Le paradis terrestre existe-t-il encore? Nous le nions.
Notez bien que la question ne porte pas sur l’emplacement d’Eden (inconnu, autour du Proche Orient) mais sur sa persistance après le Déluge. C’était en effet l’opinion de certains catholiques (dont Bellarmin) disaient que le paradis est dans un endroit inconnu de nous, pourtant défini comme la nouvelle terre et écarté de toute visite des pécheurs, où Enoch et Elie vivent jusqu’à ce qu’ils en sortent pour combattre l’antichrist. Ils faisaient cette proposition pour contrer l’accusation protestante qui disait que le pape était antichrist : « vous voyez bien que le pape n’est pas un antichrist, puisque Enoch et Elie ne sont pas sortis du jardin d’Éden pour combattre l’antichrist à la fin des temps.»
Heureusement, un grand nombre d’auteurs romains plus sains d’esprits s’y sont opposés aussi, et Turretin se joint à eux pour dire que le jardin d’Éden a été détruit lors du Déluge.
Argumentation (§§4-6)
Premièrement, il est écrit que les eaux du déluge ont entièrement couvert la terre. Genèse 7,19-20 Les eaux grossirent de plus en plus sur la terre. Toutes les hautes montagnes qui sont sous le ciel furent recouvertes. Les eaux montèrent quinze coudées plus haut, et les montagnes furent recouvertes.
Deuxièmement, nul n’a trouvé le jardin d’Éden, ni en son emplacement le plus probable (Mésopotamie), ni ailleurs.
Troisièmement, à quoi bon construire une Arche, quand il aurait suffi à Noé et sa famille d’aller au paradis/jardin d’Éden ?
Quatrièmement, il n’y a aucune raison de postuler la persistance d’un paradis terrestre, sinon pour faire une réponse ad hoc aux arguments protestants. Elie et Enoch ont été enlevés au paradis céleste.
Je ne synthétiserai pas les réponses aux objections, étant donné que même les catholiques contemporains ignorent cette proposition saugrenue. Je me contenterai de citer le dernier paragraphe.
Mais ce n’est pas sans mystère que Dieu semble avoir voulu que ce paradis soit détruit, pour signifier qu’un autre, bien plus agréable, doit maintenant être recherché par nous. Il est préparé pour les croyants par Dieu, par l’intermédiaire du Christ, non pas sur la terre mais dans les cieux (Lc. 23:43 ; Apoc. 2:7) ; il est rempli d’innombrables arbres mystiques et divins portant les fruits les plus sains (Apoc. 22:2) ; il est arrosé par le courant pérenne de l’eau vive et des fleuves de plaisir (Ps. 36:8), d’où le péché et la mort sont à jamais bannis ; d’où Satan, une fois chassé, ne peut plus revenir ; d’où le croyant, une fois reçu, ne peut plus être chassé ; dont les anges n’interdisent pas l’approche, mais où ils conduisent nos âmes, afin qu’elles jouissent dans la vision de Dieu de tout le bonheur et qu’elles y passent un sabbat éternel. -François Turretin, Institut de Théologie Élenctique, 8.7.13
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