur la nécessité de manger et boire :

Et ainsi l’ordre que Jésus nous a donné est non pas que nous offrions ou immolions, mais que nous prenions et mangions ce qui a été offert et immolé.

Sur le sophisme du sacrifice eucharistique :

Je ne veux pas dissimuler les solutions qu’avancent ici les ennemis de la vérité : c’est que la messe n’est pas un sacrifice nouveau, mais seulement une application du sacrifice unique dont nous avons parlé. Bien qu’ils colorent un peu leur abomination en parlant ainsi, toutefois ce n’est qu’un pur sophisme; car il n’est pas dit seulement que le sacrifice de Christ est unique, mais qu’il ne doit jamais être réitéré, puisque son efficacité demeure à toujours. Il n’est pas dit que Christ s’est une fois offert au Père, afin que d’autres après fissent la même oblation pour nous appliquer la vertu de son intercession; mais qu’il est entré dans le sanctuaire céleste, et que là il est apparu pour nous rendre le Père propice par son intercession.
Sur l’invalidité de la Cène quand elle n’est pas prise par les communiants :
Si nous comprenons cela, il apparaîtra que toutes les messes auxquelles il n’y a pas de communion telle que le Seigneur l’a instituée, ne sont qu’abomination.

Sur l’importance de la Parole et de la doctrine sur la cérémonie :

Il s’ensuit donc que la substance repose en la doctrine; si celle-ci est ôtée, ce n’est plus qu’une cérémonie froide et sans efficacité. Cela, est non seulement affirmé par l’Écriture, mais aussi testifié par les canons du pape, dans une phrase attribuée à Saint Augustin, où il demande ce qu’est l’eau du baptême sans la Parole, sinon un élément corruptible ? La Parole, dit-il, non pas après qu’on l’ait prononcé, mais après qu’elle soit comprise

(1) Calvin utilise ici le mot esprit pour parler de la nature intangible et divine du Christ.
(2) Cette définition est très large, un catholique romain ou un luthérien s’y retrouverait.

Maxime Georgel

Maxime est interne en médecine générale à Lille. Fondateur du site Parlafoi.fr, il se passionne pour la théologie systématique, l'histoire du dogme et la philosophie réaliste. Il affirme être marié à la meilleure épouse du monde. Ils vivent ensemble sur Lille avec leurs trois enfants, sont membres de l'Église de la Trinité (trinitelille.fr) et sont moniteurs de la méthode Billings.

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